Archives de catégorie : Récit

Les fleurs jaunes (1/2)

temps de lecture : 5 minutes et encore …

Un homme avec des fleurs ? Le plus empoté, c’est l’homme.
Antoine Blondin

 Première partie

En rentrant de la rue de Rennes, il y a quelques jours, je me suis rappelé brusquement la promesse que je m’étais faite la veille : offrir des fleurs à ma femme. Je n’avais pas pu le faire sur le moment, celui où j’avais conçu le projet, forcément, parce que, ce jour-là, nous étions le dernier lundi du mois d’août. Alors vous pensez ! Lundi + mois d’août = zéro fleuriste. Normal ! Contrariant, mais normal.

Si je dis « nous étions« , ce n’est pas parce que je me prends pour le roi des Belges. Quand je dis « nous étions« , quand je parle à la deuxième personne du pluriel, c’est par pure politesse, parce que vous pensez bien que, où vous étiez, vous, à ce moment-là, je m’en fiche comme de ma deuxième (je dis ça parce que, la première, il parait qu’on s’en souvient toujours).

Donc, je suis du côté de la rue de Rennes, on est mardi — tout le monde est mardi — Continuer la lecture de Les fleurs jaunes (1/2)

Aventure en Afrique (24)

temps de lecture : 4 minutes 

Les géomètres de la SOGETEC

Un matin Michel de Verdière m’indiqua que deux géomètres de la SOGETEC, finissaient un relevé de plusieurs centaines d’hectares dans la région de Tillabéry. Ils allaient remettre le premier jet de leurs documents et il faudrait contrôler sa précision pour valider leur travail.

Je trouvais deux hommes sympathiques d’environ 40 et 50 ans, vieux briscards de la topographie en Afrique. Jeunes géomètres, je devais contrôler leur travail ! J’ai eu grand plaisir de les rencontrer. Ils étaient volontaires pour s’expatrier ensemble trois mois par an. Continuer la lecture de Aventure en Afrique (24)

Aventure en Afrique (23)

temps de lecture : 4 minutes 

Les abaques 

Au bureau, où pendant notre absence un climatiseur avait été installé, j’ai établi un plan au 1/2000ème par retenues, en reportant à la main, les milliers de points que nous avions relevés. J’ai ensuite tracé les courbes de niveau et calculé les superficies qu’elles délimitaient. À partir de ces éléments je pouvais établir les courbes hauteur-volume dans un repère orthonormé ayant en abscisse les volumes et en ordonné l’échelle de crue.

Les courbes étaient belles et régulières. C’était ce que l’on appelle des abaques. J’étais très fier de mon travail et l’avais présenté à mes supérieurs. Ils avaient alors convoqué à Niamey les moniteurs agricoles de chacun des périmètres hydro-agricoles pour que je leur explique le fonctionnement de mon travail dans le but de réguler l’irrigation des cultures. Je leur ai également enseigné qu’il fallait tenir compte d’un paramètre qui était l’évaporation en raison d’environ 1 cm par jour. Pendant cette formation à ces hommes de niveau bac, j’avais l’impression de parler hébreu. Nous avions fait des travaux pratiques, pour que tous assimilent la lecture Continuer la lecture de Aventure en Afrique (23)

La chute du globe (intégral)

temps de lecture : 9 minutes 

Couleur café n°35

La chute du globe

La Coupole,
102 Bd du Montparnasse,
PARIS 14

LES FAITS
Mercredi 24 août 2022, peu après 18 heures, le globe de verre de l’un des lustres qui assurent l’éclairage de la terrasse de La Coupole s’est décroché de sa suspension. Il s’est fracassé au sol à toute proximité d’une cliente en dispersant aux alentours un grand nombre de débris de verre acérés. Cet incident n’a causé aucun blessé. Les débris ont été balayés et l’activité normale a repris. Quelques minutes plus tard, un groupe de huit américaines s’est installé en terrasse pour diner. Tout ce qui précède est parfaitement véridique, mais pour la suite, c’est pas certain.

