Archives par mot-clé : Lorenzo dell’Acqua

Au jardin des analogies

par Lorenzo dell’Acqua

Au Jardin des Analogies

         Je me demande si ce n’était pas pour me réchauffer que j’étais entré la première fois au Louvre où m’émerveillèrent les antiquités égyptiennes et les taureaux ailés de Khorsabad, les émaux de Limoges dans une salle immense et déserte, la Grande Galerie, quintessence de la peinture italienne ainsi que les sculptures médiévales avec l’émouvante Marie-Madeleine d’Erhart. Ma curiosité me fit ensuite découvrir les Impressionnistes à Orsay et la Peinture Moderne à Beaubourg. Dès lors conquis, j’enchaînai avec l’Orangerie, Marmottan, Jacquemart-André, le MAM, le Petit Palais et je pris toutes les cartes d’abonnement possibles pour échapper aux files d’attente

         Mon aventure photographique ne commence que plus tard, en 2016, quand je cessai mon activité (professionnelle) ce qui m’incita peut-être inconsciemment à m’en créer une nouvelle. Au début, c’était la beauté des rencontres entre les œuvres et les visiteurs que je voulais prendre en photo. Et puis, un peu par hasard, m’apparurent d’étonnantes correspondances entre eux. Les femmes eurent très tôt ma préférence car, même photographiées de dos, elles étaient toujours belles alors que les hommes Continuer la lecture de Au jardin des analogies

ETUDE DES COMPORTEMENTS DANS LES MUSÉES

par Lorenzo dell’Acqua

Mon cheminement dans les musées est aussi incohérent que celui de l’Homme des foules d’Edgar Poe. La seule logique qui me guide est de faire une photo originale comportant une analogie entre le visiteur et la Peinture qu’il regarde. Aussi surprenant que cela puisse paraître, cette éventualité est fréquente mais personne ne s’en aperçoit et c’est logique : à part moi, tous les autres visiteurs viennent voir les peintures et non les visiteurs.

Aller au musée me permet de joindre l’utile à l’agréable. Lors d’une visite d’une heure et demie au Louvre, je parcours environ quatre kilomètres à pied. Je vais donc au musée comme d’autres vont à la gym. J’ai aussi la chance d’être le seul à savoir que dans les musées, il fait chaud en hiver et frais en été, il ne pleut jamais, les femmes sont pleines de charme, tous les visiteurs sont polis et contents d’être là. En 2024, j’y suis allé 125 fois, soit un jour sur trois et même un jour sur deux si l’on exclut les trois mois de l’année que je ne passe pas à Paris. La raison de cette fréquentation plus qu’assidue est l’espoir de faire un livre avec mes photos.

A force de les suivre et de les dévisager de dos, Continuer la lecture de ETUDE DES COMPORTEMENTS DANS LES MUSÉES

Les Modernes

par Lorenzo dell’Acqua

Les Modernes
Alan Rudolph, 1988

Depuis que je suis allé le voir au cinéma Le Lucernaire, rue Notre Dame des Champs, je ne parviens jamais à me souvenir du nom de ce film d’Alan Rudolph sorti en 1988, Les Modernes. Depuis lors, chaque fois que j’y pense (et vous allez vite comprendre pourquoi j’y pense souvent), c’est Les Professionnels qui me revient systématiquement à l’esprit créant un obstacle supplémentaire pour le retrouver. J’ai beau faire appel à mon savoir de fils de Psychanalyste, je ne trouve aucune explication. De surcroît, j’avais maintes fois écouté la musique de ce film dont le nom était écrit en rouge sur la pochette jaune du CD. Son auteur, le chanteur Charlélie Couture, était le frère de notre compagnon de voyage à Ceylan devenu lui aussi célèbre peu après, Tom Novembre. Je me souviens très bien que nous avions oublié ce disque dans le lecteur de notre voiture situé, je me demande encore pourquoi, dans le coffre arrière, c’est-à-dire en pratique inaccessible. Les noms de ces deux artistes sortis de la nuit des temps me sont revenus, non pas immédiatement, je l’avoue, mais dans les trois minutes qui ont suivi l’évocation de ce disque. C’est bien la preuve que mon oubli sélectif du seul titre du film Les Modernesest très étrange. Continuer la lecture de Les Modernes

La Peinture : du Didactisme à l’Esthétisme

par Lorenzo Dell’Acqua

L’œuvre d’art est-elle belle et que signifie-t-elle ?

