Des écrivains vous répondent…
La première question qui vient à l’esprit quand on s’interroge sur un roman tel que cette Histoire de Dashiell Stiller est celle-ci : où son auteur se cache-t-il, dans quel personnage ?
Une analyse sommaire du roman pourrait mener à conclure que Stiller, c’est Coutheillas. Stiller est écrivain, Coutheillas voudrait l’être. Dashiell est encore jeune, Philippe pense qu’il l’est toujours… Ceux qui connaissent bien Coutheillas ont pu décliner ainsi les ressemblances avec le photographe américain, mais pour cela, il leur aura fallu patienter car, avant le dernier chapitre, le lecteur ne saura rien de Dashiell, sinon qu’il est tombé amoureux d’Isabelle par une douce fin d’après-midi à Saint-Germain des Prés.
Si légitime que soit ce désir pour l’amateur de romans de découvrir le déguisement de l’auteur, pour le romancier devant l’œuvre de son confrère, ce n’est qu’une recherche superficielle. En effet, il est constant que dans un roman, consciemment ou inconsciemment, l’auteur met de lui-même dans chacun de ses personnages. C’est en cela que je diffère, sans que cela amoindrisse en quoi que ce soit mon admiration pour lui, de Gustave Flaubert, mon frère ainé, quand il clame que Madame Bovary, c’est lui ! A supposer qu’il ait vraiment prononcé cette sentence, ce dont on peut raisonnablement douter, je pense qu’il faut comprendre que Madame Bovary, c’est aussi lui, car Charles aussi, c’est lui, Homais de même, Rodolphe sans doute. N’allez pas vous récrier en alléguant qu’Homais est un imbécile et que Flaubert ne se voyait certainement pas ainsi. Sur ce point, vous auriez raison, mais qui vous dit que Gustave n’a pas mis dans le pharmacien un peu de son côté petit-bourgeois, ce côté qu’il haïssait tant et qu’il tentait de dissimuler par une exubérance permanente ?
Qu’on me pardonne à présent de faire référence à mon propre travail mais, la question m’ayant été si souvent posée, je me dois d’y répondre enfin. Ma réponse n’a pas pour but que l’on me prenne comme exemple à suivre et elle n’est là que pour attester d’une réalité personnelle que l’on pourra généraliser à plaisir. Dans la Recherche, je suis bien évidement le Narrateur, mais ne suis-je pas également Saint-Loup, Charlus, la Duchesse de Guermantes, le Duc et pourquoi pas, Madame Verdurin ? Bien évidemment, et ceux que j’ai eu l’honneur et le plaisir de connaitre au cours de mon existence vous le confirmerons sans doute. Sans être nécessairement une confession, une œuvre romanesque est toujours pour son auteur une galerie dans laquelle il expose, à l’insu du lecteur, du moins le croit-il, différentes composantes de sa personnalité.
C’est ainsi que s’il est clair que, bien qu’il s’en défende, Coutheillas est dans Stiller, il est aussi dans Cambremer, dans Antoine, dans Marteau, dans Engen et même dans Isabelle.
À Combrais. 22 juin 1920
M.P., mémorialiste
Histoire de Dashiell Stiller
Paris 1935. Dashiell, jeune touriste Américain, prend une photographie de la terrasse d’un café du Boulevard St-Michel, le Cujas. Treize années plus tard, il est de retour à Paris pour rencontrer les huit personnages qui se trouvaient sur la photo. Il les fait parler sur leur vie, sur la façon dont ils ont vécu cette période troublée de la guerre, l’Occupation, la Résistance, la Collaboration, les Camps, la Libération… Mais pourquoi fait-il cela ? Pour écrire un roman ? Pour retrouver quelqu’un ? Pour expier un crime ? Pour retrouver sa propre histoire, l’histoire de Dashiell Stiller ?
En vente sur Amazon.fr…. Cliquer sur l’image pour parvenir au site de vente
Une galerie dans la quelle l’auteur s’expose ou un simple kaléidoscope? Dans Les disparus de la rue de Rennes, Ratinet c’est l’auteur? Cottard, c’est lui aussi? Et Lubherlu? Et le journaliste Renaud Dely, cela se pourrait? Et bien sûr la machiavélique Anne Hidalgo, elle encore? On s’y perd!