Les tribulations d’un muséomane en automne

 ou

Ma théorie du paratonnerre

par Lorenzo dell’Acqua

Hier, ce fut une journée paratonnerre. Paratonnerre est une expression de Max pour qualifier l’accumulation de pépins de santé chez une même victime qui évite à d’autres d’avoir ces mêmes pépins selon la théorie des vases communicants. Vous avez deviné que mon ami Max est plutôt un littéraire. La mienne, aussi discutable et farfelue que la sienne, concerne les emmerdements.
Nous sommes donc partis ce samedi matin ma femme et moi avec pour objectif l’exposition Condo au MAM. Ce peintre américain contemporain dont j’ignorais l’existence avent ma première visite est dans la mouvance Basquiat mais à mon avis plus intéressant car plus varié. Cela dit, même si j’en avais les moyens, je n’en mettrai pas dans mon salon… D’abord, arrivés dans la rue, il pleuvait et nous n’avions pas pris de parapluie (1). Avec l’âge, je ne supporte plus d’avoir la tête mouillée et surtout mon abondante chevelure. Le métro ligne 6 n’a pas posé de problèmes : il n’y avait pas grand monde et nous étions assis. Un peu de marche ne nous effrayant pas (trop), nous anticipons et descendons à Trocadéro pour rejoindre ensuite le musée à pied. La pluie a cessé. Passage obligatoire dans le sas de sécurité où il faut non pas se déshabiller mais vider nos poches des clés, appareils photos, smart phones, etc. Quelques minutes dans un sens et puis dans l’autre pour découvrir qu’exceptionnellement aujourd’hui, samedi 29 novembre, l’exposition Condo est fermée sans la moindre explication (2). Désolant ! Bon, où aller ? Anne n’ayant plus de thé parfumé à je ne sais pas quoi, nous optons pour le musée Guimet qui propose une exposition de céramiques et Anne adore la céramique. Nous y voilà. Il n’y a plus son thé favori (3) et l’exposition de céramiques est virtuelle (4) … On se balade un peu mais le peu de visiteurs s’est concentré au troisième étage à l’exposition sur les Manga. Je ne m’en tire pas trop mal avec le peu de matériel à ma disposition. Départ ensuite en bus ligne 63 pour rejoindre la station Buci sur le boulevard Saint Germain où nous avons réservé dans au restaurant italien délicieux, Il Vicino, rue Mazarine à 12h30. La porte avant du bus ne fonctionne pas malgré les efforts à répétition du conducteur que ce pépin énerve beaucoup vu le nombre de coups de pied assourdissants qu’il assène à ladite porte (5). Le trajet prend donc deux fois plus de temps que prévu mais nous arriverons tout de même juste à l’heure. La proposition du jour ne nous convenant pas, nous choisissons des plats à la carte avec des conséquences financières prévisibles surtout pour les rougets. Le vrai problème qui nous arrive n’a pas de rapport avec la nourriture toujours excellente mais avec le brouhaha aussi assourdissant que dans le bus mais permanent. On ne s’entend plus Anne et moi (6) alors que nous avions le souvenir d’une salle calme et silencieuse… Retour sans dessert ni café par le métro ligne 6 avec les désagréments olfactifs habituels mais, quand on a été proctologue par le passé, on sature très vite ses récepteurs et ça va à peu près pour moi, mais un peu moins pour Anne qui n’était que gynécologue et donc moins exposée à ces nuisances

Ma théorie est que les emmerdements surviennent toujours le même jour et toujours par trois ce qui me permet de rester tranquille le reste du mois avant qu’une nouvelle journée paratonnerre ne survienne inévitablement. Néanmoins, la journée du samedi 29 novembre a été particulièrement favorable car j’ai connu non pas trois emmerdements mais six. J’ose donc espérer que je vais rester sans le moindre emmerdement pendant deux fois plus de temps que d’habitude.

