Archives mensuelles : mai 2017

Le lac de Whistle Stop

Morceau choisi
 Vous allez lire une courte histoire extraite du roman de Fannie Flag dont on a tiré le film « Beignets de Tomates Vertes (Fried Green Tomatoes) ». Je ne vous cacherai pas qu’avec « Potins de femmes (Steel Magolias) », « Frankie and Johnny », « Vacances Romaines », « Sept Ans de Réflexion », « La Garçonnière (The apartment) », Beignets de Tomates Vertes est la comédie sentimentale américaine que je préfère. 
Nous sommes en Alabama et Idgie, l’une des deux héroïnes, a pour habitude de raconter des histoires, des histoires du Sud. Voici, selon moi, la plus belle :

—Vous voyez ce grand champ là-devant ?
—Oui, m’dame.
-—Il y a des années, c’était le plus beau lac de Whistle Stop… En été on venait s’y baigner et y pêcher… On pouvait faire des promenades si on voulait. (Elle secoua la tête avec tristesse.) C’est sûr qu’il nous manque.
Smokey contemplait le champ d’un air perplexe.
—Qu’est-ce qui s’est passé ? Il s’est asséché ?
Elle lui offrit une cigarette, lui donna du feu.
—Non, c’est pire que ça. C’était un mois de novembre, et un vol de canards s’est abattu en plein milieu du lac. Oh, ils étaient nombreux, une bonne cinquantaine, et alors qu’ils barbotaient tranquillement cet après-midi-là, il s’est produit un drôle de truc. La température est tombée si vite, mais si vite, que tout le lac a gelé… une masse de glace dure comme la pierre… en quelques secondes. Oui, juste le temps de compter jusqu’à trois…
Smokey la regarda, éberlué.
—C’est vrai ?
—Et comment!
—Ça les a tués raide les canards, alors.
—Non, pourquoi ? répliqua Idgie. Ils se sont envolés et ont emporté le lac avec eux. Et de puis ce jour-là, ce lac doit se trouver quelque part en Géorgie…
Smokey se tourna vers elle et, comprenant qu’elle l’avait bien fait marcher, il éclata si brusquement de rire qu’il manqua s’étrangler, et Idgie dut lui taper dans le dos.

NB 1 : Ne manquez ce film sous aucun prétexte.
NB 2 : Cette galéjade me fait penser à celles qu’inventait Goscinny dans l’un des albums de Lucky Luke. Il les faisait dire par le pilote du Daisy Bell, bateau à roue qui remontait le Mississippi, dont les brutales variations de niveau sont légendaires. Ned raconte :
—Cette année là, le niveau du fleuve est tombé si vite que les poissons se sont fracassé le crâne sur le fond.
—Cette année là, le niveau du fleuve était tombé si bas qu’on ne naviguait que le matin, grâce à la rosée.
NB 3 : Ne manquez pas les Lucky Luke du temps de Goscinny.

Ah ! Les belles boutiques – 3

Parti Socialiste
328 rue Saint Jacques
Paris 5°

Fond de commerce à céder

La série  « Ah ! les belles boutiques »
L’objectif : rendre hommage aux commerçants qui réussissent à conserver l’aspect traditionnel de leur façade de magasin, et les encourager à persévérer.
Le contenu : une photo de la devanture d’un magasin, avec si possible l’adresse et, très éventuellement, un commentaire sur la boutique, ou son histoire, ou son contenu, ou sur l’idée que s’en fait le JdC.
L’organisation : vraisemblablement par quartier de Paris, mais rien n’est certain et on verra bien
Le programme : comme disait Macron : on verra bien.

L’Art des Snobs

Aucun roman (La Recherche du Temps Perdu) ne détruit plus simplement que le sien (Marcel Proust) une légende d’après laquelle l’oisiveté, la richesse, le confinement dans un cercle étroit de relations personnelles constitueraient des conditions propices à l’épanouissement des qualités de l’esprit et à la finesse des manières.
(…)
Il ressort donc de la Recherche que l’oisiveté et l’argent n’affinent par le goût, mais au contraire forcent contre leur goût à s’occuper d’art quantité de malheureux qui, sans nécessité de sauver la face, n’eussent jamais été condamnés à ce supplice et auraient du même coup épargné à autrui celui de les écouter. Leur dénuement eu rendu inutile la production qui leur est spécialement destinée : la littérature décaféinée, la peinture prédigérée, et en général l’avant-garde rétrospective.  Proust détruit le paradoxe de la fonction sociale des snobs, le mythe de la purification héréditaire du goût, et montre que l’éducation aristocratique et grande-bourgeoise conduit moins souvent au Louvre qu’à la galerie Charpentier.

Jean François Revel – Sur Proust (Julliard, 1960)

Ah ! Les belles boutiques – 2


Studio des Ursulines
10 rue des Ursulines
Paris 5°

Venez-y avec votre petit-fils pour voir le dernier Kirikou, venez-y pour la première de votre film confidentiel, mais venez-y absolument, qu’on ne  transforme ce très joli petit théâtre juste en face de chez moi en Carrefour-City !

La série  « Ah ! les belles boutiques »
L’objectif : rendre hommage aux commerçants qui réussissent à conserver l’aspect traditionnel de leur façade de magasin, et les encourager à persévérer.
Le contenu : une photo de la devanture d’un magasin, avec si possible l’adresse et, très éventuellement, un commentaire sur la boutique, ou son histoire, ou son contenu, ou sur l’idée que s’en fait le JdC.
L’organisation : vraisemblablement par quartier de Paris, mais rien n’est certain et on verra bien
Le programme : comme disait Macron : on verra bien.

