La belle époque – Critique aisée n°179

Critique aisée n°179

La belle époque
Nicolas Bedos – 2019
Fanny Ardent, Daniel Auteuil, Doria Tillier, Denis Podalydes, Pierre Arditi,

Je n’aime pas beaucoup Nicolas Bedos. En fait, je veux dire que je n’apprécie pas le personnage : dandy en vogue, branché, sarcastique, méchant quand il est moqué, toujours prêt à lancer une vraie vacherie quelle que soit la victime pourvu que les rieurs soient avec lui, tout le côté systématique et déplaisant de l’esprit Canal +. Je situe Bedos un peu au-dessus de Thierry Ardisson et pas mal au-dessus  de Laurent Baffie, mais quand même, je ne l’aime pas énormément.

Ceci dit, je n’aime pas non plus Jean Michel Ribes et j’ai déjà écrit des choses pas très gentilles sur ce personnage. Ça ne m’empêche pas d’aimer ses spectacles et de le dire.

Bon, maintenant que je me suis décerné à moi-même ce brevet d’impartialité, je vais pouvoir entrer plus aisément dans ma critique.

Dans ce film, il y a deux couples. Le premier approche la septantaine : Lui, Victor (Daniel Auteuil), mal dans son époque, a raté sa carrière de dessinateur de bandes dessinées et, bien que dépressif, il aime toujours sa femme. Elle, Marianne (Fanny Ardant), médecin psychiatre à succès sur Internet, ne supporte plus son mari au point qu’elle le met à la porte. Leur fils a monté une société qui, pour beaucoup d’argent et à grand renfort de décors, de costumes et d’acteurs, fait revivre à ses clients n’importe quel évènement qu’ils choisissent dans la peau du personnage de leur choix. Il fait cadeau à son père d’un ticket valable pour être qui il voudra le jour qu’il voudra. Victor choisit d’être lui-même le jour de sa rencontre avec sa femme, le 16 mai 1974.

Le second couple est formé de celui qui met en scène les évènements ci-dessus et d’une de ses comédiennes. Lui, Antoine, c’est Guillaume Canet et elle, Margot, Doria Tillier. Démiurge boiteux, exigeant et colérique Antoine s’est rendu insupportable auprès de Margot, qui lui échappe. Pour la ramener à lui, il lui donne le rôle de la femme de Victor en 1974. Dans l’entreprise de spectacle montée au profit de Victor, les réussites, les ratages, les anachronismes, les quiproquos et les mises en abyme vont mener à la résolution heureuse et attendue de la réunification des couples.

Et maintenant, le jugement, nuancé comme d’habitude : ce film aura un grand succès, d’ailleurs pas entièrement immérité.

Un grand succès ?
Pourquoi ?
Parce que Bedos est clivant, c’est l’épithète en vogue qu’on lui attribue, mais il est clivant du bon côté : les malins rieurs sont avec lui.
Parce que le film a eu un excellent accueil à Cannes, mais pas en compétition.
Parce qu’il bénéficie d’une promotion rédactionnelle étonnante et d’une distribution de qualité

Un grand succès pas entièrement immérité ?
Pourquoi ?
Parce que la réalisation est techniquement maitrisée (pour le second film d’un dandy parisien, c’est respectable).
Parce que les décors (qui sont en fait des décors dans les décors, vous savez, comme le cinéma dans le cinéma, quoi ? une des facettes de la mise en abyme, enfin !) sont remarquables dans leur côté fausse reconstitution.
Parce que l’idée de départ est séduisante (quoiqu’inspirée probablement du film de 1997 de David Fincher The Game, et peut-être bien aussi de Midnight in Paris de Woody Allen en 2011)
Parce que les comédiens sont bons, quoique Daniel Auteuil un peu uniforme, Guillaume Canet bon tout du long, Fanny Ardant excellente vers la fin et Doria Tillier époustouflante à tout instant.

Un succès partiellement immérité ?
Et pourquoi donc ?
Parce que, contrairement aux deux modèles précités, le scénario de La belle époque n’est pas vraiment maitrisé, que le fil conducteur présente parfois un peu de mou et que la progression est souvent hésitante et répétitive.
Parce que le désir de l’auteur de faire continuellement de l’esprit et d’habiller chaque réplique en punchline rend les dialogues plutôt artificiels quand ils ne sont pas inutilement trop crus.

Il n’empêche que, ne serait-ce que pour la seule Doria Tillier, vous pouvez voir ce film. Si en plus, vous aimez Bedos, vous serez comblés.

 

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