Grand tourisme

Le poème qui suit a déjà été publié le 5 juillet 2018 sous le titre
 Les valises à roulettes.

Les achélèmes de Costa accostent au quai d’ Ostie.
Les réacteurs faciles encombrent da Vinci.
Le Grand Raccord Annulaire est pris en masse.
Les valises à roulettes ébranlent les pavés de Rome.

Couples âgés de touristes
cheveux blancs mais tenue de sport
ils sont encore en forme
et parcourent la ville en se tenant la main.

Touristes en troupeaux
derrière le parapluie rouge replié de leur guide
abrutis de fatigue, de pavés noirs et de culture
ils ingurgitent Auguste juste avant Michel-Ange
et confondent déjà le Colisée et le Capitole.

Jeunes gens en bandes, ou par deux
émerveillés par les rues et les couleurs
les cafés et les monuments
ils mangent des glaces, boivent du vin
achètent d’inutiles oiseaux en papier
et portent sans effort leurs sacs et leurs bouteilles d’eau.

Romain à costume bleu marine
chemise blanche et cravate sombre
c’est un chauffeur de maître
un fonctionnaire ou un appariteur
ou, mieux encore,  un avocat
qui rentre chez lui déjeuner.

Romain à chemise grise au col Mao fermé
et à serviette de cuir noir
c’est un prêtre qui vient du Canada
et qui apporte les saintes huiles à un malade.

Romain à pantalon noir serré
chemise étroite et rayée, col largement ouvert
c’est un commerçant qui vit chez sa mère
et qui est sorti draguer.

Romain en surpoids
barbu au t-shirt sale et boursouflé
au jean au bord de l’éclatement
ce n’est plus un romain.

Sur la place Navone,
les peintres copient les uns sur les autres
et la fontaine du Bernin attend la chute de Sainte Agnès.

Sur les marches d’Espagne
on se pose et on regarde la Barque
flotter au milieu des calèches.

Sur la place de la Rotonde
à l’abri d’une fraîche terrasse
on regarde tous les petits hommes
entrer au Panthéon.

Rue Condotti,
elle est là, la belle Romaine, elle est là !

En haut du Capitole
on reprend son souffle
sous le cheval de Marc Aurèle.

Depuis qu’elle a un ascenseur
la Machine à Écrire est devenue fréquentable.

Au Large de la Tour Argentine
les chats ont envahi le théâtre de Pompée
et léché le sang de César.

Sur le Pont Saint-Ange ils sont dix
qui vous mènent au château ou à la forteresse
c’est selon.

Dans l’au-delà du Tibre,
les gitanes aux belles robes
ont de faux airs de faux bras
parfois de faux bébés.

Rome, unique objet…
Les achélèmes de Costa accostent au quai d’Ostie
Les réacteurs faciles encombrent da Vinci
Le Grand Raccord Annulaire est pris en masse
Les valises à roulettes descellent les pavés de Rome.

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