Archives par mot-clé : Proust

Marcel et Sacha

temps de lecture : 2 minutes 

Marcel est né en 1871 et Proust est mort en 1922.
De son côté, Sacha est né en 1885 et Guitry est mort en 1957.

Si vous prenez votre calculette, parce que le calcul mental, ce n’est pas votre truc, vous constaterez que :

  • Marcel avait 14 ans à la naissance de Sacha
  • Sacha avait 27 ans quand parurent dans Le Figaro les premiers chapitres de Du côté de chez Swann
  • Sacha avait 34 ans quand Marcel a attrapé le Goncourt avec les Jeunes filles en fleurs.
  • Et 37 quand il en est mort.

Vous savez certainement que Sacha était le fils de Lucien, lui-même considéré comme le plus grand acteur de son époque, égal masculin de Sarah Bernhardt, qui fut l’une de ses nombreuses maîtresses ( on l’appelait Divan le Terrible).
Par son père, Sacha rencontra très jeune tout ce qui comptait dans le monde parisien des arts de cette époque, monde que fréquenta également beaucoup le petit Marcel.
Vous savez, bien sûr, qu’entre 1902, date de son premier opéra-bouffe, et 1922, année de la mort de Proust, Sacha écrivit et fit jouer ou joua lui-même plus de trente pièces de théâtre.

Pendant des années, ces deux hommes vécurent au même moment dans la même ville. Ils consacrèrent tous deux Continuer la lecture de Marcel et Sacha

L’édifice immense des souvenirs minuscules

temps de lecture : 2 minutes 

Dans mon Journal de campagne du 2 avril 2020, en plein confinement, je dissertais sur l’intérêt très relatif pour les lecteurs du Journal des Coutheillas de remplir ses colonnes avec d’anodins souvenirs personnels. J’étais plutôt sceptique et j’écrivais :

« C’est alors que j’ai vraiment compris la sentence du petit Marcel que je citais l’autre jour :
« Certes, on peut prolonger les spectacles de la mémoire volontaire, qui n’engage pas plus de forces de nous-même que feuilleter un livre d’images. »
A moins de posséder le don littéraire de transformer un tel récit en un brillant exercice de description à la Flaubert, ou d’en faire un petit morceau d’humour à la Jerome K.Jerome, quel intérêt ces petites histoires pourraient-elles bien avoir pour vous ? À peu près le même qu’une séance de projection des photos de mes vacances à Continuer la lecture de L’édifice immense des souvenirs minuscules

Cruel épilogue

temps de lecture : 3 minutes pour Proust, 2 minutes pour moi

 Morceau choisi

 Cruel épilogue

 On ne connait jamais vraiment l’âge du narrateur d’À la recherche du temps perdu. Marcel Proust reste toujours très vague sur ce point. On a d’ailleurs des raisons de penser qu’il ne le connait pas lui-même : dans le Temps retrouvé, quand, lors d’une soirée chez le Prince de Guermantes, le narrateur  découvre les ravages du temps chez tous les personnages qu’il a connus autrefois, une jeune femme lui propose d’aller diner avec elle au restaurant. Il répond : « Si vous ne trouvez pas compromettant de venir diner seule avec un jeune homme… » alors qu’il a vieilli tout comme les autres. (Ceci prouve,   Continuer la lecture de Cruel épilogue

Les personnages de roman mènent-ils leur vie ?

temps de lecture : 3 minutes 

C’est une coquetterie commune à beaucoup d’écrivains de fiction : ils déclarent volontiers qu’au bout de quelques chapitres, les personnages qu’ils ont créés prennent leur indépendance et se mettent à vivre leur vie propre.
Pour un esprit rationaliste comme le mien, c’est bien évidemment une blague et Charles Dantzig, écrivain, le confirme dans son dernier essai « Proust océan » :

« On dit beaucoup que Proust s’est inspiré d’Anatole France pour ce personnage (Bergotte). Inspiration ! Comment s’inspire-t-on d’une personne ? La plonge-t-on dans un grand faitout d’eau bouillante par-dessus lequel, la tête penchée recouverte d’un tissu, on fait une fumigation ? D’une personne on peut s’approprier un petit élément, éventuellement un autre (un geste, une parole, un acte), mais on en picore aussi à d’autres, et au moyen de ces tesselles on entreprend de composer une mosaïque, laquelle reste très fragmentaire.
Le primordial est apporté par l’imagination. Pour commencer, elle est préalable. On a l’idée d’un personnage et de son trait de Continuer la lecture de Les personnages de roman mènent-ils leur vie ?

