Archives mensuelles : septembre 2017

Quatre heures de maths – 2ème partie

Dans la classe de Piston B du Lycée Saint Louis, le vendredi matin, c’est Maths. Quatre heures. Mais aujourd’hui, il y a contrôle. Intégrales triples et dérivées secondes, le narrateur passe un sale moment.

C’est la panique dans mon estomac. Je lève la tête et devant moi, je ne vois que deux douzaines de nuques inclinées vers les pupitres. De temps en temps, un crayon ou une règle vient gratter un crâne qui s’est relevé, pensif. Mais après un court instant, la tête se penche à nouveau vers l’ouvrage.

Sur ma droite, Marchèse écrit comme un fou. Je le fixe intensément. Il a dû le sentir car il finit par relever la tête. Je lui jette un regard écarquillé, entre affolement et désespoir. Il me rend mon regard un court instant en haussant les sourcils et en faisant une moue qui exprime clairement : « Ah ben non, quoi ? C’est facile ! » puis se replonge dans sa frénésie d’écriture.

Donc, pas d’espoir du côté de Marchèse. C’est pourtant un bon copain et, de surcroit, plutôt fort en math, mais il est trop occupé à aligner ses équations pour me donner un coup de pouce ou même seulement compatir, et de toute façon, tenter de communiquer est bien trop risqué.

Je me retourne, mais derrière moi, je ne vois que des fronts penchés et studieux. Pourtant, tout au fond vers la droite, j’aperçois Machuel, les deux coudes posés sur la table. Il s’est pris la tête dans les mains et demeure parfaitement immobile. Faible consolation.

Espérant un improbable déclic, j’ai poussé la page de l’exercice vers le haut du pupitre et j’ai disposé devant moi ma copie double 21x 29,7 à petits carreaux. Du dos de ma main moite, je l’ai repassée trois fois. J’ai écrit mon nom et ma classe en haut à gauche. J’ai souligné. Et puis, lentement, en essayant d’oublier que c’était peut-être pour la cinquième fois, j’ai relu le texte du problème. Mais rien. Aucune lumière, aucun « bon-sang-mais-c’est-bien-sûr ! » Absolument rien.

Je me dis : « C’est pas possible, tu vas comprendre… Ben mon vieux, si ça se passe comme ça aux concours, t’es fichu ! Et Centrale, c’est dans deux mois… »

Je passe ma main dans mes cheveux. Je souffle bruyamment en gonflant les joues. Marchèse lève la tête un instant et me regarde. « Ah non, répète-t-il avec ses sourcils, c’est facile ! » Et il repique du nez sur sa copie.

Je mords mon stylo bille, qui casse avec un petit bruit sec. Ma lèvre est prise dans la fente du plastique. Ça fait mal mais ça m’occupe un instant.

Je regarde le bois noir qui entoure ma feuille et qui lui donne un air de faire-part. Je me concentre sur les sillons qui y ont été gravés par mes anciens. Je n’y avais jamais prêté autant d’attention. « Ducassou est un salaud » a écrit l’un d’eux. Ducassou, c’est le prof de physique qui a pris sa retraite il y a deux ans. Il paraît que c’en était un vrai, de salaud. « I love Lucille » a écrit un autre. Lucille, drôle de nom. La fille ne doit pas être terrible. Gravé profondément dans le bois, il y a un très beau pistolet, très réussi. Le type a dû utiliser une pointe de compas. Tous les détails y figurent, le percuteur, le viseur, la sûreté, le canon, les stries sur la crosse, tout. Le gars devait être un spécialiste. La sortie de la balle qu’il vient de tirer est même représentée par un petit nuage traversé par un double trait interrompu. Du beau travail.

