Archives par mot-clé : Rome

Grand tourisme

Le poème qui suit a déjà été publié le 5 juillet 2018 sous le titre
 Les valises à roulettes.

Les achélèmes de Costa accostent au quai d’ Ostie.
Les réacteurs faciles encombrent da Vinci.
Le Grand Raccord Annulaire est pris en masse.
Les valises à roulettes ébranlent les pavés de Rome.

Couples âgés de touristes
cheveux blancs mais tenue de sport
ils sont encore en forme
et parcourent la ville en se tenant la main.

Touristes en troupeaux
derrière le parapluie rouge replié de leur guide
abrutis de fatigue, de pavés noirs et de culture
ils ingurgitent Auguste juste avant Michel-Ange
et confondent déjà le Colisée et le Capitole.

Jeunes gens en bandes, ou par deux Continuer la lecture de Grand tourisme

Octobre au Trastevere

Déjà diffusé en octobre 2015 !

Piazza Santa Maria In Trastevere, Rome

Soleil, ombre et fraîcheur. Calme.

La place est carrée, pas trop grande, et seulement quatre rues étroites y conduisent. Comme presque toutes les places de la ville, elle réunit les époques et les couleurs de Rome : une fontaine romaine, une église médiévale, un palais presque renaissance et deux ou trois immeubles XVII et XVIIIème.

L’endroit n’est pas très fréquenté par les groupes de touristes : pratiquement inaccessible aux autocars, il n’y a que deux restaurants, un café, un kiosque à journaux, et pas un seul commerce.

Pourtant, quelques touristes isolés croisent dans les parages, prennent une photo, entrent et sortent de l’église, s’installent pour un café ou un déjeuner. Une bande de jeunes gens, romains et étrangers, rient sur les marches de la fontaine. Une vielle femme arcboutée sur une poussette traverse rapidement la place et les pavés noirs font trembler les joues de l’enfant qu’elle ramène à la maison. 1165-PIAZZA STA MARIA IN TRASTEVEREUn serveur de restaurant, debout les bras croisés devant sa terrasse, discute au soleil avec un homme en tablier gris. Un triporteur des services de nettoyage traverse bruyamment la place à vive allure, suivi d’une petite fumée bleue, et disparait dans l’ombre d’une ruelle.

Nouveau calme.

Deux femmes Roms sortent de l’ombre Continuer la lecture de Octobre au Trastevere

Ritorno al passato, ancora

Ce seizième « Couleur café » a été publié il y a un peu plus de cinq ans, à l’heureux temps où le tourisme avançait à grand pas et à visage découvert sur la Piazza della Rotonda de Rome et sur celle du Panthéon à Paris. C’était aussi l’époque où les selfies demeuraient assez rares pour qu’on les remarque. Ah ! l’heureux temps !

Ritorno al passato
Café Ritorno al Passato
Piazza della Rotonda

Depuis des décennies, je viens sur cette place. Au soleil, à l’ombre, le matin , le soir, je l’aime. Elle rassemble toutes les couleurs de Rome. Le noir des pavés, le gris foncé du Panthéon, le bleu ciel du ciel, le bleu délavé de la façade de chez Di Rienzo, l’ocre de l’Albergo Abruzzi, le bistre, le jaune, toutes les teintes possibles de marron, la perfection de la patine. Mais aussi le rouge terne des capes des centurions qui font le tapin pour une photo, le rouge vif de la veste des serveurs du café Ritorno al passato, le noir chic de la veste des serveurs d’en face. Mais encore, les couleurs des anoraks, des laines polaires et des survêtements de la moitié des touristes de la terre, bleu roi, jaune serin, vert pomme, rose fuscia, orange travaux publics. L’élégante banane ne se porte presque plus, remplacée par le pratique sac à dos mou du citadin prévoyant et du touriste pragmatique.

Tout ça, je l’ai vu ici mille fois. Mais ce qui est nouveau, Continuer la lecture de Ritorno al passato, ancora

Ah ! Les belles boutiques – 30

Drogheria
Via del Portico d’Ottavia, 33
Rome

En plein cœur de Rome, la façade de cette épicerie, gravée d’inscriptions antiques en frontispice, n’a rien d’exceptionnel. Elle est seulement typique des commerces du Centro Storico. Cette Drogheria fait aussi office de bar et de restaurant.

La série « Ah ! les belles boutiques »
L’objectif : rendre hommage aux commerçants qui réussissent à conserver l’aspect traditionnel de leur façade de magasin, et les encourager à persévérer.
Le contenu : une photo de la devanture d’un magasin, avec si possible l’adresse et, très éventuellement, un commentaire sur la boutique, ou son histoire, ou son contenu, ou sur l’idée que s’en fait le JdC.

