Archives mensuelles : mai 2016

Samedi à la campagne

Quand je descendis du train à la gare de Martel-sur-Seine, je me demandais encore pourquoi il m’avait invité.

Je l’avais rencontré au début de la semaine dans le TGV. Il s’était assis sur le siège qui me faisait face. Il avait tout de suite engagé la conversation et pendant la première demi-heure du trajet, nous avions tenu la discussion habituelle, celle que tiennent deux inconnus réunis par le hasard et destinés à se séparer un peu plus tard et pour toujours sur le quai d’une gare. Et puis, il m’avait proposé d’aller prendre un whisky au bar. Et à partir de ce moment, il n’avait plus parlé que de lui, de ses affaires, de sa femme Françoise, de ses enfants, de sa voiture, son chien, ses chasses, sa propriété en Seine-et-Marne. Alors que le train ralentissait pour entrer dans Paris, il m’avait dit:

       -Vous êtes célibataire, vous m’avez avoué tout à l’heure que vous aimiez la campagne et que le week-end vous n’avez rien de particulier à faire. Venez donc chez moi, enfin chez nous, à Martel samedi prochain. Vous verrez, c’est très agréable. Le train du samedi est très pratique, il arrive là-bas à onze heures quinze.

Le bonhomme était plutôt sympathique, et il m’avait parlé de chevaux de selle. J’adore le cheval et, faute de moyens, je n’ai pas souvent Continuer la lecture de Samedi à la campagne

¿ TAVUSSA ? (9)

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Une traversée de Paris

Il est cinq heures.
Le jour se lève.

Au Bomby’s café de la Place d’Italie, un homme noir en bleu de travail immaculé est accoudé au comptoir devant une tasse de café vide. Son grand corps mince est entièrement relâché et sa silhouette forme une sorte d’immense S. Son regard est ailleurs.

Un chien affairé remonte en trottinant le boulevard Auguste Blanqui. Il connaît les jours et les heures du marché Corvisart. Un camion s’arrête pour le laisser passer.

Il est huit heures.

Rue Gay-Lussac, une femme noire, inquiète et fatiguée, cherche désespérément la rue d’U.L.M. Elle entre au café pour demander son chemin. Ici, on ne connaît que la rue d’Ulm. C’est déjà ça.

Rue Saint-Jacques, il y a Continuer la lecture de Une traversée de Paris

Glücklich wie Gott in Frankreich !

Curieusement, les allemands ont repris cette vieille expression yiddish, née au 19ème siècle.
Glücklich wie Gott in Frankreich !
Heureux comme Dieu en France ! 
Mais pourquoi donc Dieu serait-il heureux en France ?

Saul Bellow (1915-2005), écrivain américain, avait son idée. La voici :

« Dieu serait parfaitement heureux en France parce qu’il n’y serait pas dérangé par les prières, rites, bénédictions et demandes d’interprétation de délicates questions diététiques. Environné d’incroyants, Lui aussi pourrait se détendre le soir venu, tout comme des milliers de Parisiens dans leur café préféré. Peu de choses sont plus agréables, plus civilisées qu’une terrasse tranquille au crépuscule »

C’est beau comme du Vialatte !

Les mousserons de Massiac

L’automne a semé dans l’herbe rase des pieces de monnaie aux reflets dorés, attendant le Petit Poucet courant la campagne.
Les moutons de « La Marthe » sont passés par là !
Les mousserons feront dans la poêle baveuse le bonheur de Mère Gtand’, ou sur le fil attendront l’omelette gourmande.
La canne en main, solitaire, le Grand-Père Édouard aimait découvrir ces chapelets de Sainte-Madeleine, retrouvant l’air pur de sa jeunesse et un peu de liberté.
Les moutons de La Marthe ont fumé cette terre maigre où le vent des plateaux déplie le profond de vous-même et vous grise.
Jadis, sonnait la cloche de la chapelle sous l’ardeur de nos impulsions juvéniles; elle tinte encore dans nos souvenirs, comme un air de fête et d’insouciance. Heureux les élus qui s’attachent aux bruits présents du passé.
Les alouettes s’envolent et leur cri traverse les champs sous le sifflet du vent.
Les murets de pierre volcanique cloisonnent le plateau comme en Bretagne celte.
Un trou d’eau abreuve le troupeau du cousin Soubrier, quand le soleil ne l’a point asséché.
Au loin, sur le flanc des collines, l’autoroute trace une saignée bruyante, taxe de modernité, qualifiée d’embellie économique pour le village. Les premiers hommes sont passés par là !
Mais le plat de champignons sauvages gardera pour toujours ce relief cher au palais du ramasseur !

Lucien Claveirole
Aix, le 21 août 2002

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