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Cinq cent quatorze universités

Après toutes ces semaines où le monde effaré a vu le gouvernement fédéral des États Unis geler des milliards de subventions dues aux universités en exigeant des changements drastiques dans les modalités de recrutement des étudiants et des enseignants, après que quelques grandes institutions  aient courbé l’échine, une large coalition de présidents d’universités est en cours de constitution pour s’y opposer. Pour le moment, le signe le plus évident de cette résistance est la déclaration signée par 514 ( à la date du 27 avril) responsables d’universités pour s’opposer à ce qu’ils considèrent comme une attaque contre l’Université. Voici un bref extrait de cette déclaration :

« Nous parlons d’une seule voix pour dénoncer les excès sans précédent et l’interférence politique qu’exerce actuellement le gouvernement et qui mettent en danger l’enseignement supérieur aux États Unis. »

À ce jour, elle a été signée par 514 universités. Le Journal des Coutheillas ne craignant pas de dénoncer ceux qui résistent à Donald 1er, voici la liste des 514 :

      • Andrés Acebo, Interim President, New Jersey City University
      • Kenneth Adams, President, LaGuardia Community College
      • Kimo Ah Yun, President, Marquette University
      • Jonathan Alger, President, American University
      • Barbara K. Altmann, President, Franklin & Marshall College
      • Carmen Twillie Ambar, President, Oberlin College
      • Suzanne Ames, President, Peninsula College
      • Michelle J. Anderson, President, Brooklyn College

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Go West ! (81)

(…)
— Ton sac est dans le placard d’à côté, avec ton passeport. Nous sommes bons, maintenant ?
« Nous sommes bons », c’est la traduction littérale de « We are good ». Au cours de mon voyage, il m’a fallu du temps pour comprendre que cette expression signifie que tout va bien entre deux personnes, qu’il n’y a plus de désaccord.
Le visage dans ses cheveux, j’ai répondu :
— Oui, Mansi. Nous sommes bons…
Effectivement, nous étions bons. Alors, j’ai senti se détendre son corps et monter mon désir.

Le reste de la journée, nous l’avons passé comme un couple, un couple récent, mais établi, tranquille, assis côte à côte sur le divan, à regarder la télévision, à plaisanter sur les programmes en cours, à boire du café, à grignoter des bricoles, à discuter, à se raconter des choses que l’autre ne connait pas encore…C’était la grande réconciliation. Je donnais des détails rigolos sur mon voyage — l’épopée de Tavia courant nue dans le canyon d’Oak Creek lui plut beaucoup —, elle tentait de m’expliquer les règles du football ; je lui disais comment la guerre d’Algérie avait coupé la France en deux, elle me racontait les conflits continuels entre sa tribu d’origine et les Navajos depuis cent ans que leur réserve encerclait totalement celle des Hopis. J’essayais de lui expliquer que La Règle du Jeu était le plus grand film au monde, elle me répondait que je changerai d’avis quand j’aurai vu West Side Story. Parfois, nous nous touchions, mais à peine, tendrement. Nous avions des silences, sans gêne.
Et puis la nuit est arrivée et avec elle, la faim. On a fait frire quelques œufs, Continuer la lecture de Go West ! (81)

Au théâtre, il faut transposer

Je commencerai ma conférence d’aujourd’hui avec une citation extraite des dialogues de  »Entrée des artistes » (1938 – Réalisation de Marc Allegret – Dialogues d’Henri Jeanson)
Dans ce beau film consacré à l’art du théâtre et à son enseignement, à une élève comédienne qui proteste parce qu’elle trouve mauvaise la pièce qu’on lui fait répéter, Louis Jouvet, le professeur, répond ceci : 

« (…) Interpréter une mauvaise scène est un excellent exercice. Cette pièce est écrite par un fabricant d’accessoires de cotillon. Joue-la dans le style, joue trompe-l’œil. D’ailleurs, au théâtre, il faut transposer. Le naturel doit être un naturel de théâtre. N’oublie pas qu’il y a une rampe, un souffleur, des herses et du public.
Il faut que le personnage que tu incarnes sente le théâtre, la toile peinte et le fard. Le spectateur paye pour avoir l’illusion qu’il est au théâtre. Si tu lui enlèves cette illusion, tu commets une erreur.(…) »

Voilà, avec ce « au théâtre, il faut transposer », Henri Jeanson Continuer la lecture de Au théâtre, il faut transposer

Journal de Lorenzo, suite

Mon dernier taureau n’est pas encore né (devise du toréador)
Quand on vieillit, la voiture ne sert plus qu’à aller chez le médecin et le petit déjeuner à avaler ses médicaments

Dire qu’il n’y a pas de « vrai » noir et blanc en photographie peut sembler provocateur de la part d’un photographe. Pourtant, c’est vrai. Nous avons grandi avec le noir et blanc qui était alors la seule expression possible en photo, voire au cinéma pour les plus anciens. Tous les grands photographes le sont devenus grâce à lui. Pour peu qu’on s’y intéresse, on est tous capables de juger la qualité technique d’une photo en noir et blanc sur ses caractéristiques comme le contraste, la profondeur des noirs, les nuances de gris allant du clair au sombre, etc … C’est parce que nous en avons vu des milliers que nous avons retenu inconsciemment ces critères de qualité qui nous permettent de les apprécier.

