Epoustouflant ?

Le mot d’ordre est « époustouflant ».

Mais qui le dira :

Cette cérémonie d’ouverture des jeux olympiques de Paris était longue et ennuyeuse. Certes, la pluie battante n’a pas facilité les choses aux exécutants, athlètes autant qu’artistes. Certes, il y a eu quelques belles images, le Paquebot France,  le cheval d’acier descendant la Seine,  la Marseillaise chantée du haut du Grand Palais, Raphael Nadal aux anges reprenant la flamme, l’instant d’humour avec le cartoon des Minions, un très bel Hymne à l’amour par Céline Dion et quelques jolis débordements de lumière jaillissant de monuments…

Mais que de spectacles faiblards entr’aperçus entre Austerlitz et le pont d’Iéna. Pauvres artistes sans spectateurs, exécutant un numéro subliminal pour des caméras maladroites, le long de quais apparemment déserts en arrière plan de cette armada trop lente. 

Mais surtout, que de longueurs ! Mon Dieu, cette procession de bateaux trop lents et trop nombreux hérissés de petits drapeaux ! Cette cavalcade mécanique qui n’en finissait pas ! Mon Dieu, ce défilé de mode ! Cette remontée du fleuve par la flamme en hors-bord entre le Trocadéro et le Louvre ! Cette interminable transmission de la torche entre la pyramide du Louvre et le bassin de Tuileries !…

On nous avait promis du jamais vu, on l’a eu, mais on ne nous avait pas dit que ce serait aussi ennuyeux. Certes, il n’y a pas eu d’accident, ni même d’incident et, malgré les mauvaises conditions, l’exécution fut parfaite (bravo à la logistique et aux artistes!). Je n’en dirai pas autant de la mise en images de ce spectacle, pourtant visiblement et uniquement conçu pour la télévision. C’est la conception même qui a été défectueuse par le choix d’un étirement sur plusieurs kilomètres, éloignant le public des artistes et des athlètes et farcissant la cérémonie d’interminables temps morts. Mon Dieu ! Qu’ils ont du s’ennuyer à la tribune d’honneur !

Manque de rythme, manque de simplicité, manque d’humour et de joie et, incroyable, manque de belles images de Paris.

Et puis je ne peux m’empêcher de me demander combien d’athlètes auront attrapé hier soir le rhume de leur vie. 

Buren

Cette critique a déjà été publiée le 5 décembre 2017. Ce qui m’a conduit à la rediffuser, c’est l’exposition de deux gigantesques suspensions dans les deux nefs principales du Bon Marché à Paris. Avec ces deux grands lustres,  faits chacun d’un accrochage très ordonné de panneaux d’Altuglass (ou équivalent) de forme et de couleur identique, Buren répète sa déclinaison du plastique couleur bonbon acidulé sans la renouveler. Lassant…

Les deux plateaux (Critique aisée n°108)

Vous, vous avez toujours appelé ça les « Colonnes de Buren », mais en fait le titre donné par l’artiste à cette œuvre est « Les Deux Plateaux ». Il y a une explication à cela, mais c’est plutôt rasoir.

Avec Klein suivi de près par Arman, j’avais entamé il y a peu une petite série de photographies intitulée « Les bidons de l’Art « . La photographie que je vous présente aujourd’hui aurait fort bien pu en constituer le troisième élément car voici, selon moi, un très joli exemple d’art bidon. Mais Buren, ses plateaux, ses colonnes et le reste de son œuvre méritaient plus que ça. Alors, voilà : Continuer la lecture de Buren

SÉRIE NOIRE (Extrait)

