Archives de catégorie : Thème imposé

Carnet d’Écriture (2) : pas de méthode ?

 » (…) Une fois que tout est prêt, généralement sous forme de cases dans un tableur Excel, je n’ai plus qu’à laisser tourner la mécanique de l’habitude pour que l’action avance. »
Personnellement, je considère Simenon comme un excellent, sinon un grand écrivain et je ne voudrais pas que vous preniez cet exemple, qui d’ailleurs ne prend pour cible que ses romans policiers, pour un dénigrement de toute son œuvre, car chez lui, ce n’est pas vraiment l’intrigue qui compte, mais l’ambiance et le style, tout le reste n’étant que prétexte.

À la même question, Raymond Chandler, le plus grand, le plus élégant, le plus nonchalant des auteurs de série noire, aurait répondu : « Prenez le quartier de Westwood à L.A., plantez-y un détective privé un peu alcoolique, un peu fauché, souvent à la limite de la légalité mais intransigeant sur ses règles de morale personnelles, fidèle en amitié au-delà du raisonnable. Donnez-lui pour client un tycoon du cinéma amoureux d’une étoile du strip, ou pour cliente une jeune héritière ayant fait une grosse bêtise. Quand vous aurez tout ça, imaginez n’importe quel début d’intrigue, prenez un whisky on the rocks et laissez faire votre vieille Remington, celle dont la touche P s’est fait la belle depuis un lustre, car ‘’l’histoire on s’en fout, c’est le style qui compte.’’ »

Si j’étais Patrick Modiano, ma réponse serait « Si vous Continuer la lecture de Carnet d’Écriture (2) : pas de méthode ?

Carnet d’Écriture (1) : Cher auteur

— Cher auteur,
Vous avez écrit des milliers de pages, des centaines de chroniques, des dizaines de nouvelles, une demi-douzaine de romans dont trois ont été achevés. L’ensemble de votre œuvre dénote une diversité d’inspiration, de genres et de styles rarement rencontrée, passant sans dommage de la comédie au drame, de la critique de la société à l’analyse du comportement individuel, de la réalité à la fiction, du romantisme le plus exacerbée au réalisme le plus cru sans oublier vos passages par l’absurde, de la relation du passé à la prévision du futur, j’en passe, et non pas ‘’des meilleurs’’, comme le disent trop souvent les journalistes adeptes des syntagmes figés et maladroits, mais j’en passe et des tout aussi bons.
Alors, cher auteur, pourriez-vous expliquer à votre lectorat subjugué comment vous viennent toutes les idées qui sous-tendent vos textes, comment vous les couchez sur le papier, comment vous les faites éditer, et toute cette sorte de choses mystérieuses que nous Continuer la lecture de Carnet d’Écriture (1) : Cher auteur

Un truc pour écrire

Rediffusion

Ne vous y trompez pas, ce que je vous propose, ce n’est pas un stylo, mais une méthode. C’est bien mieux et c’est moins cher.

 Ecrire n’est pas facile en général, surtout quand on est équipé d’un peu de sens critique, car, la plupart du temps, il vous conseillera de passer votre production au broyeur. Mais le plus souvent, c’est une méthode qui manque au débutant et la lecture de ce qui suit pourrait lui faire gagner un peu de temps. Celle que je préconise est celle du « Je me souviens« , éprouvée dès 1970 par Joe Brainard dans son recueil « I remember« , puis par Georges Perec en 1978 avec son « Je me souviens ».  Voici ce que j’en disais il y a quelques années :

Le Je me souviens est exercice d’écriture courant. Il consiste à dresser une suite de bribes de souvenirs dont chacune commence par les mots Je me souviens. Ces bribes reflètent des souvenirs personnels propres à leur auteur en même temps qu’elles évoquent une époque. C’est un exercice que je recommande chaudement à ceux que titille une vague envie d’écrire. Quitte à raconter quelque chose, autant commencer par ce qu’on croit connaitre : sa vie. Voici la méthode : Continuer la lecture de Un truc pour écrire

