Archives de catégorie : Fiction

Les corneilles du septième ciel (26)

Chapitre XXVI

Comme s’y attendent ceux qui ont eu la gentillesse de lire les chapitres précédents, la relation de Françoise et Pierre devint de plus en plus intime. Sans qu’il soit nécessaire de se livrer à des descriptions triviales au risque de décevoir certaine abonnée pyrénéenne, même les moins perspicaces auront deviné en les voyant enlacés que leur amitié n’en était déjà plus une. Quel nom donner à ce moment irréel que nous avons connu, au moins une fois pour les plus chanceux, où l’on sent que notre vie est en train de basculer vers Continuer la lecture de Les corneilles du septième ciel (26)

Les corneilles du septième ciel (25)

temps de lecture : 3 minutes 

Chapitre XXV

Qu’est la vie d’un neurologue hospitalier comme Françoise Maignan ? Qui le sait ? Qui s’en préoccupe ?

Être neurologue de garde, personne en dehors des intéressés ne sait ce que cela signifie. Personne ne sait la contrainte d’être réveillé à trois heures du latin pour se rendre en quatrième vitesse au CHU tenter de sauver une vie humaine. Non, personne ne sait la détresse du médecin dans un couloir au sous-sol en train de pousser son chariot sur lequel il y a les instruments thérapeutiques les plus sophistiqués qu’il va devoir utiliser, mais seul, à trois heures du latin, sans personne pour l’aider. De toute façon, ce sera un cauchemar ; il le sait mais il y va parce que, à ce moment-là, il est la seule et dernière chance du patient qui vient Continuer la lecture de Les corneilles du septième ciel (25)

Les corneilles du septième ciel (24)

temps de lecture : 6 minutes 

Chapitre XXIV

Prétextant un stage dans le service de Neurologie du Professeur Gibert à La Salpêtrière, Françoise Maignan se rendait une fois par semaine à Paris. La vérité oblige à dire qu’elle n’y mettait jamais les pieds. En réalité, elle retrouvait son ami Annick avec laquelle elle faisait de longues promenades sur les quais. Elles avaient acheté la carte d’abonnement à Batobus, une véritable aubaine et pas seulement économique. Pour une somme modique, les deux jeunes femmes pouvaient se balader toute l’année sur la Seine et sans aucune limitation de temps. Au soleil sur le pont arrière du bateau, elles regardaient défiler Continuer la lecture de Les corneilles du septième ciel (24)

Juliette et le jardinier

Ce texte a déjà été diffusé le 2 avril 2019

temps de lecture : 4 minutes 

Elle, c’est Juliette. Elle est belle comme une rose du matin, comme une goutte d’eau de pluie, comme un frisson dans les feuilles de bouleau, comme un parfum de cerise. Elle chante comme un rouge-gorge, elle parle comme l’eau de la fontaine, elle bouge comme l’ombre d’un roseau. Je l’aime depuis toujours ; depuis que je l’ai vue pour la première fois sortir de Santa Anastasia auprès de sa mère, je l’aime ; depuis que je guette à sa fenêtre le plus léger mouvement de rideau, Continuer la lecture de Juliette et le jardinier

Les corneilles du septième ciel (23)

temps de lecture : 3 minutes 

Chapitre XXIII

Lors de ses conversations avec Lorenzo, Françoise évoqua un jour la petite madeleine de Proust dont ses collègues spécialistes de la mémoire discutaient sans fin. Était-elle un réel souvenir ou une invention d’écrivain comme l’affirmait une théorie scientifique récente ? A l’appui de cette hypothèse, elle avait lu dans un ouvrage très sérieux que la madeleine de Proust était en réalité une biscotte.

Lorenzo lui confia l’histoire douce-amère de sa madeleine à lui bien qu’elle n’eût aucune relation avec la littérature et la neurologie. Il ne savait ni pourquoi ni d’où lui était venue sa passion pour elle. Sûrement pas de ses relations sentimentales supposées avec Jésus-Christ dont il n’était pas jaloux. Non, Marie-Madeleine le fascinait parce qu’elle avait été la seule vraie femme de chair dans la vie de Jésus. Troublante, n’est-ce pas, cette singularité Continuer la lecture de Les corneilles du septième ciel (23)

Les corneilles du septième ciel (21&22)

temps de lecture : 6 minutes 

Chapitre XXI

L’Echo du Bas de l’Aisne

Mardi 2 novembre 1997.