« Mort aux vaches », « Elvis the King », « O.A.S. », « Gallois est un con ». Au milieu de ces affirmations, de ces insultes ou de ces simples constatations, tout en bas du panneau d’affichage qu’est devenu l’abattant de mon pupitre, on peut déchiffrer ce long cri d’ennui ou de désespoir : « J’en ai marre marre marre marre plus que marre ». Je recherche maintenant mes propres contributions. Elles sont peu nombreuses. Premièrement parce que, si les grossièretés des autres me font parfois rire, j’ai du mal à en proférer moi-même. Deuxièmement, parce que je suis nul en dessin. Tout ce que je pourrais produire serait des petits bonshommes avec des ronds en guise de tête et des bâtons pour bras et jambes. Troisièmement, parce que je ne grave qu’en cours de philo et, qu’en Piston B, les heures de philo sont rares.

Je retrouve pourtant une assez belle rosace tracée au tire-ligne monté sur compas, et un prénom exotique, Tavia. Ce prénom, je l’ai inscrit la semaine dernière pendant le cours de Chatelet. Il nous faisait travailler sur une sentence de je ne sais plus qui : « Pas de science dans un monde d’aveugles ». Cet après-midi-là, j’étais rentré du Luxembourg à contrecœur, juste pour être marqué présent au cours de philo. Pour cela, j’avais dû laisser seule la dite Tavia. Je venais de passer avec elle deux heures ensoleillées. Les choses étaient bien engagées et tous les espoirs m’étaient permis, mais laisser une jolie fille comme ça toute seule dans ce jardin plein d’étudiants en goguette était risqué. J’avais passé une bonne partie de l’heure à tracer les cinq lettres de son prénom sans même y penser. Tavia est américaine, elle arrive tout juste de Géorgie, et je dois la retrouver demain à midi et quart devant le Capoulade. Je l’emmènerai écouter du jazz à La Paillote.

-Dubernard, concentrez-vous sur votre copie, s’il vous plaît !

J’ai sursauté. C’est Fontaine qui vient d’interrompre une tentative de communication à l’autre bout de la salle. Il ajoute :

-Messieurs, il vous reste trois heures !

Je me rends compte qu’une heure vient de s’écouler sans que j’aie écrit un seul mot. Fontaine s’est replongé dans son journal. De temps en temps, il le replie pour le rouvrir bruyamment à une autre page tout en jetant un coup d’œil à la classe. Un groupe d’élève passe en galopade dans le couloir. L’un d’eux s’est arrêté pour  plaquer son visage sur la petite partie vitrée de notre porte.

-Hé, les gars ! Y a Fontaine qui fait sécher les Pistons B !

-Ça, c’est pas difficile ! Y sont nuls, les Pistons B !

-Hé, les Pistons ! Pour l’X, c’est foutu ! Mais vous pourrez toujours aller en Fac !

Approbation générale de la troupe qui passe. Ce sont des Maths Spé. Ils vont à la gym. Veinards. Fontaine a fait semblant de ne rien entendre. Il allume une autre pipe. Le calme est revenu. J’ai commencé à recopier les premières lignes du texte du problème sur ma feuille. Ça me donne une contenance.

J’imagine des tas d’événements qui pourraient me sortir de cette épouvantable situation : un incendie s’est déclenché dans la cantine et nous devons évacuer le lycée ; nous voilà sur le trottoir du boulevard Saint-Michel et le contrôle est annulé ; d’ailleurs, les dommages sont tels que les cours ne pourront pas reprendre avant au moins huit jours. Ou alors, il y a une manifestation pour l’Algérie Française des Prépas à Navale et à Saint Cyr ; Fontaine interrompt le contrôle ; Il nous laisse libres de descendre dans la cour pour contremanifester et le contrôle est annulé. Ou encore, j’ai une terrible crise de saignements de nez, ou de terribles maux de ventre, ou de tête ; on doit m’accompagner à l’infirmerie et le contrôle est annulé.

Je me lève sans faire de bruit et remonte l’allée jusqu’à l’estrade. Fontaine me regarde d’un air interrogateur.

-Il faut que j’aille aux toilettes, Monsieur. Est-ce que…

-Allez-y, mon vieux, allez-y…

La fin, demain…

Quatre heures de maths – 1ère partie

Il est huit heures moins treize.

