Archives par mot-clé : Philippe

Harris, Fallon, Colbert & Co

Comme Kamala Harris pendant sa campagne, comme les comiques de Saturday Night Live, comme les Fallon, les Colbert, les Springer et les Kimmel, les meilleurs d’entre nous ont aimé rire de l’ignorance, de la vulgarité, des bourdes, âneries et gros mensonges proférés par Donald Trump. Comme ces politiques et journalistes américains, tous gens bien élevés, policés, cultivés, nous aimions bien en sourire entre nous, en bonne compagnie. Nous aimions bien regarder de haut la brute épaisse et définitive  se débattre dans ses phrases mal foutues, ses incohérences, ses scandales sexuels et ses malheurs financiers à répétition. 

Eh bien, regardez un peu où il en est, le clown orange et Continuer la lecture de Harris, Fallon, Colbert & Co

Go West (76)

(…) — Tu veux pas te baisser, Brenda, parce que là, tu me caches la télé… Non, dans l’autre sens, Brenda, assied-toi dans l’autre sens, sans ça tu verras pas le film… Pourquoi tu regardes pas le film ?  Tourne-toi, je te dis, tourne-toi…. Qu’est-ce que tu fais, Brenda ? Mais qu’est-ce que tu fais ? Eh ! Mansi ! Qu’est-ce qu’elle fait, Brenda ? Brenda ? Ah bon… Oh ! Brenda…
« C’est marrant, je me sens de mieux en mieux… »
C’est à ce moment que j’ai dû m’évanouir.

Ce qui s’est passé après, pendant que « La Chose » dévastait la station scientifique jusqu’à sa cuisson finale, est resté très vague dans mon souvenir. Le coup des gouttes de mercure qui remontaient au bloc de glace, ça, j’en suis sûr. Mais pour le reste… Je crois bien que je me suis réveillé deux ou trois fois. Je me vois me lever pour aller chercher une bière ou de quoi manger dans le réfrigérateur. A un moment, j’ai dû tomber du canapé pendant que je dormais. J’ai du mal à me relever parce que je m’emberlificote dans mon peignoir. Bob est allongé sur le canapé, étendu sur le dos, les mains derrière la nuque. La tête tournée sur le côté, il regarde vaguement la télévision en fumant une cigarette. La grande bringue est allongée sur lui. Elle semble dormir. Bob me voit contourner le divan et m’adresse un petit signe amical.
— Ça va comme tu veux, man ?
Je veux lui répondre, mais je suis incapable d’émettre le moindre son. Ma langue est collée à mon palais. Alors je fais le geste que j’ai vu faire tant de fois depuis un mois, le signe classique comme quoi tout va bien : le pouce et l’index arrondis pour former la lettre O. Je tourne un peu en rond dans la pièce avant de trouver mes repères. Je finis par arriver devant le réfrigérateur. J’ouvre la lourde porte et reste planté là, les yeux fixés sur la petite lumière qui vient de s’allumer. Pourquoi je suis là à contempler les rayonnages de verre chargés de bouteilles anonymes et de cartons ramollis Continuer la lecture de Go West (76)

Trump ? J’ai dit Trump ? Je vous assure, mon cher cousin, que vous avez dit Trump !

Pour m’amuser un peu mais principalement  à titre  d’auto-célébration, j’ai réuni ici la plupart des textes que j’avais écrit sur Trump en six ans, entre décembre 2016 et novembre 2022. 

8 NOVEMBRE 2016 : TRUMP ELU PRESIDENT DES USA

 21/12/2016

Une vue de l’Amérique 

 Je suis un enfant de la guerre.

Et nous autres, enfants de la guerre, nous avons été nourris, au propre comme au figuré, au lait concentré sucré de l’Amérique. Nous avons grandi en force et raison grâce aux Candy Bars Hershey’s pour la bonne énergie, au chewing-gums Wrigley’s pour la mâchoire carrée et au Coca Cola pour la soif d’aujourd’hui. Mais aussi grâce à John Steinbeck et à Franck Capra pour la justice sociale, à Gary Cooper et John Ford pour le courage, à Howard Hawks et John Wayne pour le patriotisme, Fred Astair et Ginger Rogers pour l’élégance, Stanley Donen et Katharine Hepburn pour la sophistication… Nous avons grandi en regardant l’Amérique.

