Archives de catégorie : Fiction

Rendez-vous à cinq heures avec Arlette Davidson

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temps de lecture : 4 minutes

Hier matin, nous avons appris comment la célébrité était venue à Arlette Ratinet, épouse Davidson. Il aurait été dommage d’abandonner là un tel personnage, et Paddy a tenu à nous raconter son destin.

Le fabuleux destin d’Arlette Davidson
par Paddy

Il faut d’abord retourner à Shitbrook-in-the-Swamp où Arlette s’exila pour trouver la célébrité que lui refusait la Creuse. Faut dire qu’elle n’était pas aidée à Guéret avec un père qui lui disait chaque jour « creuse toujours et tu la trouveras ta célébrité ». Alors elle creusait ! Elle creusait sa technique pour attraper les écrevisses dans la marre au bout du champ et chaque fois qu’elle en rapportait à la ferme son père les lui prenait et lui disait « retourne creuser ». Il vendait les écrevisses au marché et c’est lui qui devenait célèbre et riche sans en toucher un mot à Arlette qui creusait toujours plus sa technique. Continuer la lecture de Rendez-vous à cinq heures avec Arlette Davidson

Les corneilles du septième ciel (17)

temps de lecture : 4 minutes

(…) « Mieux vaut un bon scanner qu’une heure de bavardages ». Les conséquences de ces dérives ne se firent sentir que vingt ans plus tard lors d’une épidémie qu’aucun professeur n’avait prévue, ce qui était excusable, et qui submergea des hôpitaux devenus, par leur faute, incapables d’y faire face, ce qui était impardonnable.

Chapitre XVII

La nouvelle vie de Françoise l’enthousiasmait : elle découvrait les  neurosciences, un domaine dont l’origine ne remontait qu’aux années cinquante. Un nouvel examen, l’Imagerie par Résonance Magnétique, révolutionna l’exploration du cerveau. Les américains avaient entrepris la construction d’un appareil géant, grand comme une maison, qui allait permettre de suivre le cheminement des informations dans les neurones et dans les deux sens : leur stockage et leur retour à la conscience. Ainsi allait être démontrée la part Continuer la lecture de Les corneilles du septième ciel (17)

Les corneilles du septième ciel (16)

temps de lecture : 2 minute

(…) En l’écoutant, Françoise réalisa que son enfance à elle, qu’elle avait toujours jugée sinistre, ne l’était peut-être pas autant que d’autres comme celle de ce photographe. Annick, de son côté, considéra que cet ahuri en rajoutait un peu pour se mettre en valeur. Comme elles en discutèrent plus tard ensemble, il n’y avait pas de réponses à leurs interprétations divergentes : aucune preuve ne pouvait démontrer la validité de l’une ou de l’autre. Telles sont les vies des gens : elles n’expriment pas toujours leurs propres différences mais les différences entre ceux qui les voient et les jugent.

Chapitre XVI

Françoise avait désormais pris de l’assurance. Elle en attribuait le mérite en partie à son analyse et en partie à son changement d’orientation professionnelle où elle s’épanouissait. Chaque jour, elle découvrait autre chose que l’horizon désolé de la campagne poitevine et le regard vide d’un poilu couleur kaki délavée. Sa récente rupture avec Annick ne l’avait pas perturbée et elles étaient restées les meilleures amies du monde. Reconnaissons que la vie de province favorisait son investissement dans des études qui, par ailleurs, la passionnaient. Elle fut nommée Continuer la lecture de Les corneilles du septième ciel (16)

Les corneilles du septième ciel (15)

temps de lecture : 4 minutes 

(…) Elle constata aussi que ses hypothétiques prétendants prénommés Philippe avaient tous les deux un âge et une calvitie avancés. Cette dernière curiosité l’intrigua et elle se promit d’en demander la signification à son ex-psy qui la courtisait, lui aussi, depuis qu’elle était chef de clinique en Neurologie au CHU de Poitiers. Dans son escarcelle de prédatrice, elle envisagea de mettre une troisième victime, un photographe rencontré sur les quais.