Rebondissement heureux dans l’affaire de la disparition samedi soir d’une jeune femme qui se rendait chez des amis à Chants de Fées ! En réalité, celle-ci, d’un naturel fort distrait, avait raté la petite gare de Chants de Fées. Descendue à la station suivante, celle de Château-Thierry, elle n’avait pas trouvé de train pour la reconduire à sa destination initiale en raison de l’heure tardive. Elle fut donc contrainte de dormir à l’Hôtel des Voyageurs sans réussir à prévenir les Crandaret dont la ligne téléphonique était en dérangement suite aux travaux d’aménagement de l’autoroute A 89. Le lendemain à l’heure de l’apéritif, elle arriva chez ses hôtes mais la maison était close. La jeune femme ignorait qu’ils étaient retenus au commissariat de Police de Château-Thierry à cause de sa disparition. Fort dépitée, elle pensa s’être trompée de date ce qu’elle ne put vérifier auprès de leur voisin, monsieur Minette, toujours au courant de Continuer la lecture de Les corneilles du septième ciel (21&22)

L’affût

C’est la seconde publication de ce texte paru une première fois le 13 décembre 2015. Je n’y ai rien changé, sauf son titre. Il s’appelait « Incipit » et, si vous lisez la note de bas de page, vous saurez pourquoi. Il s’appelle aujourd’hui « L’affût », parce que, finalement, tout le monde, ne parle pas latin. 

temps de lecture : 4 minutes 

Il était étendu à plat ventre sur les aiguilles de pin, le menton sur ses bras croisés et, très haut au-dessus de sa tête, le vent soufflait sur la cime des arbres.(*)Comme la fumée d’un incendie, les nuages se précipitaient vers l’est, cachant la lune puis la révélant à nouveau. Alors, les quelques plaques de neige qui n’avaient pas encore fondu luisaient entre les arbres.

Gary n’avait pas froid. Ne sachant pas vraiment ce qui l’attendait, il avait revêtu sa grosse veste à col de fourrure, il avait mis ses gants fourrés, et enfoncé son bonnet de laine jusqu’aux oreilles. Il se sentait bien. S’il n’y avait pas eu l’excitation de cette première fois, il aurait même pu s’assoupir.

C’est Holden qui lui avait montré l’endroit en lui recommandant de ne pas bouger, ne pas fumer, ni manger, ni boire, sans quoi il risquait de faire rater toute la manoeuvre. Il lui avait expliqué que Jay serait à une vingtaine de mètres à sa droite et Peter à la même distance à sa gauche. De cette manière, à eux trois ils couvriraient toute la largeur du défilé. Continuer la lecture de L’affût

Les corneilles du septième ciel (20)

temps de lecture : 7 minutes 

(…) A l’évidence, Lorenzo ignorait la critique dithyrambique de ce film rédigée par Philippe pour la revue Télérama à laquelle il collaborait depuis ses derniers succès littéraires. La grande Fabienne Pascaud avait condescendu à lui octroyer un sourire plus ambigu qu’admiratif auquel il n’avait pas été insensible malgré tout le mal qu’il avait déversé sur elle et son journal. D’ailleurs, cet hebdomadaire à la mode, il le trouvait plus gauchiste que chrétien, ce qui ne constituait en rien une excuse.

Chapitre XX

A la terrasse ensoleillée du Cyrano, Françoise demanda à Lorenzo ce qu’était la photo. Sa réponse emprunta des chemins plus tortueux que convaincants dont lui-même doutait de la pertinence :

 « Longtemps je me suis réveillé de bonne heure avec une sacrée migraine, cette maladie vieille comme le monde, certes bénigne mais fort handicapante au quotidien, décrite Continuer la lecture de Les corneilles du septième ciel (20)

Les corneilles du septième ciel (18)

temps de lecture : 2 minutes 

(…) Quand, pour la première fois, Françoise fit part de ses travaux à Philippe, ce dernier eut le tort de lui rire au nez en affirmant de façon péremptoire qu’elle était bien mal placée pour douter de l’efficacité de la psychanalyse. Cette assertion ne pouvait en aucun cas constituer une preuve et s’avéra en plus une erreur fatale : il n’avait pas perçu, alors que c’était pourtant son métier, que la personnalité de son ancienne patiente avait évolué. Elle le lui fit remarquer de la manière la plus cinglante qui soit :

– Philippe, vous n’êtes pas psychologue pour un sou mais psychanalyste pour beaucoup.

Chapitre XVIII

Annick avait rencontré sur un champ de fouilles entre le Tigre et l’Euphrate un drôle de spécimen que seule l’archéologie pouvait produire. Marié avec une femme qui l’ennuyait à mourir, ses enfants partis depuis longtemps, Pierre Lepovre n’avait pas longtemps résisté aux charmes d’Annick qui, il faut le reconnaître, ne sautaient pas aux yeux, surtout d’un myope. D’une naïveté qui en avait impressionné plus d’un, Continuer la lecture de Les corneilles du septième ciel (18)