Je ne suis sensible qu’à sa première fonction qui est de nous montrer la Beauté. Je ne vois aucun intérêt supplémentaire à comprendre le pourquoi de l’œuvre et à découvrir ce qu’elle veut montrer ou démontrer. 

Au début de l’histoire de la Peinture, les fresques des églises étaient des bandes dessinées dont la fonction didactique l’emportait sur la qualité esthétique. La Peinture n’avait pas pour objectif à cette époque d’être belle mais de raconter et d’expliquer l’Histoire Sainte aux illettrés, c’est-à-dire quasiment à tout le monde, ce qui ne l’a pas empêché d’être belle. En même temps que le niveau culturel s’élevait, la Peinture s’est éloignée de ce Didactisme primaire pour se rapprocher de l’Esthétisme tel qu’il est défini dans Le Robert : Attitude artistique qui recherche la beauté formelle.

Les premières œuvres réellement dépourvues de toute fonction interprétative me semblent être celles des Impressionnistes. Le Surréalisme, lui,  représente Continuer la lecture de La Peinture : du Didactisme à l’Esthétisme

Les vélos

par Lorenzo Dell’Acqua

LES VÉLOS

La prolifération des vélos dans Paris m’attriste. Bien sûr, elle m’inquiète  aussi quand je suis au volant de ma voiture, ce qui est de plus en plus rare, et quand je prends moi aussi le mien. Mais pourquoi ce vélo avec lequel, et grâce auquel, j’ai découvert Paris tous les dimanches matin me fait-il désormais si peur ? Ma chute provoquée par un autre cycliste avec le coma de plusieurs heures qui l’a suivie en est la cause indirecte. Aujourd’hui, en effet, le danger ne vient plus des voitures mais de l’incivisme de la majorité des cyclistes qui ne connaissent et ne respectent aucune règle ni le moindre code de la route. En plus de leur incorrection, ils affichent un profond mépris des piétons surtout  âgés.

       J’ai le sentiment que l’usage croissant du vélo reflète la dégradation des conditions de vie des Parisiens. Pourquoi sont-ils de plus en plus nombreux à l’utiliser ? Parce que les restrictions à la circulation automobile empêchent désormais les étudiants et les adultes en activité de se déplacer en voiture et en bus dans Paris. Le cas des retraités est dramatique : point de salut pour Continuer la lecture de Les vélos

Une journée particulière

par Lorenzo dell’Acqua

Cette journée avait été si particulière que j’envisageais de la raconter à mes amis. Malheureusement, quarante-huit heures plus tard, je ne me souvenais déjà plus pourquoi et ce n’était pas les 6,4 kilomètres parcourus à pied, une distance respectable à mon âge sans être pour autant un réel exploit, qui en étaient la raison. La disparition récente d’un ami confirma le bien-fondé de ma décision : mon Journal Illustré m’avait été fort utile pour retrouver tous les bons moments passés avec lui et tombés dans l’oubli.

C’était donc un 11 novembre qui n’avait rien de plus original que les soixante-quatorze précédents. Je quittai mon domicile assez tôt le matin, mais pas trop quand même, pour rejoindre à la Brasserie Mollard un ex-ami redevenu mon ami. Les horaires de nos levers me fournirent un sujet de réflexion pendant le trajet en bus. Quand on se lève tard, la journée ne commence que deux heures plus tard après le dérouillage matinal obligatoire à notre âge et c’est alors le moment de se mettre à table pour le déjeuner. Autrement dit, quand on se lève tard, Continuer la lecture de Une journée particulière

Réponse à la critique

par Lorenzo dell’Acqua
« Les Corneilles sont d’une bien belle plume »
in : Mes romans préférés, Coutheillas Ph, Gallimard, 2024

Ayant été agressé sur les réseaux sociaux par des critiques injustes de son dernier roman, Lorenzo a demandé et obtenu un droit de réponse dans le JdC. Comme ce n’est pas le genre à bayer aux corneilles, ni à se coucher avec les poules, ni un adepte de la politique de l’autruche, ni un manchot, ni une poule mouillée et encore moins un perdreau de l’année, il a pris la plume pour nous cocotter cette chouette réponse et voler dans les plumes de ces oiseaux de malheur.