Chapitre XV

Sur cette photo prise par Lorenzo, le photographe en question, élève d’Henri Cartier-Bresson, le plus grand de tous d’après lui, les deux jeunes femmes, Annick à gauche et Françoise à droite, se baladent dans Paris un jour de pluie. Comme il tenait à leur offrir les clichés qu’il venait de prendre d’elles, il les invita à la terrasse du Voltaire, un café sur le quai du même nom, pour échanger leurs adresses et continuer leur conversation. Lorenzo prétendait avoir été médecin dans le passé mais ni Françoise ni Annick n’en semblaient convaincues. Continuer la lecture de Les corneilles du septième ciel (15)

Blandin prend l’autobus

temps de lecture : 4 minutes 

Ce matin, j’ai croisé Blandin. Ça m’a fichu un  coup !
Il ne devait pas être loin de neuf heures et je descendais tranquillement la rue Monsieur-le-Prince, le nez en l’air et l’esprit préoccupé du seul souci du temps qu’il ferait tout à l’heure, car le bulletin météorologique avait annoncé des averses passagères et j’avais oublié mon parapluie.
C’est au moment où je débouchais dans le carrefour de l’Odéon que je le vis. Je m’arrêtai net au bord du trottoir et me dissimulai à demi derrière la masse jaune d’une grosse boîte à lettres des P.T.T. car je ne tenais pas à le rencontrer. On verra pourquoi tout à l’heure.
Blandin était sur la chaussée, au beau milieu de ce carrefour qui, certes, est petit par la taille, mais réputé dangereux par la complexité des flux circulatoires qui s’y affrontent. L’homme dansait sur le bitume une sorte de samba syncopée, sautillant sans élégance pour éviter autos, vélos, trottinettes et camionnettes  qui se succédaient en flot continu. De la direction générale qu’il donnait à ses petits pas, je déduisis que, venant de la rue des Quatre-Vents, il tentait vainement de rejoindre le Boulevard Saint-Germain.  Soudain, un brusque saut de côté Continuer la lecture de Blandin prend l’autobus

Les corneilles du septième ciel (14)

temps de lecture : 3 minutes

(…) Les enquêtes farfelues de l’inspecteur avaient fait ses délices d’étudiante dans sa petite chambre chez les Soeurs Augustines de Poitiers. Après, lui dit-t-il, son style avait évolué plus par lassitude que par volonté mais il connut alors la célébrité avec Les Corneilles du Septième Ciel aux multiples récompenses. Françoise l’avait lu aussi et lui demanda :

– Mais l’histoire se passe en Afrique, n’est-ce pas ? Vous connaissez donc l’Afrique ?

Chapitre XIV

Au début de sa première vie d’ingénieur, son entreprise avait été missionnée pour reconstruire après un incendie une ferme que possédait au pied du Ngong une femme d’origine scandinave. Ce n’était pas la vue de sa chambre d’étudiant à Vincennes donnant sur la fosse aux lions du zoo qui l’avait incité à partir au Kenya. Non, au départ, ce jeune ingénieur frais émoulu de la célèbre Ecole des Ponts et Chaussées dont il énumérait en guise de présentation tous les termes un à un en séparant et en martelant chaque syllabe pour qu’on comprenne bien de quoi il s’agissait (ce qui en énervait plus d’un), s’y rendit pour diriger les travaux de reconstruction. Continuer la lecture de Les corneilles du septième ciel (14)

Les corneilles du septième ciel (13)

temps de lecture : 3 minutes

(…) Pris de court et parant au plus pressé, Edward envisagea de lui dire des répliques cultes du cinéma bien qu’aucune ne lui sembla adaptée, comme  « T’as d’beaux yeux, t’sais ? » d’autant que Françoise portait des lunettes de soleil. « Atmosphère, atmosphère … » collait mieux à son dépaysement intellectuel dans ce lieu, mais « C’est lourd, soit, mais c’est lourd » avait le mérite d’être décalé et assez spirituel à condition que son gibier ait eu connaissance de ce chef d’œuvre du septième art sorti sur les écrans plus de cinquante ans auparavant ce qui, vu sa jeunesse, n’était pas sûr. Sans avoir encore trouvé la réplique la mieux adaptée à cette attaque surprise, Edward ne put que balbutier d’une voix chevrotante :

– Non, monsieur.