Si vous n’êtes jamais allé dans le Bronx, continuez comme ça. Mais si un jour, par un effet pervers de travaux routiers, vous deviez traverser ce quartier de New York pour rentrer de JFK à Manhattan, renfoncez-vous au fond de votre taxi, ouvrez en grand le New York Times, plongez-y votre nez et ne regardez pas dehors. Mais si par malheur vous deviez absolument vous y rendre et que vous passiez du côté du carrefour Brook / 148ème, vous avez des chances de m’y rencontrer. Je traîne tous les jours dans le coin, vers chez Matt, plus précisément devant ou à l’intérieur du « Matt’s cocktail lounge ». Si jamais vous entriez au Matt’s cocktail Lounge, vous pourriez être surpris par le décalage abyssal qui existe entre le standing du lieu et son appellation de « cocktail lounge ». L’élégance du mot devait refléter les ambitions de Matt quand il avait ouvert sa boite une demi-douzaine d’années plus tôt. C’est l’effet habituel du Bronx que de dissoudre Continuer la lecture de SÉRIE NOIRE (Extrait)

Incident technique

Histoire de Dashiell Stiller n’est plus disponible sur Amazon.fr !
Il ne s’agit malheureusement pas d’une rupture de stock, mais des conséquences d’un incident technique entièrement imputable à une maladresse de ma part.

La réédition de Histoire se Dashiell Stiller se fera dans quelques temps, dans la douleur et probablement sous un autre titre : Le Cujas. 

En attendant, mes autres publications demeurent disponibles, du moins l’espère-je. 

Blind dinner
Un « Blind dinner », c’est un dîner un peu particulier dans lequel les invités ne se connaissent pas. Dans les beaux quartiers, c’est très à la mode. Renée, la maitresse de maison, Continuer la lecture de Incident technique

L’Énéïde

Cette Critique aisée porte le numéro 23. Elle a déjà été diffusée en juin 2014.

À Hubert

Cet énorme poème peut être tout aussi connu que l’Odyssée, mais il est certainement moins lu. (En matière de littérature, la renommée et la quantité de lecteurs sont deux choses très différentes) Quand j’ai lu l’Iliade puis l’Odyssée un peu avant trente ans, ce fut un grand choc et un grand plaisir, renouvelé depuis à différents âges.
Aborder Virgile me faisait peur, probablement à cause du qualificatif de poète qui s’attache à lui, et ce n’est que quarante ans après l’Iliade que, grâce à un ami, Hubert, j’ai ouvert l’Enéide. Nouveau choc, nouveau plaisir, à renouveler. L’Enéide est un magnifique et violent roman d’aventures, un tragique roman d’amour, un conte où se mêlent histoire antique et mythologie. Passionnant.
Evidemment, il faut se faire au style. On n’est Continuer la lecture de L’Énéïde

Une autre traversée de Paris

Le moral n’est pas au plus haut, c’est la saison des soldes, mais à la campagne, y’en n’a pas, le temps tourne à l’orage et la flemme règne en maitre. Alors voici un texte, auquel je ne mettrai qu’un 10/20, mais qui vous rappellera un peu Paris. 

Il est cinq heures.

Le jour se lève.

Au Bomby’s café de la Place d’Italie, un homme noir en bleu de travail est accoudé au comptoir devant une tasse de café. Son corps est entièrement relâché et sa silhouette forme une sorte de S. Son regard est ailleurs.

Un chien remonte en trottinant le boulevard Auguste Blanqui. Il connaît les jours et les heures du marché Corvisart. Un camion s’arrête pour le laisser passer.

Il est huit heures.

Rue Gay-Lussac, une femme cherche désespérément la rue d’Uhélème. Elle entre au café pour demander son chemin. Ici, on ne connaît que la rue d’Ulm. C’est déjà ça.

