Aventure en Afrique (43)

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Voir la mer (4)

Nous passons la frontière du Bénin, sans encombre,  à Grand Popo. Nous traversons ensuite la ville de Ouidah sans se douter que celle-ci avait un passé très douloureux. Les mémoriaux n’existaient pas encore et en particulier la célèbre  “Porte du Non-Retour”.
J’ai découvert plus tard qu’Ouidah avait été la plaque tournante de l’Afrique de l’Ouest du commerce triangulaire du XVéme au XVIIIéme siècle et avait vu passer des millions d’esclaves à destination des Amériques. Une histoire sombre qui a duré pendant 400 ans. (Cf. TV5MONDE)
Puis nous obliquions vers le nord jusqu’au lac de Nokoué, sur lequel est bâti depuis le début du XVIIIéme siècle la cité lacustre de Ganvié.
Nous prenions une pirogue pilotée par le guide. « Le fondateur de Ganvié, fuyant les enlèvements esclavagistes, arrive au bord du lac Nokoué avec ses proches en 1717. Il usa de magie pour sonder l’étendue et trouva une portion de terre. Comme les siens ne possédaient pas les mêmes pouvoirs que lui, il se transforma en crocodile. Il put les amener sur la minuscule terre repérée et y fonda ce village dont la signification en langue fon est “la communauté sauvé”. Depuis lors, le crocodile est vénéré par les habitants » (Cf.: Trésors du monde).

Des habitants nous ont dit que Ganvié avait vu le jour pour échapper à l’impôt ! Nous découvrions ce village, devenu ville, sans un arbre, entièrement construit sur l’eau. Le bâti repose tel des échasses, sur des pieux de bois particulier résistant à la destruction hydrique. Au-dessus de l’eau un plancher également en bois supporte l’habitat recouvert de chaume ou de tôle ondulée. Dans rues aquatiques tapissées de nénuphars  et de jacinthes d’eau, on y trouve toutes les activités, même un marché, l’ensemble se pratiquant en pirogues. La seule activité des hommes est la pèche: soit à l’épervier soit dans les champs aquatiques séparés par des barrières flottantes, où le poisson se développe. Le poisson est ensuite vendu à la capitale par les femmes. Les béninois disent des gens de Ganvié qu’ils “sont des poissons et non des hommes“ car ils savent tous nager; ils les désignent aussi comme “homme de l’eau“. Cette ville de 30000 habitants actuellement n’a toujours pas d’eau potable ni l’électricité.
Sur le chemin du retour nous longeons un cimetière aquatique.
Nous quittions “la Venise Africaine“, inscrite sur la liste indicative de UNESCO depuis 1996 et prenons la direction d’Abomey.
Abomey est une ville établie autour d’un ensemble de palais royaux où se sont succédé 14 rois. Royaume d’Abomey était le plus structuré et puissant d’Afrique de l’ouest, et dont la richesse provenait essentiellement de la traite négrière. Le premier roi fut Gangnihessou qui régna de 1600 à 1620. Le 7ème roi Tegbessou fournissait par an 9000 esclaves aux négriers de la côte. Ces esclaves étaient généralement des prisonniers provenant  de guerres tribales ou royaumes rivaux.  Ce sont les portugais qui ont mis en place ce commerce !
Nous nous garions à l’entrée du Palais; là nous découvrions un ensemble de constructions en ruine, sur une surface de 42ha à l’exception de deux entretenus transformés en musée (palais de Ghézo 1818-1858). Chaque roi avait bâti le sien. Un guide d’un certain âge nous demanda de bien vouloir déposer nos appareils photo dans une panière et nous faisait rentrer dans le musée.
Les éléments dont je me souviens :
– Les divers rois étaient en relation avec les nôtres. Ils se faisaient des cadeaux que nous avons pu voir, un service à liqueur en cristal offert par Louis XVI, un canon donné par Napoléon III. Le guide poursuit.
– A la mort du roi, pendant  la colonisation, les français ont recensé 700 femmes dans le harem. L’un d’entre nous demande : « Que sont-elles devenues ? Le guide nous précise « Elles se sont endormies avec lui ». Nous imaginions la scène !
– Le guide tient à nous dire que le harem était gardé par des eunuques. « Vous savez  ce qu’est un eunuque ? » Nous le savions tous. « He bien je vais vous l’expliquer. Un eunuque c’est comme un transistor auquel vous avez enlevé les piles !».
– De 1708 à 1711 le royaume a été dirigé par la reine Agadja (une femme la première et dernière fois) qui a créé le corps des Mino, rebaptisé par  l’armée française comme étant “les Amazones”.
J’ai fait quelques recherches au sujet de cette garde personnelle, qui a fait l’objet d’un certain nombre de films. Cette légendaire armée, composée de 5000 femmes, la plupart vierges ou astreintes au célibat. « Elles étaient lancées dans la bataille pendant les moments difficiles pour faire fléchir les dieux du combat (Cf. L’Afrique des Idées). En 1894 ces femmes devant les 3000 soldats de l’armée française et leur fameux fusil Lebel ont dû abdiquer. Ont été aboli également au Dahomey la traite des esclaves et les sacrifices humains.
Abomey est aussi célèbre pour ses toiles, “les toiles d’Abomey”, représentant des animaux aux couleurs vives.

Nous quittions Abomey aux environs de midi et prenions la direction de Parakou. En bordure de route nous pouvions observer des champs de coton, entrecoupés par des aires de stockage, avec des tas de coton. Nous nous sommes précipités sur les tas comme nous l’aurions fait avec de la neige. Grande déception ! Il s’en échappait des nuages de poussière. Peu à peu le paysage change, plus de forêt ni de rivière mais de la savane. Nous nous sommes arrêtés à Parakou pour y passer la nuit, nous y étions six jours avant,  et obliquons vers le Togo. Le lendemain matin nous prenions le départ pour Malenville en repassant à Benbéréqué, Kandi.

A la sortie de Kandi : crevaison pour François, espérant que ce soit la dernière sur le trajet bien que le changement de roue soit devenu une simple formalité demandant quelque minutes pour l’accomplir. A 16h. nous passions la frontière et rendions nos lasser-passer comme demandé au départ. Nous étions de nouveau au Niger.
En fin d’après-midi nous arrivions à Niamey après avoir parcouru 3158km en 7 jours, un peu fatigués mais que de souvenirs !

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