Ce matin comme d’habitude, je suis arrivé avec quinze minutes d’avance. Je ne sais pas pourquoi mais il m’est impossible d’arriver comme les autres, à la dernière minute, essoufflé par une course échevelée le long du trottoir en pente du boulevard Saint-Michel suivie de la montée quatre à quatre des grands escaliers jusqu’à l’étage des Prépas et de la dernière galopade dans le couloir sonore jusqu’à la porte de la salle encore ouverte. Je n’arrive pas à entrer dans la classe, rouge et débraillé, pour rejoindre ma place en faisant mine de tituber d’épuisement, à jeter mon porte document sur mon pupitre et à m’effondrer sur ma chaise en regardant le plafond d’un air béat. C’est plus fort que moi, j’ai beau traîner sur le boulevard depuis l’arrêt du 38, j’arrive toujours dans ce terrible couloir avec un quart d’heure d’avance, la respiration régulière et l’angoisse au ventre.

Je me suis installé à ma place, celle que j’ai choisie en début d’année, une place anonyme, discrète, ni trop près de la chaire où sont les fayots, ni trop au fond où sont les fumistes. J’ai sorti de mon pupitre le carré d’épais tissu qu’on appelle sous-cul et que chaque élève de cette classe dispose chaque matin sous ses fesses. J’ai placé mon cahier de maths devant moi et mon porte-document par terre, debout entre mon bureau et celui de Marchèse, mon voisin pour deux ans. Comme chaque vendredi, la journée s’annonce interminable. Quatre heures de maths Continuer la lecture de Quatre heures de maths – 1ère partie

Petit paysan – Critique aisée n°100

Petit paysan
Hubert Charuel – 2017
Swann Arlaud, Sara Giraudeau

Je viens de voir un film, « Petit paysan », et j’ai brusquement réalisé que j’avais vécu des centaines et des centaines de week-ends à côté d’un éleveur de vaches laitières, un tout petit éleveur, encore plus petit que celui du film. Sans que je m’en aperçoive, ou plutôt sans que j’y prête attention, pendant ces week-ends et pendant les semaines qu’ils encadraient, mon tout petit paysan travaillait, peinait, s’inquiétait du temps, pourri, du prix du gas-oil, trop cher, de celui du lait, trop bas, des nouvelles normes, incompréhensibles… En fait, mon voisin des fins de semaine s’inquiétait de tout. Est-ce que sa voiture allait tenir encore longtemps, est-ce qu’il faudra vraiment remplacer le tank à lait, est-ce que le toit de l’étable supportera encore un hiver… ? Mais je ne le voyais pas, ou plutôt, je n’y prêtais pas attention. Et puis, après des centaines de week-ends et de semaines intercalées, il a vendu ses vaches laitières et il a élevé quelques veaux. Il a un peu changé d’inquiétudes : est-ce que le prix de la viande va encore baisser, combien va couter la réparation du chauffage de l’étable… Mais toujours : est-ce que ma voiture…, pourvu que le toit…, s’il se met à faire vraiment froid…. Mais je ne le voyais pas, ou plutôt, je n’y prêtais pas attention.

Et puis, il a pris sa retraite. Il a vécu enfin tranquille pendant quelques années, sans trop d’inquiétudes. Mais je ne le voyais pas, ou plutôt, je n’y prêtais pas attention. Et puis il est mort. Sa voiture, son toit, sa chaudière avaient tenu jusqu’au bout.

Toute sa vie de voisin, il avait été aimable, discret, souriant même. Il disait bonjour, ça pousse les enfants, comment ça va dans la banque ? car il me croyait banquier. Je disais bonjour, il fait drôlement froid, hein, vous avez voyagé un peu pour vos vacances ? car je croyais qu’il en prenait. Mais nous ne nous parlions pas, nous ne nous disions rien, que des petites paroles, banales, sans poids.

