Rendez-vous à cinq heures au P4

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P4

Depuis quelques semaines, on reparle très sérieusement du laboratoire P4 de Wuhan comme origine de la pandémie de la COVID 19,. Un élément supplémentaire qui vient appuyer cette théorie est le fait demeuré caché jusqu’à présent qu’un grand nombre de personnes travaillant au laboratoire avaient été malades en novembre 2019. 

Dans cet accident sanitaire, il y a un élément qui me parait particulièrement alarmant et qui met en doute la capacité de la Chine à gérer certaines crises technologiques. Et pour moi, cet élément n’est pas l’erreur initiale qui a permis la sortie du virus hors des enceintes de sécurité, mais la façon dont elle a été probablement traitée.. 

Un laboratoire P4 est susceptible d’abriter des micro-organismes très pathogènes. De ce fait, il est équipé de systèmes de sécurité très efficaces et de plusieurs niveaux d’enceintes de confinement qui sont destinés à protéger les personnes qui y travaillent et à éviter que les contaminations éventuelles ne se propagent à l’extérieur. Il n’existe qu’une cinquantaine de labo P4 dans le monde. 

Et voici ce que j’écrivais il y a un peu plus d’un an (Journal de Campagne n°50 du 5/06/2020)

(…) Une rupture de confinement dans un labo P4 est exceptionnelle, mais c’est un incident qui peut arriver. Et il est probablement arrivé.

Ce qui est incompréhensible, c’est que, une fois l’incident survenu, on ne soit pas parvenu à contenir la contagion à quelques dizaines de personnes et quelques centaines de mètres carrés.
Que la cause d’origine soit une défaillance matérielle ou une erreur humaine, l’organisation d’un P4 est telle qu’une défaillance humaine ou matérielle entraine le déclenchement d’une procédure de sécurité. Un P4 qui ne possède pas (ou ne possède plus) des automatismes de ce type n’est pas un P4 et doit être fermé.

Comment en est-on arrivé là ?
1- Erreur humaine et/ou défaillance d’un matériel ?
2- Absence d’aveu et/ou non détection des conséquences ?
3- Crainte de sanctions et/ou détection défectueuse ?
4- Hiérarchie monarchique et/ou maintenance défectueuse ?
5- Organisation générale défectueuse et/ou contournée.

Sur tous les points indiqués ci-dessus excepté le premier, on voit que la Direction est responsable, non pas de l’événement d’origine, mais de l’ampleur de ses conséquences.
Je ne connais ni la Chine ni les Chinois, enfin pas tous, mais je me suis laissé dire que, là-bas, le respect de la hiérarchie était supérieur à la volonté de transparence. Et qui d’autre que la Direction Générale du Labo de Wuhan aurait pu dissimuler si longtemps l’incident d’origine et ses conséquences ? Oui, qui donc, mis à part les supérieurs administratifs ou politiques de cette direction ?  Ou mis à part peut-être aussi le Ministre responsable de ce secteur d’activité ? Etc…

La vraie question n’est pas « La contagion est-elle partie du labo de Wuhan ? »
La vraie question, c’est « Pourquoi la contagion a-t-elle filé ? Pourquoi l’a-t-on laissé filer ? » (…)

Je pense que la cause de cette pandémie, qui jusqu’à présent a causé près de 4 millions de morts, n’est pas accidentelle mais qu’elle est culturelle. Les conditions sont donc toujours réunies pour que ce genre de catastrophe se reproduise, à tout moment, et dans tous les domaines techniques. 

Sur ce, passez une bonne soirée.  

Bientôt publié

27 Mai, 07:47 Jeudi 22 avril, à Paris
28 Mai, 07:47 L’examen de minuit
29 Mai, 07:47 Le Cujas – Chapitre 9 – Mattias Engen -Texte intégral

3 réflexions sur « Rendez-vous à cinq heures au P4 »

  1. @Guy et les autres: oui, vous pouvez généraliser! Durant les trois années et demi à la tête d’une entreprise entièrement chinoise (son management, son personnel, mais pas son actionnaire 100% américain) dans les années 1990, la phrase que j’ai la plus entendue, après la découverte d’une erreur ou d’une faute et de son responsable, c’est « maybe I made a mistake »!. « Maybe » était un mot rituel. Une proposition comme un aveu n’étaient jamais sûrs à 100%.
    PS: mon épouse et moi avons beaucoup aimé vivre cette expérience chinoise même si mon boulot était lessivant. À mon retour, j’aurais aimé écrire un livre racontant les multiples anecdotes inattendues mais j’ai abandonné cette idée. Toutefois, je dirai ici l’un de mes derniers souvenirs qui résume bien l’ensemble de tous les autres. Quelques jours avant mon retour en France, un vieil ami américain photographe dont j’ai fait la connaissance là-bas, vivant en Chine depuis longtemps et marié à une femme chinoise, m’a invité à une petite réception chez lui et me remettant un petit cadeau souvenir il m’a tenu le propos suivant: « Avez vous remarqué Jim que quand vous êtes arrivé en Chine, vous avez d’abord pensé que tout était simple et que vous auriez pu écrire un mémoire (il a employé l’expression universitaire « term-paper ») sur votre première découverte des relations professionnelles et sociales, mais qu’après une année passée il vous aurait été difficile d’écrire ces expériences sur une feuille de papier. Et aujourd’hui, après plus de trois années ici, seriez vous capable d’écrire une carte postale »? Il avait admirablement résumé mon expérience de la Chine.

  2. Pour avoir travaillé en Chine, en Maîtrise d’Oeuvre (Ponts de TGV), j’ai noté une terreur de la divulgation d’erreurs professionnelles ( signatures « oubliées ») et des obstacles pour accomplir ma tâche. (échelles « manquantes » pour inspecter…), mais je ne voudrais pas généraliser car mes missions étaient courtes.

  3. Mon expérience passée en Chine m’a enseigné qu’une erreur humaine n’est jamais improbable et que par ailleurs la première réaction du système, par exemple le service dans lequel elle a été commise, sera de cacher cette erreur aussi longtemps que possible.

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