ET DEMAIN, LE QAnon (TAVUSSA  47)

 

Les valises à roulettes

Rome
dépêchez-vous d’y aller
avant qu’il ne soit trop tard
ou qu’il n’y fasse trop chaud

Les achélèmes de Costa accostent à Ostie.
Les réacteurs faciles encombrent da Vinci.
Le Grand Raccord Annulaire est pris en masse.
Les valises à roulettes ébranlent les pavés de Rome.

Couples âgés de touristes à cheveux blancs mais à tenue de sport : ils sont encore en forme et parcourent la ville en se tenant la main.

Touristes en troupeaux, derrière le parapluie rouge replié de leur guide, abrutis de fatigue, de pavés noirs et de culture : ils ingurgitent Auguste juste après Michel-Ange et confondent déjà le Colisée et le Capitole.

Jeunes gens en bandes ou par deux, émerveillés par les rues et les couleurs, les cafés et les monuments : ils mangent des glaces, boivent du vin, achètent d’inutiles oiseaux en papier et portent sans effort leurs sacs et leurs bouteilles d’eau.

Romain à costume bleu marine, chemise blanche et cravate sombre : c’est un chauffeur de maître, un fonctionnaire ou un appariteur ou, mieux encore, un avocat qui rentre déjeuner  chez lui.

Romain à chemise grise au col Mao fermé et à serviette de cuir noir : c’est un prêtre qui vient du Canada et qui apporte les saintes huiles à un malade.

Romain à pantalon noir serré, chemise étroite et rayée, col largement ouvert : c’est un commerçant qui vit chez sa mère et qui est sorti draguer.

Romain en surpoids, barbu, au T-shirt boursouflé, au jean au bord de l’éclatement : ce n’est plus un romain.

Sur la place Navone, les peintres copient les uns sur les autres et la fontaine du Bernin attend la chute de Sainte Agnès.

Sur les marches d’Espagne, on se pose et on regarde la Barque flotter au milieu des calèches.

Sur la place de la Rotonde, à l’abri d’une fraîche terrasse, on regarde tous les petits hommes entrer au Panthéon.

Rue Condotti, elle est là, la belle Romaine, elle est là !

En haut du Capitole, on reprend son souffle sous le cheval de Marc Aurèle.

Depuis qu’elle a un ascenseur, la Machine à Écrire est devenue fréquentable.

Au Large de la Tour Argentine, les chats ont envahi le théâtre de Pompée et léché le sang de César.

Sur le Pont Saint-Ange, ils sont dix qui vous mènent au château, ou à la forteresse, c’est selon.

Dans l’au-delà du Tibre, les gitanes aux belles robes ont de faux airs, de faux bras, parfois de faux bébés.

Rome, unique objet…

Les valises à roulettes ébranlent les pavés de Rome.
Le Grand Raccord Annulaire est pris en masse.
Les réacteurs faciles encombrent da Vinci.
Les achélèmes de Costa accostent à Ostie.

Si vous ne connaissez pas bien Rome et que, dans ce texte, quelques bricoles vous ont échappées, ouvrez les commentaires ci-dessous. L’un d’entre eux vous donnera quelques renseignements utiles.

 

ET DEMAIN, UN AUTRE TABLEAU DE SÉBASTIEN

Retour sur la Piazza Navona – fin

temps de lecture : 3 minutes 

Troisième et dernière partie—Andrea Gnecchi-Rampa, marquis et collectionneur

Maintenant, la marée des touristes monte. Il en arrive de toutes les ruelles. Il y a les asiatiques serrés en paquet autour d’un parapluie-oriflamme sous autant de chapeaux en plastique tissé. Il y a les nordistes portant banane, vaste short ou pantalon corsaire distendu, tricot de corps, chemise flottante et Birkenstock. Il y a les provinciaux intimidés aux vestes sombres et aux jupes à fleurs, il y a des nuées de jeunes à sac-à-dos et bouteilles de plastique, des groupes de vieux, des essaims de bonnes sœurs…Ils se pressent autour des fontaines, s’extasient devant Sant’Agnese. Ils prennent des photos, des selfies, beaucoup de selfies. Ils regardent, hésitants, les cafés-restaurants. « C’est bientôt l’heure de déjeuner, mais ça doit être cher… » Sont arrivés aussi les colporteurs aux sacs informes, les marchands de lunettes de soleil aux éventaires de carton, les portraitistes, les musiciens… Il est encore trop tôt pour que la terrasse du Da Lorenzo se remplisse, mais c’est la fin du matin. Deux carabiniers passent en discutant et en fumant, les yeux au sol. A l’entrée de la place, une auto blindée s’arrête en travers d’une ruelle. Deux soldats en armes en descendent. Ils se postent Continuer la lecture de Retour sur la Piazza Navona – fin