La petite madeleine

temps de lecture : huit minutes. Mais non, ce n’est pas long, huit minutes ! Et puis, on ne s’en lasse pas. 
Morceau choisi

La petite madeleine

C’est très curieux la madeleine de Proust : tout le monde en a entendu parler, presque tout le monde a une idée de ce qu’elle représente, mais bien peu de monde a véritablement lu ce passage emblématique de la Recherche du temps perdu.

Vous me direz que c’est pareil pour le reste du roman : monumental chef d’œuvre reconnu dans le monde entier, respecté, vénéré, cité, étudié, analysé, interprété, disséqué… mais aussi chef d’œuvre craint, tenu à distance, entamé, rarement achevé, oublié…

Quand vous leur posez la question, comme pour la plupart des classiques, la plupart des gens ne lisent pas la Recherche, ils la relisent. Ne vous y trompez pas : c’est souvent un mensonge. Au mieux, c’est un projet, une vague Continuer la lecture de La petite madeleine

Pronostic vital

Morceau choisi

Pronostic vital
Il y a cent ans aujourd’hui jour pour jour, le 18 novembre 1922, Marcel Proust mourait chez lui, rue Hamelin à Paris.
Voici ce qu’en janvier 1921 Jacques-Émile Blanche écrivait dans une lettre ouverte à l’écrivain :

Heureusement pour nous, votre santé s’améliore de mois en mois. Vous nous enterrerez tous, vous atteindrez l’âge de Sarah Bernhardt et de Chevreul ! Il est peu d’êtres plus robustes que ceux qui, ayant eu une jeunesse débile, furent contraints à se soigner toujours. Sous la coupole de l’Académie française, vous siégerez entre Jacques Rivière, André Gide, Giraudoux et Morand, quand Paul Claudel, devenu votre collègue, sera Président de la République ; et vous discuterez l’étymologie, les divers sens de quelques mots qui s’enrichiront chacun d’un si long commentaire. Jacques-Émile Blanche – lettre ouverte à Marcel Proust, janvier 1921

Note : J.E. Blanche était peintre et écrivain, il n’était ni médecin ni voyant. 

Vous ne pouvez pas vous figurer

Ukraine : J 264

(…)c’était des rivages de la mort, vers lesquels ils allaient retourner, qu’ils venaient un instant parmi nous, incompréhensibles pour nous, nous remplissant de tendresse, d’effroi et d’un sentiment de mystère, comme ces morts que nous évoquons, qui nous apparaissent une seconde, que nous n’osons pas interroger et qui, du reste, pourraient tout au plus nous  répondre : « Vous ne pourriez pas vous figurer. »
Marcel Proust – À la recherche du temps perdu – Le temps retrouvé

Rendez-vous à cinq heures avec Monsieur le Duc

la page de 16h47 est ouverte…

 

Le duc de Guermantes va en soirée

Voici un extrait de A la recherche du temps perdu – Le côté de Guermantes – lu par Guillaume Gallienne.

Le narrateur est reçu par le duc de Guermantes qui est impatient de se rendre à une soirée. Deux évènements risquent d’empêcher ou de retarder le duc dans son projet : que s’achève l’agonie d’un cousin germain et qu’Oriane, la duchesse, ne soit trop retardée par la visite attendue de Charles Swann. 

Cette lecture dure presque une heure, mais rien ne vous oblige à l’écouter jusqu’au bout. 

Le premier quart d’heure est une démonstration éclatante de deux talents : celui du petit Continuer la lecture de Rendez-vous à cinq heures avec Monsieur le Duc

Mais enfin, pourquoi faut-il relire Proust ?

temps de lecture : 3 minutes

L’homme élégant et la femme du monde ne lisent pas Proust. Ils le relisent.
Le vieillard cacochyme aussi, mais lui, il croit que c’est la première fois.
Vous voulez savoir pourquoi il  faut relire Proust ? Eh bien, je vais vous le dire. Mais pour que vous en soyez vraiment convaincus, je vais le faire par le truchement de quelques spécialistes.

D’abord, relire pour le plaisir : 

C’est peu dire que le plaisir proustien par excellence n’est pas celui de la lecture, mais celui de la relecture.
Laurence des Cars, présidente du musée d’Orsay Continuer la lecture de Mais enfin, pourquoi faut-il relire Proust ?