» (…) Une fois que tout est prêt, généralement sous forme de cases dans un tableur Excel, je n’ai plus qu’à laisser tourner la mécanique de l’habitude pour que l’action avance. »
Personnellement, je considère Simenon comme un excellent, sinon un grand écrivain et je ne voudrais pas que vous preniez cet exemple, qui d’ailleurs ne prend pour cible que ses romans policiers, pour un dénigrement de toute son œuvre, car chez lui, ce n’est pas vraiment l’intrigue qui compte, mais l’ambiance et le style, tout le reste n’étant que prétexte.
À la même question, Raymond Chandler, le plus grand, le plus élégant, le plus nonchalant des auteurs de série noire, aurait répondu : « Prenez le quartier de Westwood à L.A., plantez-y un détective privé un peu alcoolique, un peu fauché, souvent à la limite de la légalité mais intransigeant sur ses règles de morale personnelles, fidèle en amitié au-delà du raisonnable. Donnez-lui pour client un tycoon du cinéma amoureux d’une étoile du strip, ou pour cliente une jeune héritière ayant fait une grosse bêtise. Quand vous aurez tout ça, imaginez n’importe quel début d’intrigue, prenez un whisky on the rocks et laissez faire votre vieille Remington, celle dont la touche P s’est fait la belle depuis un lustre, car ‘’l’histoire on s’en fout, c’est le style qui compte.’’ »
Si j’étais Patrick Modiano, ma réponse serait « Si vous voulez obtenir un prix Nobel de littérature, prenez un quartier de Paris, faites-y régner le brouillard, placez-y un homme flou, semi amnésique et indécis, mettez-lui un bandeau sur les yeux et faites-lui rechercher dans la nuit le trousseau des clés de son existence sous un réverbère clignotant. Ensuite, n’hésitez pas à écrire vos hésitations, supprimez adverbes et adjectifs, biffez, raturez, raccourcissez le reste sans souci de l’intrigue, parce que comme disait Chandler avant moi : ‘’l’histoire on s’en fout, c’est le style qui compte.’’ »
Si j’étais Flaubert…
Bon, vous avez compris, je crois.  Ces écrivains ont des méthodes, certains diraient des trucs, mais j’ai trop de respect…  et toute cette sorte de choses. Et, malheureusement, je ne suis ni Simenon, ni Chandler, ni Modiano, pas davantage le grand Gustave ou le petit Marcel. Je n’ai donc pas de méthode et si je m’essaye parfois à différents styles, la chose racontée demeure importante.
Pas de méthode ? C’est trop vite dit, en tout cas pas de méthode récurrente, transposable d’une œuvre à l’autre. Par contre, comme tout le monde, j’ai quelques habitudes, mais elles ne consistent finalement qu’en la réunion de conditions matérielles propices à l’écriture (généralement une salle de café). Les décrire présentera peut-être un intérêt dans un demi-siècle ou deux, lorsque des exégètes auront fini d’analyser mon œuvre et qu’ils en viendront aux petits détails dont les descriptions font les best-sellers biographiques. Aujourd’hui, je crains que ce ne soit passionnant pour personne, aussi je m’en abstiendrai.
Des habitudes sans intérêt, pas de méthode… Ma réponse doit vous paraitre décevante. En effet, elle ne vous permettra sans doute pas de remplir toutes les colonnes que vous aviez espérées.
— Effectivement, cher auteur, effectivement. Mais, si vous pensez ne pas avoir de méthode générale, peut-être pourriez-vous nous raconter pourquoi et comment vous avez écrit telle ou telle de vos nouvelles. Peut-être pourra-t-on ensuite en tirer une méthode ?
— Ainsi, vous pensez que je pourrais avoir une méthode sans le savoir, et que l’examen des circonstances qui ont prévalu à l’écriture de plusieurs textes pourrait la révéler. Théoriquement l’idée est intéressante bien que je doute du résultat. Mais, après tout, nous pouvons toujours essayer.
A SUIVRE
« Avoir une méthode » s’interroge Philippe. Moi je dit qu’une méthode, organisée, systématique, contraignante, c’est une servitude, c’est se soumettre à une dictature. En tout cas c’est ce que disais mon copain La Boétie il y a bien des années dans son Discours de la Servitude Volontaire et concluait avec ce conseil: « Soyez-donc résolus à ne servir plus. Et vous voilà libre ».
PS: Bardella? Autant s’y habituer. D’ici moins de 2 ans il sera ou Président ou Premier Ministre. Les ralliements façon Ciotti vont déjà bon train.
Sans aucun rapport avec le carnet d’écriture, mais…
Jordan Bardella a une tête de vendeur de vérandas en PVC. Il a le costume et l’esprit qui vont avec. Ses arguments de vente qui sont fabriqués à la maison par les équipes de Marine Le Pen et qu’il énonce tel le Christian de Cyrano de Bergerac, sont de pure opportunité. Quand ça n’engage à rien d’immédiat, il dit qu’il faut s’attaquer aux dépenses pour redresser nos comptes publics mais avec tout son parti, il a voté la suspension de la réforme des retraites et son abrogation fait partie de ses engagements.