Archives de catégorie : Critiques

Chandler, Thompson, Williams et Westlake

J’aime la Série Noire depuis longtemps et je dis pourquoi dans le texte ci-dessous. Ce texte, publié une première fois le 5 mai 2016, c’est ma Critique Aisée, la 75ème, de cette collection qui fit les beaux jours de mes nuits d’adolescent et d’adulte. Dans les Séries Noires, comme le dit la citation de Marcel Duhamel que je reproduis ci-dessous, il y a « de l’action, de l’angoisse, de la violence, du tabassage et du massacre », mais s’il n’y avait que ça, autant lire du Fleuve Noir, cette laborieuse copie de la Série Noire. Non, dans la Série Noire, il y a, presque toujours en tout cas, du style, du style dans l’écriture et dans les personnages,  Raymond Chandler avec son Philipp Marlowe, Jim Thompson et son Nick Corey, Charles Williams et son Oncle Sagamore Noonan, Donald Westlake et son John Dortmunder…
Plusieurs fois je me suis inspiré de la Série Noire pour écrire des histoires plutôt courtes, sortes de pastiches, ou plutôt d’hommages à ces écrivains véritables et mal connus. Demain, je rediffuserai ici une aventure de Sassy Manoon. 

Série Noire

La Série Noire a soixante-dix ans. Une gamine. Voici ce que Marcel Duhamel disait en 1948 de la collection qu’il avait créée : Continuer la lecture de Chandler, Thompson, Williams et Westlake

Le JdC vs Le Figaro

Il m’arrive de lire Le Figaro ; pas sous forme papier, non, sauf quand je suis dans un café, mais vous savez que c’est assez rare. Je le lis sur internet, plus précisément sur mon téléphone. Dans la plupart des cas, je ne lis que ce qui apparait dans le mail que je reçois du journal, c’est à dire le titre-résumé.

À propos des articles du Figaro, j’ai deux remarques préliminaires à présenter. Elles sont hors sujet, mais je profite de l’occasion parce que « c’est pas tous les jours que je peux dire ce que je pense. »
1ère remarque :
— depuis plusieurs mois, étrangement, les nouvelles sont toutes mauvaises. Bizarre, bizarre…
2ème remarque, mais en trois points :
a) les articles du Figaro sont courts : ils ne consistent en général qu’en un bref développement du titre lui-même.
b) ils sont répétitifs, c’est à dire qu’ils redisent plusieurs fois en des termes à peine différents  ce qui a été déjà dit quelques lignes plus haut.
c) ils ne sont pas documentés, dans la mesure où ils exposent des faits ou des idées sans préciser quel est le témoin ou l’homme politique qui les a présentés.
Voilà pour le hors-sujet.

Mais aujourd’hui, Continuer la lecture de Le JdC vs Le Figaro

Il faut revoir Les Acteurs

Maintenant que nous avons tous à disposition de généreuses plateformes sur lesquelles nous pouvons trouver, à condition de les chercher un peu, de nombreux films anciens, il faut absolument revoir certains d’entre eux qui n’ont peut-être pas eu à l’époque le succès qu’ils auraient mérité. C’est ainsi qu’il faut absolument  revoir Les Acteurs, dont je republie sans vergogne ma Critique aisée n°204 du 29 mai 2020.

Les Acteurs
Bertrand Blier – 2000

Bon.
Je n’ai pas vraiment le temps de faire une de ces Critiques Aisées dont vous avez l’habitude, mais je tiens à vous dire un mot sur un film de l’année 2000 que j’ai revu sur NETFLIX le 17 mai (2020) dans la nuit, la veille de l’annonce de la mort de Michel Piccoli.

Michel Piccoli fut un grand acteur. Il a eu une très belle carrière, a tourné avec tous les bons réalisateurs, avec tous les bons  acteurs et actrices, en particulier, inoubliable avec la non oubliée Romy Schneider, et il est mort à 94 ans. Belle vie ! Bravo l’artiste ! Je n’ai pas aimé tout ce qu’il a fait, il en a fait tellement, mais resteront pour moi bien sûr les films qu’il a tourné avec Continuer la lecture de Il faut revoir Les Acteurs

The Gen Z stare

Connaissez-vous le « Gen Z stare » ?
L’avez-vous rencontré ?
En avez-vous été victime ?
Est-ce que ça vous a fait mal ?
Et d’abord, savez-vous seulement ce que c’est ? 

Et même avant, avez-vous une idée de ce que c’est que la Gen Z ? 

