(…) Une autre fois, je plane ; littéralement, je plane ; comme un vautour ; je suis un vautour ; je vole lentement en larges cercles au-dessus de la table basse ; ma vision de vautour est perçante et je distingue parfaitement les détails de la pièce, la table, les chaises, les tapis, le poste de télévision et, dispersés au milieu du désordre, des corps à moitié nus, enchevêtrés, emmêlés sur le canapé, sur la table, sur le sol, des corps qui remuent lentement comme un nœud de serpents et parmi lesquels, je le reconnais au peignoir jaune qui l’embarrasse, il y a le mien.
Et puis, j’ai eu une vision. Insérée quelque part au milieu des images incohérentes et irrationnelles qui me sont restées en mémoire et de celles qui n’ont pas laissé de trace, j’ai eu une vision très précise. Une vision… je n’aime pas cette idée. Je n’avais pas cru un instant à la vision de Mansi. J’avais mis son récit sur le compte d’une idéalisation ou plutôt d’une rationalisation de son coup de foudre pour Bo. Que l’on puisse avoir une prémonition aussi précise, une vision aussi nette d’un instant à venir était en pleine contradiction avec mes certitudes rationnelles. S’il était possible à qui que ce soit d’avoir une vision de l’avenir, le sien ou celui d’un autre, cela voudrait dire que le futur existe déjà quelque part et qu’il est possible d’y avoir accès, et cela, je me refuse à y croire.
Malgré tout, malgré Continuer la lecture de Go West ! (79)