Retour sur la piazza Navona – 2

temps de lecture : 3 minutes 

Si vous avez raté la première partie, CLIQUEZ ICI

Deuxième partie : Marco Ruscone, scootériste et dragueur

Le soleil s’est rapproché de ma table. Un serveur s’excuse de me déranger pour déployer le velum un peu plus. Penché sur mon clavier, je n’ai pas vu arriver le jeune homme qui me tourne le dos. Il est planté debout au milieu des jeunes américaines et il leur parle en anglais. Sa voix est agréable et son accent italien a beaucoup de charme. Il doit le savoir et il est en train d’en user autant qu’il le peut. Il dit que l’année prochaine, il devrait aller à Chicago. Il a un cousin là-bas. Aussitôt, deux des filles s’exclament qu’elles sont justement de Chicago. Il faudra absolument qu’il vienne les voir. Des adresses s’échangent… Je connais bien ce genre de dragueur romain ; il porte un pantalon ajusté et une chemise à manches courtes gris foncé ; il n’a jamais eu l’intention de s’expatrier et les adresses de Chicago ne l’intéressent pas. Ce qu’il veut, c’est savoir où toutes ces filles Continuer la lecture de Retour sur la piazza Navona – 2

Retour sur la Piazza Navona – 1

temps de lecture : 4 minutes 

1—Première partie : Enzo Martucci, retraité et promeneur de chiens

Et me voilà de nouveau sur la Piazza Navona. Cette place, je l’ai traversée des centaines de fois, sautant d’un pied sur l’autre pour éviter les scooters à l’époque où ils étaient encore autorisés, zigzagant entre les éventaires clandestins et les touristes avant qu’ils ne soient devenus trop nombreux. Mais ce matin, pour la première fois en quarante ans, je me suis assis à la terrasse de l’un de ses cafés. D’habitude, quand je suis à Rome, pour trainer aux terrasses, je préfère la Piazza della Rotonda ou la Via della Pace. Mais aujourd’hui, la Rotonda est envahie de touristes au point qu’on a dû réduire de moitié la surface attribuée au Café Di Rienzo, et on dirait bien que l’Antico Caffe della Pace est définitivement fermé. Alors, c’est sur la Piazza Navona, à la terrasse de Da Lorenzo, celle qui fait face à l’église Sant’Agnese in Agone, que je suis installé aujourd’hui. Il est dix heures du matin et les tables sont encore à l’ombre. Je n’ai rendez-vous que dans deux heures. La place est presque déserte.
Les tables voisines sont occupées par des jeunes filles. Elles mangent des glaces ou boivent des Coca-Cola. Américaines, seize, dix-sept ans, longs cheveux, souvent blonds, shorts courts en jean élimé, voix hautes, gaies, jeunes. Américaines. Est-ce ce qui m’a fait choisir cette terrasse plutôt qu’une autre ?

Dix heures quinze. Un vieil homme apparait Continuer la lecture de Retour sur la Piazza Navona – 1

Ah ! Les belles boutiques – 23

Bar Toto
Via del Portico d’Ottavia, 2, Roma

En plein milieu du quartier juif de Rome, ce petit bar-restaurant est situé dans un immeuble qui doit dater de la Renaissance et dont les murs sont incrustés de pierres gravées et de petites statues. Elles proviennent sans aucun doute des ruines romaines voisines. En effet, le bistrot se trouve à quelques dizaines de mètres du Portique d’Octavie et du Théâtre de Marcellus, tous deux construits sous l’empereur Auguste, vers la fin du premier siècle avant J.C.
L’Octavie du portique était la sœur d’Octave, devenu Auguste, premier empereur romain. Quant au théâtre de Marcellus, c’est le plus ancien… Mais vous n’êtes pas venu pour ça. Pour ce qui est du bar lui-même, je ne peux rien vous dire de plus, je n’y suis jamais entré.

La série « Ah ! les belles boutiques »
L’objectif : rendre hommage aux commerçants qui réussissent à conserver l’aspect traditionnel de leur façade de magasin, et les encourager à persévérer.
Le contenu : une photo de la devanture d’un magasin, avec si possible l’adresse et, très éventuellement, un commentaire sur la boutique, ou son histoire, ou son contenu, ou sur l’idée que s’en fait le JdC.

 

ET DEMAIN, STAR WARS, CRITIQUE AISÉE N°110