7 réflexions sur « Les tribulations d’un muséomane en automne »

  1. la meilleure preuve que ma proposition concernant Max, le jardinier de ma belle mère, est fausse, c’est que je connais un ingénieur scientifique qui est aussi un littéraire mais sa modestie m’empêche de vous donner son nom
    PS : vous comprenez donc pourquoi mon corollaire l’a tellement irrité.

  2. Edward A.Murphy ­(1918-1990— ingénieur en aérospatiale américain), édicteur de la célèbre loi qui porte son nom, s’est toujours vigoureusement opposé à la prétendue théorie dite « du paratonnerre »; Il suffit pour s’en convaincre de prendre connaissance de quelques formulations de sa loi ainsi que de son premier corolaire.

    Deuxième formulation :
    
Tout ce qui est susceptible de mal tourner tournera nécessairement mal.

    Dixième formulation:
    
Murphy était un optimiste

    Premier corolaire :
    La quantité d’emmerdements tombant sur un individu est une variable indépendante de la quantité d’emmerdement tombant sur les autres individus

  3. « la théorie de Max n’est pas valable scientifiquement, donc Max est un littéraire. »
    Le « donc » est en trop, car cela reste aussi à prouver : ce n’est pas parce qu’on n’est pas scientifique qu’on est littéraire. Mais moi, Max, connais pas. Alors tout est possible.

  4. Je voulais dire exactement la même chose : la théorie de Max n’est pas valable scientifiquement, donc Max est un littéraire.

  5. « Hier, ce fut une journée paratonnerre. Paratonnerre est une expression de Max pour qualifier l’accumulation de pépins de santé chez une même victime qui évite à d’autres d’avoir ces mêmes pépins selon la théorie des vases communicants. Vous avez deviné que mon ami Max est plutôt un littéraire »

    Selon Lorenzo, Max serait donc plutôt un littéraire. C’est possible, mais il n’est certainement pas un scientifique. Par cette remarque, je ne vise pas sa théorie du paratonnerre — qui d’ailleurs reste à valider — mais l’analogie qu’il en fait avec la théorie des vases communicants. Remarquons d’abord que les vases communicants ne sont pas une théorie mais d’abord un principe avant de devenir éventuellement une métaphore comme c’est le cas ici.
    Ce principe, même si on le prend métaphoriquement, ne colle pas du tout avec le coup du paratonnerre.
    En effet, prenons tout d’abord deux vases communicants vides. Versons de l’eau dans l’un deux et, Ô miracolo, on verra bientôt l’eau se précipiter vers l’autre vase de telle sorte que, at the end of the day, le niveau de l’eau soit le même dans chaque vase.
    Prenons maintenant deux individus normalement constitués que nous appellerons A et Cristobule. Par hypothèse, A et Cristobule sont reliés entre eux comme le sont deux vases communicants. Ils reçoivent tous les deux sensiblement la même quantité quotidienne d’emmerdements et sont donc, sur ce point, au même niveau. Versons maintenant une quantité supplémentaire d’emmerdements sur la tête de A. Selon la théorie du paratonnerre telle qu’énoncée par Max, ceci devait réduire d’autant la quantité d’emmerdements à recevoir par Cristobule. Or, il n’en est rien puisque le principe des vases communicants va faire tout ce qu’il peut pour mettre les deux gluges au même niveau d’emmerdements. Et, par principe, il va y arriver, le bougre. On voit donc bien que l’analogie du principe des vases communicants ne peut être valablement appliquée à la théorie du paratonnerre.
    Et c’est ainsi que l’on voit que Max n’est pas un scientifique et qu’Allah est grand.

  6. Comme le disait très élégamment le très ordinaire Jacques Chirac :
    « Les emmerdes, ça vole en escadrille »

  7. Pas de parapluie, il pleut, l’exposition est fermée, il n’y a plus de thé parfumé, l’exposition n’est que virtuelle, la porte du bus est cassée et le restaurant est bruyant…
    Je ne sais pas pourquoi mais cette histoire me fait penser à « Une journée d’YIvan Denissovitch »

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