UN JOUR SANS FIN

Lundi

 C’était une belle soirée de début d’été du côté de la Place Saint Sulpice. Il venait de tomber une courte pluie d’orage et la merveilleuse odeur de l’asphalte humide et chaud envahissait les terrasses des cafés.
Les hommes en chemise avaient renouvelé leur demi. Les femmes en Lothar reprenaient une Marlboro Light avant de jeter leur dévolu. Il faisait bon. On était bien.Elle portait des sabots noirs, un pantalon de jean bleu, un chemisier blanc un foulard bleu et de longs cheveux blonds. Elle était entourée de rires et de fumée de cigarette.
Il y avait tant de jeunesse, tant de garçons, tant de filles autour d’elle que ça m’a fait un peu peur. Ils sont partis, joyeux, diner dans une pizzeria de la rue des Canettes. Et moi, je suis allé au cinéma. Revoir « Un jour sans fin ».Elle ? Je ne l’ai jamais revue.

Mardi

… Il y avait tant de jeunesse, tant de garçons, tant de filles autour d’elle que ça m’a fait un peu peur. Mais, c’était l’été, c’était la nuit. Elle était si jolie. J’étais tellement libre, tellement vide. Je me suis joint à eux. Ils parlaient de leurs examens, tout proches, de leurs vacances qui commençaient demain. J’évitais de la regarder. Ils se sont dirigés vers la rue des Canettes. Je les ai suivis jusque devant un restaurant italien. J’hésitais encore. L’un d’entre eux a dit : « Tu dines avec nous ? ». Soulagé, je suis entré dans la salle ouverte sur la rue tandis que le patron organisait ses tables pour nous accueillir. Dans un chahut qui semblait être la règle, ils se sont répartis autour de la grande table enfin prête. Je suis resté en arrière, hésitant sur la conduite à tenir. Pendant ce temps, ils se sont assis, et la seule place restée libre pour moi était la plus éloignée d’elle. Pendant le diner, je l’ai regardée sourire, fumer, repousser ses cheveux, parler, manger, fumer encore, rire… À la fin du diner, par groupe de deux ou trois, ils sont partis dans des directions différentes en s’envoyant des plaisanteries au travers de la place. Je restai seul près de la fontaine. Heureusement, il était encore temps pour la séance de minuit. Je suis parti revoir « Un jour sans fin ».Elle ? Je n’ai jamais su quel était son nom.

Mercredi

(…) Ils se sont dirigés vers la rue des Canettes. Je les ai suivis jusque devant un restaurant italien. J’hésitais encore. L’un d’entre eux a dit : « Tu dines avec nous ? ». Soulagé, je suis entré dans la salle ouverte sur la rue tandis que le patron organisait ses tables pour nous accueillir. Dans un chahut qui semblait être la règle, ils se sont installés autour de la table enfin prête. Je suis resté en arrière, hésitant sur la conduite à tenir. Finalement, et je ne fis rien pour cela, mais la seule place qui se trouva être libre quand ils furent tous assis était à sa gauche.
Tout était dit, scellé, sans fin.

Cette courte nouvelle fait partie du recueil « Les trois premières fois »

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