Rue Saint-Jacques, il y a cette jeune femme qui pleure dans son iPhone. Devant l’église Saint Jacques du Haut Pas, elle croise sans le voir un enfant qui rit parce que les pavés Continuer la lecture de Une autre traversée de Paris

INCIDENT DE FRONTIÈRE (Extrait)

(…) Ils approchaient d’un village. Des hommes arrivaient de partout, accompagnés de chèvres, de moutons, de chevaux, d’ânes, et de femmes et d’enfants. On pouvait même voir quelques dromadaires. Comme les voitures ne pouvaient plus avancer, ils les garèrent sur le bord de la route et en descendirent pour se mettre à suivre le flot. La foule se dirigeait vers un grand espace en bordure du village, limité par une simple ficelle à laquelle on avait noué de place en place des chiffons de couleur. Le spectacle était grandiose. Sous le piétinement des hommes et des animaux, des nuages de poussière ocre s’élevaient en se mélangeant aux fumées bleutées des marchands de kebabs. Dans la foule, de lents courants se dessinaient, se frôlaient, se croisaient et se contrariaient sans cesse. Des hommes plus pressés que les autres se frayaient un chemin au milieu des troupeaux, faisant naître les cris des bêtes et des propriétaires. Le bruit était immense. Les cris aigus des femmes et des enfants étaient parfois couverts par le braiement d’un âne ou Continuer la lecture de INCIDENT DE FRONTIÈRE (Extrait)

BLIND DINNER (Extrait)

Un diner Place des Vosges à Paris. Un message sms sur tous les smartphones des invités vient d’annoncer un couvre -feu absolu à partir de toute suite. Mais que se passe-t-il donc ? 

(…)

— Mais, vous n’avez pas encore compris, Monsieur Longchamp ?

C’est moi qui viens de parler. Comme il n’y a plus de siège disponible, je me suis assis d’une fesse sur la grosse table de ferme qui occupe le centre de la pièce. Je trouve que c’est une position avantageuse. Au cinéma, on la voit souvent adoptée par le héros dans les scènes d’explication finale. Elle donne une image de décontraction, de sagesse et de confiance en soi tout à la fois. D’un ton paternel et patient, je poursuis :

— Vous n’avez pas encore compris que c’est le gouvernement qui contrôle toutes les radios ? Faut pas être grand clerc, quand même…

J’aime bien ces expressions un peu désuètes. J’essaie d’en apprendre une ou deux nouvelles par semaine. Il y a un site pour ça. En attendant, l’assistance est suspendue à mes lèvres. Raison de plus pour continuer : Continuer la lecture de BLIND DINNER (Extrait)

Que faut-il penser d’ Histoire de Dashiell Stiller ?

Des écrivains vous répondent…

La première question qui vient à l’esprit quand on s’interroge sur un roman tel que cette Histoire de Dashiell Stiller est celle-ci : où son auteur se cache-t-il, dans quel personnage ?
Une analyse sommaire du roman pourrait mener à conclure que Stiller, c’est Coutheillas. Stiller est écrivain, Coutheillas voudrait l’être. Dashiell est encore jeune, Philippe pense qu’il l’est toujours… Ceux qui connaissent bien Coutheillas ont pu décliner ainsi les ressemblances avec le photographe américain, mais pour cela, il leur aura fallu patienter car, avant le dernier chapitre, le lecteur ne saura rien de Dashiell, sinon qu’il est tombé amoureux d’Isabelle par une douce fin d’après-midi à Saint-Germain des Prés.
Si légitime que soit ce désir pour l’amateur de romans de découvrir le déguisement de l’auteur, pour le romancier devant l’œuvre de son confrère, ce n’est qu’une recherche superficielle. En effet, il est constant que dans un roman, consciemment ou inconsciemment, l’auteur met de lui-même dans chacun de ses personnages. C’est en cela que je diffère, sans que cela amoindrisse en quoi que ce soit mon admiration pour lui, de Gustave Flaubert, mon frère ainé, quand il clame que Madame Bovary, c’est lui ! A supposer qu’il ait vraiment prononcé cette sentence, ce dont on peut raisonnablement douter, je pense qu’il faut comprendre que Madame Bovary, c’est aussi lui, car Charles aussi, c’est lui, Homais de même, Rodolphe sans doute. N’allez pas vous récrier en alléguant qu’Homais est un imbécile et que Flaubert Continuer la lecture de Que faut-il penser d’ Histoire de Dashiell Stiller ?