Et puis, il y a eu Kennedy à Dallas, Johnson à Washington, les boys au Viêt-Nam, Nixon au Watergate… Mais c’était des accidents, des erreurs, des enchainements, des fatalités. Rien de cela ne changeait l’Amérique, qui survivait, se redressait, faisait justice. Il y aurait toujours Continuer la lecture de Trump ? J’ai dit Trump ? Je vous assure, mon cher cousin, que vous avez dit Trump !

Trump sous double influence

C’était visible depuis longtemps. C’est présent flagrant : le nouveau Président des États Unis est sous une double influence, influence étant un mot de plus en plus faible pour pouvoir caractériser les rapports de D.T. avec ses deux influenceurs.

Le premier, bien sûr, c’est Poutine. Depuis qu’il est entré en politique, D.T. n’a pas caché son admiration pour le dictateur de toutes les Russies. Et depuis qu’il a atteint aux fonctions suprêmes, on voit bien qu’il adopte les unes après les autres les idées de V.P. et par conséquent ses objectifs : détruire l’Alliance Atlantique, diviser l’Europe, et favoriser ou laisser faire la russification des pays d’Europe de l’est, en attendant plus et mieux.
Pourquoi ce soi-disant (soi-disant : qui se dit soi-même) patriote , qui s’est fait réformer pour pieds-plats ou presque, ce prétendu homme du peuple, fils de millionnaire, se révèle-t-il inféodé à V.T. ?
Avec D.T., une seule réponse explique tout : l’argent.
En juillet 1987, Trump Continuer la lecture de Trump sous double influence

C’est du Shakespeare, du Jarry ou du Brecht ?

Quel Shakespeare moderne, quel Jarry contemporain, quel Brecht actuel nous donnera un jour un MacTrump, un Donald III, un Ubu Président, un Arturo Trump ?

Quel courageux biographe racontera la résistible ascension de ce vrai fils-à-papa, ce faux milliardaire, ce businessman véreux, cet agent russe, cette brute épaisse, cet égotiste forcené, ce menteur invétéré ?

Quel auteur audacieux écrira le drame de ce pays malade de la peste populiste ?

Quel dramaturge héroïque montrera la tragédie de cette démocratie mourant de s’être donnée deux fois à un autocrate amoral et stupide ?

Quel Cicéron impatient dressera la liste des mensonges, Continuer la lecture de C’est du Shakespeare, du Jarry ou du Brecht ?

Go West ! (75)

(…) et puis cette chaleur humide, cette ambiance confinée, ce vase clos, étanche, presque insonorisé, qui donnait l’impression apaisante et libératrice que rien de l’extérieur ne pouvait vous y atteindre, que rien de ce qui pouvait s’y passer ne pouvait avoir de conséquence ; enfin l’alcool et les mets épicés et la chaleur intérieure qu’ils prodiguaient, dispensatrice de confiance. J’étais différent et, pour le moment au moins, j’étais prêt à tout, ou presque.

Tout le monde faisait face au poste de télévision. Bob et moi nous étions assis d’autorité sur le canapé et les filles s’étaient installées par terre, adossées au siège, Fran entre les jambes de Bob, Mansi entre les miennes et Brenda entre Fran et Mansi.

Sur l’écran gris bleu, confiné dans son local laissé comme il se doit sous la surveillance d’un bidasse somnolent, le bloc de glace dans lequel la « Chose d’un autre monde » était enchâssée fondait goutte après goutte sur fond de musique angoissante. Tout le monde et Brenda se doutaient qu’une fois libérée de sa gangue translucide, la silhouette humanoïde et colossale de la « Chose » allait causer bien des soucis à la petite équipe militaro-scientifique qui l’avait extraite de la banquise. De trois quarts arrière, je regardais la grande bringue. Tendue, légèrement penchée en avant, entièrement immergée dans l’action du film, elle ne cessait de mordre ses ongles artificiels que pour tirer sur son joint ou pour boire une lampée de vodka. De temps en temps, elle émettait une plainte du genre « Aïe, aïe, aïe ! Mais y voit pas que ça fond, l’autre andouille ! ». Alors Bob et moi tentions une plaisanterie, une remarque ironique sur la naïveté du suspense. Fran ne disait rien. La nuque posée sur l’aine de Bob, les yeux au ciel, elle regardait monter vers le plafond les volutes de fumée qu’elle laissait s’échapper de sa bouche. Moi, je commençais à m’habituer à l’âpreté du joint. Après avoir toussé deux ou trois fois en faisant semblant d’avoir avalé ma bière de travers, je m’étais essuyé les yeux, je m’étais enfoncé en peu plus dans le canapé, j’avais posé mes mains autour du cou de Mansi et, de mes deux pouces, j’avais commencé à lui masser la nuque, doucement, presque distraitement, à mille milles marins au nord de sa petite tache de naissance en forme d’Australie. Je me sentais drôlement bien. Continuer la lecture de Go West ! (75)