ROBERT DE MONTESSORI, poète, essayiste
J’étais seul, l’autre soir, à la terrasse de La Coupole. C’était pendant cette période où il faisait si chaud à Paris que, ce jour-là, lors de ma promenade vespérale, je n’avais eu ni le courage ni la force de parvenir jusqu’à la Closerie des Lilas pour m’y rafraichir d’une Continuer la lecture de La chute du globe (intégral)

La chute du globe (2/2) (Couleur café n°35)

temps de lecture : 4 minutes 

Couleur café n°35 (suite)

(…) La Coupole par ci, La Coupole par là… et c’est là que venait Untel ! et aussi Machin, avec Unetelle de temps en temps ! Mais je les connais pas, moi tous ces gens ! Et à supposer que je les connaisse, ils sont pas là aujourd’hui, non ? Alors, qu’est-ce que ça peut me faire à moi, Untel, Machin et Machine ? Té, regarde plutôt : on arrive, tranquilles, Gandolfi et moi, on devise gentiment, et POF BALINGBLINGBLING! , on manque de se faire assassiner ! Alors tout ce que je vois moi, c’est qu’à la Coupole, il vaut mieux y venir casqué !

Seconde partie

GINA VAN PARABOUM,  modèle
Mince alors ! Heureusement que je ne me suis pas mise là-bas, dis-donc ! J’en suis toute retournée… Déjà que j’ai un pansement sur le nez… Ç’aurait été le pompon si j’avais pris ce truc sur la tête ! Quand je vais raconter ça à Océane !… Elle voudra plus venir ici… Mais que je suis bête, moi ! Mais faut que je change de place : je suis juste dessous la lampe d’à côté. La même, exactement la même ! Si ça se trouve, Continuer la lecture de La chute du globe (2/2) (Couleur café n°35)

La chute du globe (1/2) (Couleur café n°35)

temps de lecture : 5 minutes 

Couleur café n°35


La chute du globe

La Coupole,
102 Bd du Montparnasse,
PARIS 14

LES FAITS
Mercredi 24 août 2022, peu après 18 heures, le globe de verre de l’un des lustres qui assurent l’éclairage de la terrasse de La Coupole s’est décroché de sa suspension. Il s’est fracassé au sol à toute proximité d’une cliente en dispersant aux alentours un grand nombre de débris de verre acérés. Cet incident n’a causé aucun blessé. Les débris ont été balayés et l’activité normale a repris. Quelques minutes plus tard, un groupe de huit américaines s’est installé en terrasse pour diner. Tout ce qui précède est parfaitement véridique, mais pour la suite, c’est pas certain.

Première partie

ROBERT DE MONTESSORI, poète, essayiste
J’étais seul, l’autre soir, à la terrasse de La Coupole. C’était pendant cette période où il faisait si chaud à Paris que, ce jour-là, lors de ma promenade vespérale, je n’avais eu ni le courage ni la force de parvenir jusqu’à la Closerie des Lilas pour m’y rafraichir d’une coupe Continuer la lecture de La chute du globe (1/2) (Couleur café n°35)

Photos-souvenir – 16

 Par Lorenzo dell’Acqua

J’ai toujours détesté les mandarins et surtout le professeur Milliez, un médecin de gauche vénéré dans les années 68., dont on faisait semblant d’ignorer qu’il prenait les pires honoraires de Paris. Les derniers temps où j’exerçais à l’hôpital, mon activité principale consistait à obtenir des externes et des internes qu’ils retirent leurs mains de leurs poches, qu’ils ferment leurs blouses ouvertes sur des tee-shirt douteux, et qu’ils ne ricanent pas pendant la visite. Le comble fut atteint le jour où l’un d’entre eux entra dans la chambre d’un malade avec une tasse de café en plastique à la main. Là, je me suis dit que quelque chose avait changé. A la fin de ma carrière, il était devenu impossible de distinguer un brancardier d’un interne en médecine à la cafétéria. Signe des temps, là encore.

 

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Les fausses morts de Coriolan du Vannage (intégral)

temps de lecture : 6 minutes 

Et pour ceux qui n’auraient lu leur journal ni hier ni ce matin, voici, en intégral, « La fausse mort de Coriolan du Vannage ».