Deux critiques m’ont profondément attristé : la première regrettait que NRCB soit le héros à vie de mes récits et la seconde que le modèle de ce personnage, un écrivain de la Rive Gauche adulé du grand public, soit trop facilement reconnaissable. Selon cette dernière, la réputation immaculée de ce dernier risquait d’en être ternie aux yeux de ses admirateurs et surtout du jury du prochain Prix Nobel de Littérature.

A la première, il m’est aisé de répondre que de nombreux chefs d’œuvre de la littérature regorgent de ce même procédé. D’Artagnan est le héros des Trois Mousquetaires, de Vingt Ans après et du Vicomte de Bragelonne, soit 5842 pages en tout. Plus proche de nous, San Antonio, comme Sherlock Holmes, est le personnage récurrent de célèbres romans policiers homonymes. N’oublions pas non plus Swann, Mickey, Ulysse, Astérix, Tintin et Milou, Lucky Luke, Malaussène, Arsène Lupin, la Coccinelle de Gotlib et Notre Seigneur Jésus-Christ. Signalons au passage que N-R-C-B est un hommage à mon héros en référence à N-S-J-C. Et, comme l’a écrit avec justesse René-Jean dans La Croix, Continuer la lecture de Réponse à la critique

Stop and Shoot in Motion

La nouvelle série photographique du précurseur Lorenzo dell’Acqua s’intitule Stop and Shoot in Motion (SSM). Il s’agit en réalité d’une évolution de sa précédente série Stop and Shoot qui avait défrayé la chronique dans les années 20. Le principe de base reste le même : le photographe prend des photos depuis la même position et sans jamais se déplacer mais Lorenzo en a fait évoluer les règles afin d’éviter les accidents de la circulation trop fréquents lorsque le photographe restait au milieu d’une chaussée à fort trafic et l’inévitable crève lorsqu’il restait immobile sous la pluie en hiver. Désormais, le photographe, toujours immobile à la même place, se positionne dans un véhicule en mouvement (in motion), c’est-à-dire à l’abri des intempéries et sans risque d’être renversé par un autre véhicule puisqu’il se trouve à l’intérieur de l’un d’entre eux. La règle stipule Continuer la lecture de Stop and Shoot in Motion

Journal de Lorenzo, suite

Mon dernier taureau n’est pas encore né (devise du toréador)
Quand on vieillit, la voiture ne sert plus qu’à aller chez le médecin et le petit déjeuner à avaler ses médicaments

Dire qu’il n’y a pas de « vrai » noir et blanc en photographie peut sembler provocateur de la part d’un photographe. Pourtant, c’est vrai. Nous avons grandi avec le noir et blanc qui était alors la seule expression possible en photo, voire au cinéma pour les plus anciens. Tous les grands photographes le sont devenus grâce à lui. Pour peu qu’on s’y intéresse, on est tous capables de juger la qualité technique d’une photo en noir et blanc sur ses caractéristiques comme le contraste, la profondeur des noirs, les nuances de gris allant du clair au sombre, etc … C’est parce que nous en avons vu des milliers que nous avons retenu inconsciemment ces critères de qualité qui nous permettent de les apprécier.

Ce qui est étrange, et que personne ne soupçonne, c’est que le noir et blanc Continuer la lecture de Journal de Lorenzo, suite

Une Américaine à Paris

La parution dans le JdC du 26 octobre 2024 (un quotidien chrétien de gauche proche de Télérama) d’un commentaire élogieux envers NRCB (Notre Rédacteur en Chef Bienaimé) a soulevé bien des protestations et suscité une immense jalousie chez l’ensemble de ses lecteurs de sexe masculin. Pour ces maris et pères de famille respectables férus de la Princesse de Clèves, le commentaire de cette jeune et belle américaine venue étudier le portugais à Paris revêtait tous les caractères d’une véritable déclaration bien qu’il ne s’agissait, en théorie, que d’un remerciement un peu appuyé quand même pour l’aide décisive apportée par NRCB à la révision de ses cours. Selon Paddy qui avait traduit en albanais pour La Cause Ouvrière de Tirana les fameuses Lettres de la Religieuse Portugaise, la ressemblance littéraire était troublante même si certaines imprécisions grammaticales traduisaient les tâtonnements, si l’on peut dire, de l’étudiante en portugais et de son mentor parisien. Continuer la lecture de Une Américaine à Paris