Trois en un

Tibère : Un tyran renfermé, vindicatif et rancunier. Il encourage la dénonciation et récompense les délateurs avec des faveurs de toutes sortes. Les dernières années du gouvernement de Tibère sont des années noires où on pouvait être jugé pour avoir simplement parlé en mauvais termes de l’empereur.

Caligula: Un empereur fou, délaissant et assassinant tous ceux qui ont soutenu son ascension. Il hait le Sénat.  Pour l’humilier, il lui fait adorer son cheval(1). Il a un comportement instable, et un goût pour la démesure. Il promit qu’il traverserait la baie de Naples à cheval(2), mais en fait il traversa une toute petite baie au Nord-Ouest de Naples sur un pont de bateaux.

Néron : Un empereur paranoïaque, mégalomane, cruel et extravagant qui vise au pouvoir absolu. Il est persuadé qu’il est un génie de la poésie (3) . Il organise des J.O. où il remporte toutes les médailles. Il tue sa mère (entre autres membres de la famille) et met le feu à Rome. Il se suicide pour ne pas subir un coup d’état. Agonisant, il prononce Continuer la lecture de Trois en un

Le bénéfice du doute ? 

Depuis l’arrivée au pouvoir suprême et total de Donald Trump, je m’étonne de rencontrer encore autant de personnes qui disent en substance : « Trump ? Faut voir… Il faut lui laisser sa chance… tout de son premier mandat n’a pas été si mauvais…il a fait de bonnes choses… il a de bonnes idées…  il faut lui accorder le bénéfice du doute… »

Le bénéfice du doute ? 

Absorber le Canada…
c’est tellement proche et puis il n’y pas grand monde. 

Devenir propriétaire de la bande de Gaza…
pour en faire la Riviera du moyen-orient.

Revenir aux pailles en plastique…
parce que celles qui sont en papier se cassent et explosent. Continuer la lecture de Le bénéfice du doute ? 

Le Diner de Promo

Il y a bien longtemps, à l’occasion de l’anniversaire d’un ami, j’avais écrit un bref discours dont le sujet était la vieillesse. A cette époque lointaine, la vieillesse, je n’y croyais pas, et j’avais bâti mon texte plutôt gaiment autour de cette idée : la vieillesse, ça n’existe pas.
Une douzaine d’années a passé et, aujourd’hui, je découvre que je ne pourrais plus écrire quelque chose d’aussi stupide. Et voici pourquoi…

Un jour, c’était il y a quelques années déjà, j’ai participé à un diner de Promotion (je ne parle pas ici d’une action commerciale mais d’une réunion d’anciens élèves). Ce repas avait lieu au premier étage d’un restaurant qui faisait face au Centre Pompidou (Je place ici cette précision seulement pour pouvoir vous dire qu’il ne faut pas y aller ; dans ce restaurant, pas au musée). J’étais arrivé parmi les derniers Continuer la lecture de Le Diner de Promo

Go West ! (73)

(…) Mais au stade où nous en sommes à présent, à l’heure où je me prépare à reprendre mon récit, c’est une tout autre affaire car, en réalité, cette deuxième nuit a constitué le point culminant de mon séjour chez Mansi et, pour la décrire, les stratagèmes ne suffiront pas.
— Jay ! Jay !
Jay ?

— Jay !… Jay !
J’ai failli oublier qu’ici, c’était mon nom, Jay. Jay, pour Jérôme, pratiquement imprononçable en anglais. Jérôme !  Quelle drôle d’idée quand même !
— Jay ?
C’est Mansi qui m’appelle pour que je l’aide à préparer la table et les chaises où nous allons diner tout à l’heure avec ses amis.

Ses amis ? Arrivés avant huit heures, au coucher du soleil. Partis le lendemain. Peut-être vers midi. Enfin, je crois. En tout cas, à deux heures, ils n’étaient plus là. Ça, j’en suis à peu près sûr. Quant à ce qui s’était passé entre huit heures du soir et deux heures de l’après-midi le lendemain… Pas facile à raconter. D’abord parce que Continuer la lecture de Go West ! (73)