Eh bien,  voilà : il y a eu  la génération silencieuse (1930-1945), les baby boomers (1945-1965), la génération X (1965-1980), les milléniaux (1980-1996), la génération Z (1996-2012) et la génération Alpha (2012- … ) 

La génération Z ou, plus familièrement la Gen Z, est donc la dénomination collective des gens nés entre 1996 et 2012.
Pourquoi Z ? Pourquoi ces dates ? Aucune idée ! Toujours est-il que ces gens là ont aujourd’hui entre 13 et 29 ans et il faut bien reconnaître que, globalement, ils sont assez nombreux, souvent exigeants, plutôt geignards et parfois rancuniers. Avec ces qualités, ils constituent un marché facile et colossal pour tous les revendeurs de complots, de paranoïas, de fake news et de mauvais goût.

Voilà pour la « Gen Z » ! 

Au « Stare » maintenant. Continuer la lecture de The Gen Z stare

L’Énéïde

C'est le programme minimum de l'été. 

Alors, on rediffuse : 
À Hubert

Cet énorme poème peut être tout aussi connu que l’Odyssée, mais il est certainement moins lu. (En matière de littérature, la renommée et la quantité de lecteurs sont deux choses très différentes) Quand j’ai lu l’Iliade puis l’Odyssée un peu avant trente ans, ce fut un grand choc et un grand plaisir, renouvelé depuis à différents âges.
Aborder Virgile me faisait peur, probablement à cause du qualificatif de poète qui s’attache à lui, et ce n’est que quarante ans après l’Iliade que, grâce à un ami, Hubert, j’ai ouvert l’Enéide. Nouveau choc, nouveau plaisir, à renouveler. L’Enéide est un magnifique et violent roman d’aventures, un tragique roman d’amour, un conte où se mêlent histoire antique et mythologie. Passionnant.
Evidemment, il faut se faire au style. On n’est pas chez Marc Lévy ou Guillaume Musso. A titre d’exemple, voici un court extrait du Chant VI dans lequel Enée, vivant, et son père, mort, se rencontrent aux Enfers.

Enée échappe à la mort et au sac de Troie en fuyant la ville en flammes. Il finira par s’installer dans le Latium, non loin de la future Rome, après sept années d’aventures en Méditerranée. Le père d’Enée, Anchise, meurt en Sicile au cours du voyage. Quelques temps plus tard, Enée doit descendre aux enfers. Son père l’aperçoit : Continuer la lecture de L’Énéïde

To be or not to be : what is the question ?

C'est le programme minimum de l'été. 

Alors, on rediffuse :

To be or not to be
Ernst Lubitsch – 1942
Jack Benny, Carole Lombard

Désœuvré comme souvent et libre comme parfois et comme l’air, je passai l’autre jour devant ce qui, pour des générations d’étudiants, restera pour toujours le lieu intime où ils ont découvert l’art du cinéma, Le Champollion. J’ai déjà écrit sur cette salle et je ne vais pas vous refaire aujourd’hui le coup de la nostalgie, mais vous pouvez toujours retrouver l’article que je lui avais consacré en cliquant sur ce lien

https://www.leblogdescoutheillas.com/?p=9313

Donc, je passai devant le Champo. Il devait être 11h40, ou 45 à la rigueur, et la vitrine annonçait pour 12h10 To be or not to be ! Ça devait bien faire quelques années, au moins cinq ou six, que je n’avais pas revu To be or not to be. Alors, un petit tour devant la vitrine de La Compagnie pour passer le temps et hop, au Champollion !

Dans la salle, nous devons être cinq ou six. Si je suis le plus âgé, ça ne doit pas être de beaucoup. Quelques publicités, quelques annonces : La Strada, Buffet froid, Milou en mai… que du beau monde. La salle s’éteint. Continuer la lecture de To be or not to be : what is the question ?

Les débuts de Proust et de Flaubert

C’est le programme minimum de l’été, alors, on rediffuse :

C’était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d’Hamilcar.

