(…)n’oublie pas, la rive droite tout le temps, et tu arriveras aux premières maisons de Bardonnèche. Après, t’arriveras bien à te débrouiller pour faire de l’auto-stop. Ah ! et puis, surtout, fais attention aux … »
Bernard n’écoute plus, submergé par les instructions du passeur, fasciné par ses allers et venues dans le local, angoissé par la conscience que dans quelques minutes, il va se retrouver seul dans la nuit, encore une fois, sans lampe, dans un milieu hostile et glacé, plein de pièges, de rochers abrupts, de torrents gelés et de carabiniers en patrouille.
Ça y est, Tony a claqué la porte de la baraque et l’a verrouillée. C’est vrai, il ne neige pas, il n’y a pas de vent et une lune presque pleine éclaire un paysage en noir et blanc. Tony a accompagné son petit groupe de réfugiés sur une dizaine de mètres vers le haut, puis il est redescendu vers Bernard qui restait à les regarder, planté sur le seuil de la baraque en béton. Il lui a redonné quelques consignes essentielles, rester sur le chemin, contourner le poste des Carabiniers, suivre la rive droite du torrent et puis… « bonne chance pour l’auto-stop ! » Il lui a même donné trois billets de 10 euros, « de la part de Tanios » et il est remonté prendre la tête de la petite colonne de ses clients. Ils se sont mis en marche. Longtemps après qu’ils se soient évanouis dans l’ombre d’un gros rocher, Bernard était encore là, immobile, hésitant, à fixer l’endroit où le dernier Syrien avait disparu. Continuer la lecture de Gisèle ! (20)