De la démocratie… 

Attention, ça va faire mal...
La démocratie est la dictature de l’ignorance.
On ne doit pas élever au rang de citoyens tous les individus dont l’État a cependant nécessairement besoin.
La dictature, c’est ferme ta gueule. La démocratie, c’est cause toujours.
A la nomination d’une petite minorité corrompue, la démocratie substitue l’élection par une masse incompétente.
Tout le rêve de la démocratie est d’élever le peuple prolétaire au niveau de la bêtise du bourgeois.
Une démocratie n’est rien de plus que la loi de la foule, suivant laquelle 51% des gens peuvent confisquer les droits des 49 autres.
Le meilleur argument contre la démocratie est un entretien de cinq minutes avec un électeur moyen.
La démocratie, c’est le pouvoir pour les poux de manger les lions.
La démocratie est le pire des régimes, à l’exception de tous les autres. 

Vous serez peut-être surpris que je reproduise dans le JdC cette suite d’aphorismes négatifs sur la démocratie. Pourtant, ils ont tous été prononcés par des hommes honorables. Parmi eux, pas de Néron, pas de dictateur, pas d’autocrate, pas de ploutocrate ni même d’oligarque. À part les deux premiers, dont vous aurez certainement deviné de qui ils étaient (ben voyons !), et qui expriment sans détour la véritable pensée de leur auteur, les autres doivent être considérés comme des traits d’esprit, des boutades ou des critiques ironiques destinées de façon évidente à mettre en valeur la notion même de démocratie.

Ces jours-ci, on n’en fait plus grand cas, de la démocratie. Elle a disparu ou est en voie de disparition effective dans des pays qui, autrefois, en ont été les initiateurs, les adeptes et les prosélytes.
Chez nous, elle existe encore et c’est une des seules choses qui nous restent, après que la puissance et la santé économique aient disparus. Elle existe encore, mais son socle de supporters devient chaque jour plus étroit, en particulier, et c’est sans doute le plus grave, chez les personnes les plus jeunes. On en trouvera pour preuve tous les sondages que l’on veut, assortis de toutes les justifications du type  « on a tout essayé sauf… », la « nécessité d’un bon coup de balai », le « désir d’homme fort » et autres rengaines populistes du type « y-a-qu’à – faut-qu’on ».

Il ne faut pas jouer avec la démocratie ni rigoler avec l’extrémisme, et surtout ne pas vouloir l’essayer, car si vous l’essayez, vous verrez, vous n’en reviendrez pas.

En attendant, si vous voulez savoir quels sont les auteurs des aphorismes ci-dessus, il va vous falloir ouvrir le commentaire ci-dessous.

La République de Weimar

Je n’ai pas une grande confiance en Franck Ferrand en tant qu’historien. Ma méfiance est née le jour où j’ai lu un livre qu’un ami qui connaissait mon gout pour l’Iliade m’avait offert. Ce bouquin complotiste dont j’ai vite oublié et l’auteur et le titre était entièrement consacré  à démontrer que la ville de Troie ne se trouvait pas en Turquie, mais quelque part en Angleterre ou en Écosse, je ne sais plus… Il se trouve que Franck Ferrand avait préfacé et promu ce livre ridicule, d’où ma méfiance. D’ailleurs,  je ne connaissais pas F.F. avant de me mettre à écouter Radio Classique comme seule et unique radio d’information. Leur matinale, de 7 heures à 9 heures me convient très bien (mis à part l’invitation du lundi de Luc Ferry). Or, chaque jour, entre 9h et 9h30, Franck Ferrand reprend l’antenne pour raconter un événement historique. Historiquement exacte ou complaisamment amélioré — ça m’est égal — l’évènement est agréablement raconté, parfois instructif, souvent surprenant. 

