Archives mensuelles : juin 2017

Au petit fer à cheval

temps de lecture : 4 minutes 

Couleur café n°22

 Au petit fer à cheval
30 rue Vieille du Temple Paris 4°

Je ne suis jamais allé dans ce café, et rarement dans cette rue. Le 4ème, ce n’est pas mon quartier. Ce n’est pas que je ne l’aime pas ou que je le méprise ou même qu’autrefois, je l’aie trouvé trop décrépit et aujourd’hui trop bobo, trop « touriste », mais je ne le connais pas et, comme disait Boubouroche, je n’y ai pas mes habitudes.

Pourtant cette photo, prise 16 mai 2017 à onze heures quarante-trois, pourrait bien me donner envie d’en créer, des habitudes.

Regardez-là attentivement. Agrandissez-là au besoin :

Remarquez d’abord les vélos : depuis que la rue a été interdite à la circulation, on ne voit plus que ça, par ici. Remarquez aussi les deux calorifères de terrasse, rangés sur le côté pour le moment, car il fait beau et doux. On ne voit plus que ça aujourd’hui : vélos, terrasses et calorifères, c’est tout le Marais ! Mais maintenant, passons aux choses sérieuses :

Vous voyez ces Continuer la lecture de Au petit fer à cheval

A la campagne entre amis

Morceau choisi

C’est pourquoi aussi le monde que satirise Proust est loin d’être suranné. Aujourd’hui certes, il n’y a plus guère de salons : ils ont été remplacés par les maisons de campagne ; et les « matinées » ont fait place aux week-ends. Mais sous le pull-over à col roulé comme jadis sous l’habit, c’est le même « cœur révélateur » qui bat. Sous le toit tourangeau ou normand la même conversation se poursuit, les mêmes lieux communs déguisés en paradoxes ; la même affectation de naturel et d’innocence couvre des gestes et les intonations également mécaniques, et c’est la même certitude sous-entendue d’être l’unité d’étalonnage de l’art de vivre, le centre des choses à partir duquel s’échelonne et décroît en s’éloignant la valeur du reste des humains, mesurée à sa ressemblance plus ou moins fidèle avec la petite assemblée qui regarde, ce soir, le feu de bois si discrètement fier d’être si elle-même. Enfin, c’est aussi la même précipitation de prévenance militante dans les détails, superposée à l’incivilité foncière, c’est l’invasion des gentillesses minuscules, des petits cadeaux stupides, des téléphonages superflus côtoyant la sécheresse et l’égoïsme.

J-F Revel « Sur Proust » -1960

 

Le revolver

Marie-Claire

Le vent a bousculé les pages et j’ai perdu le fil de l’histoire, l’histoire de Lisa. J’ai reposé le cahier rouge, fermé les yeux et reconstitué à ma façon ce qu’elle y révélait de sa vie.

Sa triste enfance, elle la voit comme une tempête ponctuée de coups : ceux que son père lui assène, ceux que ses frères se donnent et auxquels elle n’échappe pas non plus. Cette violence la terrorise et elle tente de la fuir en rêvant.

Elle se décrit comme une chétive gamine à lunettes. Mais à l’adolescence, elle se transforme et apprend consciencieusement à faire d’elle une jolie femme. Elle abandonne ses lunettes, préférant voir un monde flou pour que ce monde la remarque. Son ambition s’est éveillée, pour fuir toutes ces violences, elle sera belle donc enfin aimée.

Et Simon apparaît. Il a une belle voiture, porte des chemises à son chiffre, la sort, la cajole : elle est folle de lui, on l’aime enfin. Elle s’installe avec lui et une vie dorée commence. Heureuse, elle a un homme à elle, un vrai, un solide qui la protège. Personne ne lui fera plus de mal.

Une seule chose l’inquiète, Simon Continuer la lecture de Le revolver