Voilà, j’ai pensé à tout ça. Je me suis dit que si je l’avais vu plus tôt, ce film, quelques centaines de week-ends plus tôt par exemple, je lui aurais prêté attention, à mon voisin des fins de semaine, un peu plus peut-être. Je lui aurais peut-être dit des choses, il m’aurait peut-être répondu. Va savoir…

Bon, on secoue les épaules et on pense à autre chose. Au film, par exemple. Je ne vous ai encore rien dit du film, ou si peu. Alors disons que le héros, Pierre, est un petit paysan, jeune, 30 ans, éleveur de vaches laitières, vingt-six. Il a une sœur, vétérinaire, des parents, retraités, il a repris leur ferme, des voisins, un gentil vieillard à l’esprit égaré, un autre éleveur, gros celui-là, cinq-cents hectares, un patron de bistrot, chaleureux. Il y a aussi une boulangère, éphémère.

Pierre vit avec ses vaches, par elles, pour elles. Il rêve d’elles, il en est fier, il les soigne, il les lave, il les caresse, il les trait, il ne fait jamais rien d’autre. Mais une méchante épidémie arrive de Belgique. Une de ses vaches est atteinte. Elle devrait être abattue, et le reste du troupeau avec. Mais non, il ne veut pas. Alors…Mais je ne vous dirai rien de plus. Ce n’est pas que l’histoire soit inattendue mais, même prévisible, sa progression est prenante, inexorable, comme celle d’une tragédie antique.

Quand vous irez voir ce film — parce qu’il le faut — ne vous attendez pas à un documentaire d’Arte sur la condition paysanne, avec petit matin brumeux sur pâture luisante, tasse de café et tartines silencieuses sur toile cirée à carreaux, dialogues renfrognés en contre-jour, gadoue et misère latente. Non, Pierre n’est pas renfrogné, il n’est pas pauvre, pas vraiment en tout cas, enfin on n’en parle pas. Il aime ce qu’il fait, il ne fait que ça, il n’a de temps pour rien d’autre. Même qu’il est peut-être heureux. On ne sait pas vraiment. Mais Pierre ne veut pas qu’on tue ses vaches. Alors avec obstination, avec lenteur, avec douleur, il fait ce qu’il ne devrait pas faire…

Film noir, thriller, drame psychologique, le film est tout ça à la fois. Il est dense. Il est tendu sur une action unique, sauver le troupeau. Il n’y a aucune complaisance sur l’éventuelle beauté de la campagne, sur l’hypothétique philosophie bucolique ou une prétendue amitié campagnarde. Mais il n’y a pas non plus de pathos, d’affectation, de cliché. On est toujours dans le sujet et, quand le film diverge brièvement sur un diner au restaurant, une partie de chasse ou une nuit de bowling, c’est pour montrer la perte de temps que ces distractions constituent dans l’itinéraire du petit paysan et faire ainsi monter encore un peu la tension.

Swann Arlaud est tellement convainquant dans son obstination douloureuse qu’on dirait un paysan doué pour le théâtre.

Enfin, j’ai un très gros faible pour Sara Giraudeau. Elle m’avait déjà emballé dans son rôle dans la série « Le bureau des légendes« . Elle est ici sensible et volontaire dans son personnage de sœur-vétérinaire. Et puis, elle ressemble tellement à son père.

On doit voir ce film, même quand on n’a pas de paysan dans ses voisins de fin de semaine.

Ah ! Les belles boutiques-12

Comptoir de l’Industrie
6-12 rue Cérès, Reims
Architectes : Thion et Rousseau

Construit en 1922 dans le style Art Nouveau, le Comptoir de l’Industrie a abrité tout d’abord une agence et un dépôt des Acieries de Longwy, puis un établissement des Magasins Réunis. C’est aujourd’hui une résidence pour personnes agées.

La série « Ah ! les belles boutiques »
L’objectif : rendre hommage aux commerçants qui réussissent à conserver l’aspect traditionnel de leur façade de magasin, et les encourager à persévérer.
Le contenu : une photo de la devanture d’un magasin, avec si possible l’adresse et, très éventuellement, un commentaire sur la boutique, ou son histoire, ou son contenu, ou sur l’idée que s’en fait le JdC.
L’organisation : vraisemblablement par quartier de Paris, mais rien n’est certain et on verra bien
Le programme : comme disait Macron : on verra bien.