Le sujet de ce matin du 20 septembre 2025 était la République de Weimar, cette république Continuer la lecture de La République de Weimar

L’Apple Intelligence et la Madeleine

J’ai un nouvel iPad. À bord, il y a maintenant une sorte d’Intelligence Artificielle embarquée. Elle s’appelle Apple Intelligence. Quand on l’utilise, elle travaille en interne sans échanger avec de mystérieux centres californiens ou chinois. De ce fait, bien sûr, elle n’a pas les capacités de la vraie A.I., celle qui fait peur, qui se trompe, et bouffe des milliards de kilowatts-heures. Pourtant, elle peut rendre des services, notamment en matière d’écriture. J’ai expérimenté ses possibilités pour la première fois en lui soumettant le passage le plus célèbre de À la Recherche du Temps Perdu, celui de  la madeleine. Lisez d’abord le passage tel que l’a écrit Marcel Proust. C’est long, mais admirable et facile à lire. 

 (Notre passé) est caché hors de son domaine et de sa portée, en quelque objet matériel (en la sensation que nous donnerait cet objet matériel), que nous ne soupçonnons pas. Cet objet, il dépend du hasard que nous le rencontrions avant de mourir, ou que nous ne le rencontrions pas.

Il y avait déjà bien des années que, de Combray, Continuer la lecture de L’Apple Intelligence et la Madeleine

Le Mari, la Femme et l’Académie

L’Académie Française a été fondée en 1634. Le Cardinal de Richelieu avait défini sa mission :  travailler à « donner des règles certaines à notre langue et à la rendre pure, éloquente et capable de traiter les arts et les sciences » et, notamment, élaborer un Dictionnaire de référence.

Une application du dictionnaire de l’Académie française est désormais disponible sur Apple Store et autres marchands de rêves. Elle permet en particulier pour chaque mot de connaitre la définition qu’en ont donné les différentes éditions du dictionnaire. La 1ère édition date de 1694 et l’édition actuelle, la 9ème, a été publiée en 2024

Si, pour un mot donné, on consulte les éditions successives, on peut apprécier l’évolution du sens du mot à travers les époques. Je l’ai fait pour deux mots essentiels de notre langue : HOMME et FEMME.
Je me suis limité à la comparaison des définitions premières que je reproduis ci-dessous

1ème édition – 1694
HOMME : Animal raisonnable. En ce sens il comprend toute l’espèce humaine, et se dit de tous les deux sexes.
FEMME : La femelle de l’homme

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Offres d’emploi

C’est le programme minimum de l’été.

Alors, on rediffuse :

Le Ministère de l’Administration des Ministères et de la Procrastination de la Réforme de l’Administration recherche plus ou moins activement à pourvoir les postes suivants:

revendeur de trous – vérifieur de certification – certifieur de vérifications – videur intersidéral – remplisseur de boîtes de nuit – entraineur de chaises de jardin – calculateur de π – démonteur d’océans – remonteur de moral – couvreur d’opprobre – corneur de pages – purificateur de cieux – décolleur d’avions – baratineur de beurre – débordeur de vases – avaleur de sable – accompagnateur de téléphérique – écraseur de champignon – intégrateur de zéro à l’infini et au-delà – additionneur de zéros – censeur des aiguilles d’une montre Continuer la lecture de Offres d’emploi

Je

C’est le programme minimum de l’été.

Alors, on rediffuse : 

Avertissement
Le titre que vous venez de lire, « Je », annonce un article auto satisfait, égocentrique, suffisant et pas nécessaire. De plus, il ne va probablement pas vous intéresser. Pourtant, je vais quand même vous dire ce que je n’aime pas, enfin pas tout, mais une partie. Si, ensuite, vous acceptez d’aller un peu plus loin dans votre lecture, je vous dirai aussi quelques unes des choses que j’aime.
Maintenant, vous êtes avertis.

Second avertissement

Ce texte a été publié pour la première fois le 31/08/2014. Vous pensez bien qu’en 11 ans, la liste des choses et des gens que je n’aime pas s’est allongée sensiblement, mais pour cette rediffusion, j’ai préféré la version première, juste pour montrer combien mes désamours étaient futiles à l’époque quand on les compare à mes détestations  d’aujourd’hui.

Donc, il y a 11 ans, je n’aimais pas :
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