¿ TAVUSSA ? (23) Du Nord au Sud et de Droite à Gauche

Avant-hier soir à la télévision, interview d’un jeune homme dans les locaux des Jeunes Républicains d’une ville du Sud :
—Pour qui allez-vous voter Dimanche ?
—Je considère qu’aucun des deux candidats que l’on nous propose n’est digne de devenir Président de la République. Je vais donc m’abstenir ou peut-être voter blanc.

Avant-hier soir à la télévision, interview d’un jeune homme dans les locaux de la France Insoumise d’une ville du Nord :
—Pour qui allez-vous voter Dimanche ?
—Je considère qu’aucun des deux candidats que l’on nous propose n’est digne de devenir Président de la République. Je vais donc voter blanc ou peut-être m’abstenir.

D’accord, les gars. C’est votre droit de penser comme ça. Mais il faut quand même vous dire qu’avec ou sans vous, l’élection aura lieu et que, Dimanche soir, l’un de ces deux candidats deviendra effectivement Président.

Alors, puisque vous n’en aimez aucun, lequel des deux craignez-vous, détestez-vous, méprisez-vous le moins ?
Si vous n’êtes pas capable —je veux dire sincèrement, secrètement, en vous-même, pas devant les quelques membres de votre chapelle­— de répondre à cette question, alors oui, restez chez vous à refaire la gueule et le monde.
Si, par contre, vous avez pu donner une réponse, allez voter et mettez un bulletin valide dans l’urne. Rien ne vous empêchera ensuite de raconter à vos amis que vous avez mis un bulletin blanc.

Ah ! Les belles boutiques – 1


Dubois
20 rue Soufflot
Paris 5°

Entrez et admirez le superbe capharnaüm multicolore, achetez des pinces à dessin à l’unité et des crayons de couleur par milliers que vous sortirez de petits casiers en bois sombre et poli par cent cinquante six années d’usage. 

La série  « Ah ! les belles boutiques »
L’objectif : rendre hommage aux commerçants qui réussissent à conserver l’aspect traditionnel de leur façade de magasin, et les encourager à persévérer.
Le contenu : une photo de la devanture d’un magasin, avec si possible l’adresse et, très éventuellement, un commentaire sur la boutique, ou son histoire, ou son contenu, ou sur l’idée que s’en fait le JdC.
L’organisation : vraisemblablement par quartier de Paris, mais rien n’est certain et on verra bien
Le programme : comme disait Macron : on verra bien.

Ah ! Les belles boutiques !

Ah ! Les belles bouti-ques, bouti-ques, bouti-ques
(à chanter sur l’air de Ah ! Les belles bacchan-tes, bacchan-tes, bacchan-tes, extraites du film du même nom et de Robert Déry)

Quand on s’ennuie, quand on ne sait plus quoi écrire, quand on vieillit, on fait des listes. Tout le monde fait ça, tôt ou tard. On les commence ( j’aime, j’aime pas ; je me souviens ; choses à faire, à défaire ou à refaire ; inventaire des personnes à gifler…), on les abandonne, on les reprend, on les décline… Les psychologues amateurs de calembours diront sans doute que des listes que l’on décline, ce sont des signes que l’on décline.

(Entre nous, est-ce que vous avez remarqué comme les psychiatres, les psychologues et autres Diafoirus de l’âme individuelle ou collective sont amateurs de calembours, de jeux de mots, d’approximations phonétiques ? Moi, je l’ai remarqué. Ils les trouvent révélateurs des tensions, des frustrations, des psychoses enfouies. Je suis certain que le double sens du verbe décliner utilisé plus haut va les ravir et leur donner du grain à moudre pour trois jours. Victor Hugo avait dit : « le calembour est la fiente de l’esprit qui vole« . Pour moi, je préfère ce que disait son cocher : « les calembours sont les pets de l’esprit » car il faut reconnaitre que lâcher une flatulence peut être parfois d’un grand soulagement. Fiente ou pets de l’esprit, syndromes de traumatismes profonds ou signes de sérénité et de bienveillance envers l’humanité, dyslexie légère ou malformation infantile, je vous laisse juges.)

Bon, en tout cas, moi, j’en ai fait des listes. Je me souviens que j’ai commencé par des « Je me souviens« . Un jour, j’avais vu Sami Frey Continuer la lecture de Ah ! Les belles boutiques !

¿ TAVUSSA ? (22) Jours critiques

Aujourd’hui, critiquer François Fillon, c’est compréhensible, c’est même normal. Fillon, vous vous souvenez ? Celui qui nous a mis dans cette situation où nous allons devoir choisir non pas entre la peste et le choléra —on a bien failli— mais entre la typhoïde et le rhume des foins ? Tout à fait entre nous, nous aurions bien dû nous douter que, malgré son intime et ancienne conviction d’être un jour président, il ne pourrait pas arriver jusqu’au bout. Souvenez-vous de notre surprise dans l’affaire des élections pour la présidence de l’UMP quand nous avons réalisé qu’il n’avait pas prévu que Copé allait bourrer les urnes. Ne pas concevoir que Copé puisse tricher pour la seule raison qu’il avait promis de ne pas le faire, c’était un peu comme la tortue africaine qui accepte de faire traverser la rivière au scorpion —si par extraordinaire vous ne connaissez pas cette histoire, voyez la note * en bas de page. On frémissait déjà à la pensée de Fillon faisant preuve d’une telle imprévoyance, d’un tel manque de psychologie, d’une telle naïveté face à de bonnes paroles de Poutine ou à des promesses de Trump ! Après cet épisode, le doute commençait à nous habiter, mais on lui en laissait encore le bénéfice. Pourtant, sa réaction à l’entourloupe meldoise (de Meaux) toute Continuer la lecture de ¿ TAVUSSA ? (22) Jours critiques