L’Univers, ses lois, ses principes et autres âneries (2)

Le chat de Schrödinger

Vous vous souvenez certainement du chat de la Mère Michel, ce charmant chat manquant retrouvé par un fabriquant de nouilles sur le grand air du Traderidera.
Vous vous souvenez sans doute des chats de Siné, mais si, mais si, ces chats nés si lassants et se nourrissant exclusivement et approximativement de calembours.
Vous vous souvenez peut-être du chat du Cheshire, celui d’Alice et de Lewis, cher chat lent, affable et rhétorique, excentrique et philosophe au sourire si persistant.

Mais vous rappelez-vous le chat de Schrödinger (1)(2) ? Vraiment ? Pas du tout ? Tiens, c’est étonnant ! Pourtant, c’est un chat intéressant. Jugez-en, car voici, immédiatement, ce qu’on sait de lui :

  • Il vit dans une boîte, fermée.
  • Est-elle en carton ondulé,
  • En fer ou en bois de rose ?
  • On ne sait pas.
  • Mais il faut qu’elle soit bien close,
  • N’est-ce pas,
  • Sans ouverture aucune,
  • Et que dedans il y ait un chat,
  • Ou tout ça serait pour des prunes.
  • Dans la boite, il y a un système
  • Déclenché par le seul hasard
  • Pour tuer le chat sans chrysanthèmes.
  • Ce Schrödinger, quel barbare !
  • A un instant donné ou non,
  • On peut se poser la question :
  • Le chat est-il vivant ou mort?
  • Mais on ne le sait pas encore.
  • Donc il est à la fois mort et vivant.
  • Simultanément ? Simultanément !
  • Pourtant ce chat n’est pas zombie.
  • Pas plus qu’il n’a neuf vies.
  • C’est peut-être un chat domestique,
  • Mais c’est avant tout
  • Un chat quantique.
  • Le chat quantique, voyez-vous,
  • A ceci de commun avec l’atome courant
  • Qu’il peut être à la fois, et c’est assez marrant,
  • Dans deux états très différents
  • En même temps.
  • Et quantique, le fameux chat sera
  • Tant que la boite on n’ouvrira.
  • Et demeurera le mystère
  • De l’animal de Schrödinger
  • Mais quand la boite on ouvrira
  • La lumière fera la lumière
  • Dans la boite, rien d’extraordinaire
  • A cela,
  • Mais aussi sur le sort du chat
  • Et enfin Schrödinger saura
  • Si son chat est vif ou défunt.
  • Mais en attendant, bernique !
  • Et sur le sort du chat quantique
  • On ne saura rien, rien de rien. (3)(4)

Notes

  • 1—Erwin Schrödinger —1887-1961— physicien, philosophe et théoricien scientifique autrichien
  • 2—Le chat de Schrödinger est une expérience de pensée destinée à mettre en évidence le problème de la mesure.
  • 3—Si vous voulez vraiment connaitre la version scientifique de cette belle histoire, vous pouvez toujours Googeliser sur Schrödinger, son chat, l’Ecole de Copenhague, la superposition ou la décohérence quantique, mais si je n’étais que vous, comme disait mon professeur de mathématiques, je m’en tiendrai à ma version, plus vague et plus soluble dans l’air, sans rien en elle qui pèse ou qui pose.
  • 4—Certains gourous mal intentionnés ont profité de la célébrité de ce paradoxe et de sa difficulté d’appréhension pour en déduire des tas de billevesées sur la superposition de réalités, l’existence d’univers parallèles, et tout un tas d’autres trucs propres à troubler les âmes simples… dont vous ne faites pas partie, bien évidemment, car vous, vous savez que ce qui est valable mathématiquement pour la mécanique quantique est une absurdité dans le monde physique réel, y compris dans celui du chat.