Avec le « Longtemps, je me suis couché de bonne heure » du petit Marcel, « C’était à Mégara… » est probablement l’incipit le plus connu de la littérature française. C’est celui du roman Salammbô de Gustave Flaubert.
Je ne vais pas disserter sur cette œuvre puissante et surtout pas tenter de la comparer à la Recherche du temps perdu. D’abord parce que ces deux romans sont incomparables, y compris entre eux. Ensuite parce que je ne suis carrément pas au niveau et, dans ces cas là, j’aime bien dire que je n’ai pas les outils.
Je voudrais simplement faire remarquer les différences qui existent pour moi entre ces deux magnifiques phrases d’entrée qui ne font d’ailleurs que refléter les différences fondamentales de nature entre les deux œuvres.
Avec l’incipit du petit Marcel, vous entrez dans son roman (on dirait aujourd’hui autofiction) par une petite porte, la fragile petite porte du fond du jardin de la maison de Combray, la délicate petite porte de la mémoire. La phrase est courte, simple et inattendue, surtout quand elle suit un titre aussi explicatif que « A la recherche du temps perdu ». Vous êtes tout de suite dans l’intimité du Narrateur qui, avec cette phrase d’introduction, commence à vous expliquer comment chaque soir il se couchait de bonne heure sans pouvoir s’endormir avant que sa mère ne vienne l’embrasser. Avec les trois mille pages qui suivent, vous saurez tout de lui.
Le grand Gustave ouvre Salammbô avec une phrase solennelle : « C’était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d’Hamilcar« . On est au cinéma, l’hymne de la Twentieth Century Fox vient Continuer la lecture de Les débuts de Proust et de Flaubert

Mythe et allégorie

C’est le programme minimum de l’été.

Alors, on rediffuse : 

Chacun sait ce que c’est qu’un mythe. Selon Wikipedia, Pic de la Mirandole virtuel, un mythe c’est …

… une construction imaginaire qui se veut explicative de phénomènes cosmiques ou sociaux et surtout fondatrice d’une pratique sociale en fonction des valeurs fondamentales d’une communauté à la recherche de sa cohésion.

Quand on prononce le mot « mythe » devant vous, vous sortez aussitôt votre Antigone, votre rocher de Sisyphe ou votre boite de Pandore. Et si par malheur un malappris vous somme de donner la signification du mythe, la plupart du temps, vous vous lancez dans une explication vaseuse et embarrassée comme quoi c’est la représentation de la révolte de la jeunesse contre l’autorité, l’illustration de la stupidité de l’existence ou l’avertissement du danger qu’il y a braver les interdits des dieux. Vous auriez pu dire tout aussi bien que Sisyphe symbolise la vanité des ambitions humaines, qu’Antigone est l’incarnation du devoir quoi qu’il en coute, et la Boite de Pandore, l’illustration du dicton selon lequel « ce que l’on ne se sait pas ne peut pas vous faire de mal ».
Vous auriez pu dire encore bien d’autres choses en somme, et avec un peu Continuer la lecture de Mythe et allégorie

Imagine

C’est le programme minimum de l’été.

Alors, on rediffuse : 

Institut Imagine, 24 boulevard du Montparnasse, site de l’hôpital Necker-Enfants malades.

Ca fait maintenant une vingtaine de minutes que je rode auprès du bâtiment en cherchant à  m’approcher de l’une de ses façades. La construction qui m’intrigue occupe une bonne longueur du côté pair du Boulevard du Montparnasse mais ne présente aucune entrée ni ouverture de ce côté. De plus, une grille empêche d’approcher la façade. Ça m’ennuie parce que j’ai repéré sur cet immeuble une chose étrange que je voudrais bien vérifier.

Cet immeuble imposant a été achevé il y a quelques mois. La longue et haute façade –peut-être  huit étages- est entièrement constituée de panneaux de verre. Certains sont gris et opaques et d’autres transparents. Sans doute pour égayer ce lugubre damier, la façade ne s’inscrit pas dans un seul plan, mais dans quatre plans d’inclinaisons différentes. Au milieu de ce quartier d’immeubles haussmannien et de constructions parisiennes plus anciennes, c’est du plus bel effet. Bon, mais des immeubles officiels lourdingues avec du verre en façade pour seule originalité, on commence à en avoir l’habitude.
Imagine 1
Je n’ai donc fait que Continuer la lecture de Imagine

 Le caporal épinglé

C’est le programme minimum de l’été.

Alors, on rediffuse :

« Jacques Perret était un homme contre, un homme du refus. Rien de ce qui était français ne lui était étranger. Folliculaire de la réaction, écrivain du transcourant « plume Sergent-Major », styliste hors-pair qui buvait avec soin afin d’éviter tout faux-pli dans le jugement, il eut la faiblesse de ne jamais dire non à l’aventure et au voyage. Il tenait la littérature pour un art d’agrément qui aurait pris tournure de gagne-pain. Il aimait Aymé et aussi Bloy, Blondin, Conrad, Dos Passos; il en tenait pour le duc d’Anjou et la dimension sacrificielle de la messe selon saint Pie V. J’avais été à sa rencontre à la Continuer la lecture de  Le caporal épinglé