Couleur café n°34

Les fausses morts de Coriolan du Vannage

 Val Café
39 boulevard de Port Royal

C’est la première fois que je viens m’asseoir à la terrasse de ce café. À cette heure de la journée, elle est encore à l’ombre, mais dans une heure, les rayons du soleil couchant finiront par trouver l’enfilade du boulevard pour inonder la terrasse du Val Café.
C’est plutôt étrange que je n’aie jamais fréquenté le Val Café alors que j’ai presque toujours habité ce quartier. J’ai même passé les onze ou douze premières années de mon existence au numéro 20 de ce même boulevard, sur le trottoir d’en face, un peu plus bas, vers Les Gobelins. Mais à cette époque, je ne fréquentais pas encore les bistrots.
Le patron vient de m’apporter la bière pression que j’ai commandée. J’ai dû lui faire répéter trois fois Continuer la lecture de Les fausses morts de Coriolan du Vannage (intégral)

Les fausses morts de Coriolan du Vannage (2/2) (Couleur café n°34)

temps de lecture : 3 minutes 

Couleur café n°34 (suite)

L’air affable et apitoyé tout à la fois, je m’approchai de la scène et dis :
— Pauvre petite bête, avec cette chaleur et à son âge, elle doit être épuisée …
Je parlais du chien, bien entendu, et d’ailleurs la dame ne s’y méprit pas une seconde puisqu’elle me répondit :
— Pensez-vous ! Il veut seulement que j’aille à la boulangerie d’en face !
Il y avait effectivement, en face, une boulangerie, mais je ne crus la dame qu’à moitié et je passai mon chemin.

Et voilà qu’aujourd’hui comme il y a quinze jours, je la retrouve dans la même situation. Moi qui connais bien le quartier, je sais qu’il n’y pas de boulangerie à moins de cinq cents mètres du Val Café. Et pourtant, la bête est allongée sur le flanc, la laisse est tendue, la femme exaspérée. La femme parle à la bête, mais d’où je suis, je ne peux entendre ce qu’elle dit. Le patron du Val est sorti sur sa terrasse ; il s’est planté à côté de ma table et, les bras croisés, souriant, il contemple la scène. Ça y est, la rue a trouvé son spectacle et les passants affairés, les promeneurs solitaires, les usagers de la RATP, les bougnats de Paris et les consommateurs de Jupiler vont oublier pour quelques instants les soucis qui les occupent ou le vide qui les habite. Ils auront quelque chose à raconter ce soir.

A présent, la femme a pris la position du Continuer la lecture de Les fausses morts de Coriolan du Vannage (2/2) (Couleur café n°34)

Les fausses morts de Coriolan du Vannage (1/2) (Couleur café n°34)

temps de lecture : 3 minutes 

Couleur café n°34

Les fausses morts de Coriolan du Vannage
première partie 

 Val Café
39 boulevard de Port Royal

C’est la première fois que je viens m’asseoir à la terrasse de ce café. À cette heure de la journée, elle est encore à l’ombre, mais dans une heure, les rayons du soleil couchant finiront par trouver l’enfilade du boulevard pour inonder la terrasse du Val Café.
C’est plutôt étrange que je n’aie jamais fréquenté le Val Café alors que j’ai presque toujours habité ce quartier. J’ai même passé les onze ou douze premières années de mon existence au numéro 20 de ce même boulevard, sur le trottoir d’en face, un peu plus bas, vers Les Gobelins. Mais à cette époque, je ne fréquentais pas encore les bistrots.
Le patron vient de m’apporter la bière pression que j’ai commandée. J’ai dû lui faire répéter trois fois la marque de la bière. Trois fois il me l’a dite en grommelot aveyronnais, ni aimable, ni hostile, juste auvergnat. J’ai fini par comprendre : Jupiler, une bière du Nord, blonde, dorée, légère, une Belge comme on les aime.

C’est la première fois que je viens au Val Café, mais cette femme, là-bas, ce n’est pas la première fois que je la vois. Blonde, elle aussi, Continuer la lecture de Les fausses morts de Coriolan du Vannage (1/2) (Couleur café n°34)