Archives par mot-clé : Rendez-vous à cinq heures

Rendez-vous à cinq heures avec le passé

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LE SILENCE DES PARENTS 

Mon cher Philippe,

Bien que le passé ne t’intéresse pas et que le présent ait des raisons de te préoccuper, j’aimerais que tu soumettes un jour aux lecteurs de ton blog cette question que je me pose tous les jours. Leurs réponses me seraient utiles.

Je suis né en 1950 et, bien qu’on n’en parlât jamais, la guerre terminée depuis quatre ans était encore omniprésente à notre insu. Par crainte de je ne sais quelle restriction, on ne mangeait jamais de pain frais, on finissait d’abord le pain rassis de la veille. C’était une des obsessions de ma mère héritées des années de privation dont je ne pouvais pas comprendre pas la raison. Nous étions heureux, ou plutôt nous n’étions pas malheureux, même si nous, les enfants, ne le savions pas.

Avec le temps, le silence de mes parents est devenu pour moi une énigme à laquelle je ne trouvais aucune réponse. Eux n’avaient jamais rien fait de mal, j’en suis convaincu, ce qui exclut déjà cette explication à leur attitude. Alors pourquoi ne nous ont-ils jamais parlé de la guerre et de leur vie pendant la guerre ? Cette interrogation Continuer la lecture de Rendez-vous à cinq heures avec le passé

Rendez-vous à cinq heures avec une façon d’aimer

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Critique littéraire
par Lorenzo dell’Acqua
Une façon d’aimer
Dominique Barberis, 2023

A la différence de Modiano, D. Barberis, l’auteur du roman « Une façon d’aimer », ne se nourrit pas de bribes de souvenirs mais de bribes de témoignages. Son imagination comble les vides pour inventer une histoire cohérente alors que celles de Modiano restent toujours floues. Son roman, plus proche de Maupassant, est criant de vérité en particulier sa description de la vie coloniale en Afrique à la fin des années cinquante ; on s’y croirait.

 « Une façon d’aimer » est une histoire banale comme en vivent beaucoup de gens dont on n’entendra jamais parler et qui ne seront jamais des héros. Aux yeux de son auteur, ils le sont autant que Madame Bovary. Ses personnages obscurs, pour ne pas dire quelconques, ressentent un jour la même chose que les personnages de romans : la passion. D. Barberis nous dit que la passion existe aussi chez ceux qui, intellectuellement, culturellement, socialement, n’en sont pas les protagonistes classiques. Elle redonne leurs titres de noblesse à tous ceux qui ont connu pour de vrai ce que les romans racontent pour de faux. Eux, ils l’ont vécue, ils en ont souffert et parfois ils en sont morts. Qui le dit, qui le raconte, qui le sait ? C’est surement une de ses qualités de réussir à intéresser les lecteurs à des gens banals dont l’histoire n’est exceptionnelle Continuer la lecture de Rendez-vous à cinq heures avec une façon d’aimer

Rendez-vous à cinq heures au Small Horse Shoe

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Retour au Petit Fer à Cheval
par James Redwood
traduction de Jim

Mon véritable nom est James Redwood. Je suis scénariste à la BBC mais l’histoire que je vais vous raconter aujourd’hui en 1957 n’est pas une fiction mais une histoire bien réelle. Elle débute en 1942 à Paris où je me trouve sans autres papiers d’identité que mon passeport anglais car nous les sujets aujourd’hui de sa Majesté la Reine Elisabeth – tout comme en 1942 lorsque j’étais sujet de sa Majesté le Roi George VI – n’avons pas de carte d’identité comme vous autres les français. J’aurais sacrément voulu en avoir une, française, le 16 Mai 1942 comme celle détenue par Dieter Wiegenfeld, mais pourquoi donc après tout puisque à l’époque je ne parlais pas plus de trois mots en français. Vous vous questionnez, hein? comment se fait-il que je sache que Dieter Wigengeld en détenait une ? Voilà l’histoire.