Chapitre XIII

Françoise n’en revenait pas de son audace. Elle avait abordé un homme, qui plus est d’âge mûr, telle une courtisane à la recherche d’un vieux gigolo pour l’entretenir ! Dans ses années-là d’avant le féminisme, une telle attitude relevait de la débauche ; aujourd’hui, cette démarche serait considérée comme une réhabilitation de la dignité de la femme. Qu’avait bien pu en penser sa victime ? Pour excuser sa méprise, elle avait invoqué Continuer la lecture de Les corneilles du septième ciel (13)

Les corneilles du septième ciel (12)

(...) elle le crucifia avec cette sentence devenue célèbre : « Si les Coutelas étaient de fines âmes, ça se saurait dans les étables ». La messe était dite. Edward comprit que ses manoeuvres de séduction n’auraient désormais plus aucune chance de succès, ce que Louis-Charles, en fin diplomate ravi de la tournure des événements, lui confirma.

Chapitre XII

Penser que cet épisode malheureux de sa jeunesse lui soit revenu en mémoire au moment d’établir une stratégie efficace pour faire la connaissance de la jolie jeune fille assise avec sa copine au Flore serait faux. S’il avait en général une bonne mémoire, Edward Crandaret n’en eut jamais pour les épisodes déplaisants de sa longue carrière. Ses études d’ingénieur lui avaient appris le pragmatisme cruel et ses années en brousse le flair du chasseur. Ces deux qualités le sauvèrent maintes fois de situations critiques mais jamais Continuer la lecture de Les corneilles du septième ciel (12)

Les corneilles du septième ciel (11)

temps de lecture : 4 minutes bien tassées

(…) Mais comment ne pas passer pour un vieux gigolo alors que ses sentiments envers la jeune fille étaient purs bien qu’intéressés ? Il n’était motivé que par une seule chose : faire sa connaissance pour donner corps à l’héroïne de son prochain roman. Rien de sexuel là dedans, comme il le répéta au commissaire chargé de l’interroger après la disparition de Françoise.

Chapitre XI

L’écrivain surnommé le faux Blonde par Françoise était né Edward Crandaret. Pourquoi cette juxtaposition étrange ? A sa naissance, son prénom avait été imposé par sa maman, professeur d’anglais (mais pas d’histoire), elle-même prénommée Victoria, ce dont elle était très fière. Ses parents avaient   voulu rendre hommage au fair-play de cette Reine qui avait ensemencé toutes Continuer la lecture de Les corneilles du septième ciel (11)

Une longue allée de cyprès

temps de lecture : 3 minutes

Ce texte a déjà été publié il y a exactement 7 ans. 

Je suis parti.
Ça y est, je suis parti.

J’ai dit non, ça suffit, ce n’est pas pour moi, ce n’est pas moi.
Cet argent, tout cet argent, facile, trop facile, pourtant, je l’avais cherché, j’allais l’avoir, je l’avais.

Cette vie de luxe, Park avenue, East Hampton, Gstaad, ce n’est pas moi. Bien sûr, j’aimais ça, mais ce n’était pas moi.
Ces maisons sur l’océan, ces bateaux, ces voitures, ce n’était pas moi.

Au début, je ne le savais pas ; au début, je croyais que c’était ce que je voulais.
Ces gens, leurs clubs, leurs chevaux, leurs femmes, leurs amis, leur insouciance, leur légèreté, ce n’était pas moi.

Au début, Continuer la lecture de Une longue allée de cyprès