Chapitre 2 – La charge de la preuve.
Où l’on découvrira que prouver un manque n’est pas chose facile et qu’éprouver un manque, non plus.
C’est donc le 17 février 2023 vers 10 h 30 que notre préposé à la vérification des plaques de rue se rendit en toute hâte sur les lieux, muni de son appareil nippon tout neuf et de son certificat tout frais d’aptitude à la prise de vue numérique.
En arrivant en vue de l’église Saint-Germain des Prés, vint à l’esprit curieux de Ratinet la question suivante : « Comment fait-on pour photographier une rue qui a disparu ? ». Son esprit cartésien résista un temps à passer du particulier au général, mais il fallait bien qu’il cédât. Il céda et passa à « Comment fait-on pour photographier quelque chose qui n’est pas là ? », puis, plus général encore, à « Comment prouve-t-on l’absence d’une chose ? » et enfin à son inévitable universalisation : « Comment prouve-t-on qu’une chose n’existe pas ? ». La tête commençait à lui tourner un peu et la pluie à tomber beaucoup. Trempé, il rentra chez lui et prit le reste de sa journée pour sécher et réfléchir à l’abîme philosophique qui s’était dressé devant lui, car quand un abîme se dresse devant vous, ça fait peur.
Avec le bon sens dont nous avons été témoins plus haut, son épouse lui donna ce double conseil :
— Enlève tes chaussures, sans ça tu vas me saloper toute la moquette, et retourne là-bas dès que tu pourras pour Continuer la lecture de LES DISPARUS DE LA RUE DE RENNES (Extrait) →