Ce qui est étrange, et que personne ne soupçonne, c’est que le noir et blanc Continuer la lecture de Journal de Lorenzo, suite

BLIND DINNER (Extrait)

(…)
Je viens de sonner à la porte de l’appartement et, Anne et moi, nous attendons en vérifiant l’état de nos chaussures que l’on vienne nous ouvrir, quand tout à coup :

« Meeerde ! Tu as oublié les fleurs dans le taxi ! »

Anne a réussi à crier son accusation tout en la chuchotant. Crier en chuchotant est un exercice difficile mais elle le pratique avec aisance. C’est sur le même ton, car j’ai beaucoup appris d’elle dans cette technique d’agressivité, que je proteste :

« TU as oublié… ! Tu es gonflée, quand même ! TU les as oubliées autant que moi, il me semble ? Et puis, ne dis pas merde comme ça tout le temps. Chez une femme, ça fait vulgaire.

— Merde, merde et merde ! Sans vouloir être vulgaire : tu me fais chier, Gérald, chuchote-t-elle furieusement, puis, dans la foulée, mais sur un ton beaucoup plus mondain : Oh ! Bonsoir ma chérie ! C’est nous ! Nous ne sommes pas trop en retard ? Continuer la lecture de BLIND DINNER (Extrait)

 La matinée de Sainte Firmine d’Amelia (Extrait)

(…) Une dizaine d’années auparavant, un évènement était survenu dans ma vie personnelle. Il m’avait bouleversé et, malgré le temps qui avait passé, il était encore présent à mon esprit. Peu enclin aux confidences, je n’en avais jamais parlé à personne. Sans doute considérais-je cette histoire trop intime pour que je puisse la raconter sans honte, même à de très proches amis, à supposer que j’en eusse. Elle était assez banale et bien loin d’être passionnante, mais elle m’avait marqué. À l’époque, j’étais persuadé qu’elle avait constitué l’une de ces rares étapes par lesquelles un homme doit passer au cours de son existence et qui le laisseront différent de ce qu’il était avant de les franchir. Cette nuit était sans doute l’occasion de la partager enfin avec quelqu’un. Voir comment ces deux étrangers recevraient le récit de cet évènement m’intéressait et m’inquiétait tout à la fois. Comprendraient-ils l’importance qu’il avait revêtue pour moi ou le jugeraient-ils banal et sans intérêt ? Y trouveraient-ils l’indice d’une sensibilité de bon aloi ou d’une sensiblerie ridicule ?  J’étais conscient du risque de moquerie ou même de déconsidération que je courais, mais, tout au long de la soirée, Bauer et Fitzwarren m’avaient parus exempts de préjugés et plutôt bienveillants. Je décidai donc de passer cet épisode au crible de leur jugement. De toute façon, je n’avais rien d’autre à leur raconter. Je me lançai :

 La matinée de Sainte Firmine d’Amelia

« Ça s’est passé à Paris, il y a neuf ans, en novembre. Continuer la lecture de  La matinée de Sainte Firmine d’Amelia (Extrait)

Un soir à Monte-Carlo…

Dernière heure :
La participation aux élections s’annonce forte, encore plus forte que prévu. C’est notre seule chance pour réduire l’ampleur de la victoire aujourd’hui certaine du RN et le priver d’une majorité absolue. Ne la gâchez pas : sitôt que vous aurez fini de lire l’article d’aujourd’hui, allez voter !

Extrait de « Bonjour, Philippines ! et autres rencontres« 


1971, Manille, Roxas Boulevard

(…) Notre taxi prend la contre allée du boulevard et s’arrête devant le quatrième qui porte le nom de The Monte Carlo.

Devant l’entrée, deux vigiles armés et un grand costaud en costume gris foncé nous accueillent et nous ouvrent la première porte à côté de laquelle une petite pancarte avertit :

Unaccompanied ladies and deadly weapons prohibited 

Nous pénétrons dans une sorte de sas. Nous avons droit à une fouille à corps symbolique et à l’ouverture d’une deuxième porte vers un nouveau sas. Cette fois, pas de fouille à corps mais ouverture de la troisième porte qui donne enfin sur l’intérieur du restaurant. C’est une seule grand salle très éclairée. Au premier plan, il y a une dizaine de tables rondes habillées de nappes blanches tombant jusqu’au sol. Quelques-unes sont dressées et un petit nombre de clients y sont installés en train de diner ou Continuer la lecture de Un soir à Monte-Carlo…