Ah ! Les belles boutiques – 11

Café Delmas
2 place de la Contrescarpe Paris V

Ce café est situé à deux pas de l’ancien domicile d’Hemingway du 39 de la rue Descartes. Certains disent qu’Ernest y venait en voisin pour écrire. Permettez-moi d’en douter : je ne l’y ai jamais rencontré. Par contre, un soir, j’y ai aperçu Cary Grant offrir du feu à une née-native d’Oklahoma City (J’en ai témoigné dans le texte que vous pourrez relire en cliquant sur son titre : La Contrescarpe en Technicolor)

En dehors de sa clientèle, le Café Delmas présente l’avantage d’une grande terrasse exposée plein sud et donnant la vue sur un tout petit square dont on aperçoit la minuscule fontaine sur la photo.

Une crainte, cependant : la dernière fois que je suis passé sur cette place, fin juin, elle était toute chamboulée par des travaux dont une pancarte menaçante de la Mairie de Paris nous disait qu’ils étaient destinés à « aménager l’espace » ou quelque hyperbole de ce genre. Mon Dieu, Mon Dieu ! Notre-Drame de Paris, la Reine des Bobos Véganes, la Madone des Velib, la zélote de Paris-Disneyland, la Vestale des Oisifs, la Savonarole de la circulation, bref, la Maire de Paris s’intéresse à ce gentil petit coin de Mouffetard ! On peut craindre le pire. Mais je monte la garde, et je vous tiendrai au courant.

La série « Ah ! les belles boutiques »
L’objectif : rendre hommage aux commerçants qui réussissent à conserver l’aspect traditionnel de leur façade de magasin, et les encourager à persévérer.
Le contenu : une photo de la devanture d’un magasin, avec si possible l’adresse et, très éventuellement, un commentaire sur la boutique, ou son histoire, ou son contenu, ou sur l’idée que s’en fait le JdC.

ET DEMAIN, LE CHAT DE SCHRÖDINGER

 

A faire pleurer Billancourt

Je sais qu’il n’existe pas de camp de concentration en Union Soviétique et je considère le système pénitentiaire soviétique comme indiscutablement le plus souhaitable dans le monde entier. Je crois que c’est le seul pays où les condamnés, quels qu’ils soient, que ce soit des condamnés de droit commun ou que ce soit des condamnés politiques, touchent un salaire égal à ce qu’ils toucheraient s’ils étaient à l’extérieur, peuvent acheter ce qu’ils achèteraient à l’extérieur, sauf des boissons alcooliques, ce qui est évidemment désagréable pour ceux qui aiment boire, et peuvent se payer, avec leur salaire, une chambre individuelle s’ils en ont le désir et la possibilité, qui ont le possibilité de lire, d’écrire, de voir des films, de faire de la musique.

Marie-Claude Vaillant-Couturier – député communiste – 22 décembre 1950

… ET DEMAIN, UNE PHOTO : LE CAFÉ DELMAS

Les nouvelles aventures de William Shakespeare (5)

Le décor représente l’intérieur d’une librairie-charcuterie. Deux est habillé en evzone de première catégorie. Il est occupé à ramasser des avis d’imposition qui jonchent le sol. Un entre côté jardin. Il porte un sobre costume de hallebardier lithuanien, légèrement élimé.

 

Un     —Bonjour, Deux !

Deux     —Tiens, bonjour, Un !

Un     —Dites-moi, Deux, saviez-vous que William Shakespeare chaussait du 36 ?

Deux     — Seulement ?

Un     — Seulement

Deux     —C’est peu pour un grand écrivain

Un     —Ça suffit

Deux     —Vous croyez ?

Un     —Amplement

Deux     —Eh bien alors, bonsoir !

Un     —C’est cela, bonsoir !

Un sort coté jardin.

Deux    —Ce type !  Quel fat !

Rideau

… ET DEMAIN, « A FAIRE PLEURER BILLANCOURT » PAR UNE DÉPUTÉE COMMUNISTE