Le 16 Mai 1942, j’étais assis à la terrasse Au Petit Fer à Cheval dans le coin Continuer la lecture de Rendez-vous à cinq heures au Small Horse Shoe

Rendez-vous à cinq heures avec Paddy

 

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Comme suite aux articles d’hier et avant-hier, Paddy voudrait qu’on l’appelle Didier. 

Appelez-moi Didier, Didier Viguier. C’est mon nom quand je me promène à Paris en vêtements civils, des vêtements parisiens que j’ai acheté À la Samaritaine quand je suis arrivé à Paris il y a un an, le 16 mai 1941. Dans une semaine, le 23 mai, ce sera mon vingt-deuxième anniversaire et mon jour de fête, celui des Didier, les souhaités selon l’origine de ce prénom. Mais je ne serai plus à Paris pour fêter ce double événement car je serai en route pour le front de l’Est. Pourquoi ? J’y viendrai plus loin mais en attendant voici une première explication. C’est parce que mon vrai nom est Dieter Wiegenfeld, je suis allemand, mais pour les français seulement je suis Didier Viguier. Je me suis attaché à ce nom, un viguier en vieux français était un petit juge local, une profession à laquelle je me destinais quand je faisais mes études de droit à Heidelberg.

J’aime amoureusement Paris. À chaque moment de permission qui me libère de la Kommandantur où je suis affecté je visite tous les quartiers de la ville. Il ne m’a pas été difficile de me procurer à la Kommandantur de faux papiers d’identité français au nom de Didier Viguier. Dans tous les quartiers de Paris, que ce soit à Ménilmontant, à la Butte aux Cailles ou à Saint Germain des Prés, je me sens bien, j’aime parler avec les gens Continuer la lecture de Rendez-vous à cinq heures avec Paddy

Rendez-vous à cinq heures à bicyclette

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GIANT
par Lorenzo dell’Acqua

Dans mes souvenirs d’enfance, la bicyclette n’était qu’un jouet. Mon premier vélo m’avait été offert pour l’anniversaire de mes sept ans et ce n’est pas ma chute avec une fracture du bras qui m’empêcha de continuer à en faire toute ma vie. Aujourd’hui encore, il me donne un plaisir infini et une incroyable sensation de liberté.

Chez ma tante à Dreux, j’eus par la suite un « routier » bleu, une sorte de vélo de course avec de gros pneus et des garde-boue, l’ancêtre des VTT, sur lequel je sillonnais sans plaisir cette sous-préfecture sans charme. A Tharon-Plage au bord de l’Atlantique où je passais les vacances d’été, un vélo de course récompensa mon succès au BEPC avant d’être remplacé par un solex. Continuer la lecture de Rendez-vous à cinq heures à bicyclette

Rendez-vous à cinq heures avec les souvenirs

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Aimer Modiano

Chaque fois que nous évoquons un souvenir, nous le modifions.

Sa profession médicale et les hasards de la vie nous firent nous retrouver par hasard cinquante ans plus tard. Nous parlâmes de cette époque avec nostalgie. Comme j’évoquais ma passion pour Patrick Modiano, elle me demanda si je me souvenais de la soirée passée chez Dominique Zerhfuss, une de ses amies d’enfance et future femme de l’écrivain. Dans son souvenir, il s’agissait d’un magnifique appartement du quai Anatole France donnant sur la Seine et les Jardins des Tuileries où nous étions allés ensemble. Je suis absolument certain n’y être jamais allé et, d’ailleurs, je n’ai pas non plus le moindre souvenir de Dominique Zerhfuss. Lisant ce soir une biographie de Modiano, je m’aperçois qu’il s’est marié en septembre 1970. Continuer la lecture de Rendez-vous à cinq heures avec les souvenirs

Rendez-vous à cinq heures pour la revanche

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À CHARGE DE REVANCHE !
par Patrick

Il n’y a pas de rubriques sportives dans le JDC qui se veut être depuis sa création il y a 10 ans un journal culturel. Il était temps que cette anomalie soit corrigée une fois au moins alors que la finale  du championnat du monde de rugby à XV vient de consacré à Paris son vainqueur: C’est l’Afrique de Sud et c’est pas la France, tant espérée. De profundis!
J’aime le rugby à XV, en spectateur je précise, dont on dit que c’est un sport de voyous joué par des gentlemen avec un ballon oval, inventé en Angleterre à Rugby. Deux équipes de 15 joueurs se disputent ce ballon oval dans un jeu brutal. Les règles du jeu sont strictes, ce qui nécessite la participation d’un trente-et-unième joueur sur le terrain, dit l’arbitre, pour faire respecter les règles de façon loyale et infaillible. Loyale? Infaillible? Pas sûr! C’est ce que je vais tenter d’illustrer dans l’histoire qui a pour titre :

À CHARGE DE REVANCHE !

Comme tous les français, amateurs de rugby ou non, j’espérais que le match final du championnat du monde 2023 organisé en France opposerait l’équipe de France, « les Bleus », à l’équipe Continuer la lecture de Rendez-vous à cinq heures pour la revanche

Rendez-vous à cinq heures avec Laurent

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Mon prénom

Bien que je l’aie longtemps détesté, je suis aujourd’hui convaincu que le plus beau cadeau de mes parents, c’est lui.

Dans mon enfance, j’étais complexé de m’appeler ainsi : mon prénom Laurent avait une consonance désagréable et je le trouvais excentrique. A ce handicap s’en ajoutait un autre et tous les deux s’associèrent dans mon ressentiment. Était-ce la nature ou ma mère, je ne le saurai jamais, qui m’affublèrent d’une coiffure déjà ridicule à cette époque : la brosse. A l’école communale de la rue Boulard, personne d’autre que moi bénéficiait de ces deux attributs dévalorisants. Et, n’en déplaise à certains, j’étais bien trop ignorant de l’actualité pour que mon prénom puisse m’évoquer à cette époque, et même dans mon inconscient, une ville d’Algérie tristement célèbre. Continuer la lecture de Rendez-vous à cinq heures avec Laurent

Rendez-vous à cinq heures en auto-stop (3)

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Bernard Schaefer a beaucoup pratiqué l’auto-stop. Il nous fait part de quelques unes de ses expériences. En guise de troisième, voici la première :

27 janvier 1941

C’est très tôt que j’ai eu l’expérience de ce que l’on nomme aujourd’hui le covoiturage. A vrai dire, ce fut avant même ma naissance. En ce jour du 27 janvier 1941, il neigeait en Lorraine et plus particulièrement sur la ville de Metz. Aussi, les transports publics étaient-ils à l’arrêt : pas de bus ni de tramway avant que les chaussées soient déneigées ou sablées.

Or ma maman était sur le point de mettre au monde le bébé qui allait naître, à savoir moi. Il fallait l’emmener à la maternité de l’hôpital dès que possible. Mon futur papa n’avait pas encore Continuer la lecture de Rendez-vous à cinq heures en auto-stop (3)

Rendez-vous à cinq heures à la pharmacie

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Numéro 048
par Lorenzo dell’Acqua

Canicule oblige, je portais alors une robe si légère qu’elle ne m’avait pas permis de garder mon soutien-gorge. A cinquante ans passés, l’indécence de cette frivolité ne risquait pas de provoquer un scandale. Jeune, j’avais été une Louise Brook blonde aux yeux verts fort courtisée qui conservait aujourd’hui de beaux restes arrondis par un léger embonpoint. Pharmacienne dans une station balnéaire agréable, je n’étais pas malheureuse mais, ce matin-là, ma tenue aguichante m’avait donné à la fois l’illusion d’être encore désirable et une nostalgie un peu volage.

Le chiffre qui s’affichait là-haut sur l’écran était identique à celui inscrit sur le petit papier blanc qu’il me tendait. C’était donc bien son tour.

— Numéro 048, merci de me montrer votre ordonnance Continuer la lecture de Rendez-vous à cinq heures à la pharmacie