Acharnés – Critique aisée n°260

temps de lecture : 3 minutes

critique aisée 260

Acharnés
Série tv NETFLIX
Première saison : dix épisodes de 30 minutes
Lee Sung Jin – 2022
Steven Yeun, Ali Wong

Bien étrange cette série US, plutôt communautaire asiatique. Ça commence par une scène banale entre automobilistes énervés sur un parking de supermarché. Ça continue un peu comme ce sketch des Nouveaux sauvages, film argentin de Damian Szifron de 2014 dans lequel deux automobilistes se portent mutuellement des coups de plus en plus violents pour une vétille initiale. Dans « Acharnés », on sent vite que ça pourrait tourner comme dans ce premier film de Spielberg dans lequel un chauffeur de camion invisible et un représentant de commerce dépassé se livrent à un combat à mort par véhicules interposés.

Au long d’une dizaine d’épisodes, Danny Cho, petit patron de petite entreprise, et Amy Lau, styliste en vogue et fortunée, vont tenter de se détruire mutuellement leur vie. Pourquoi ? Pour rien. Ils ne se connaissent pas, ils n’ont aucun point commun, ils n’avaient aucune raison de se rencontrer ni, bien sûr, de se haïr ; ils ne sont ni méchants ni pervers, et pourtant, entre eux, dès le milieu du premier épisode, c’est la guerre. Il aurait suffit que Danny regarde dans le rétroviseur de son banal pick up d’ouvrier du bâtiment, ou qu’Amy, à bord de son beau SUV blanc de femme d’affaire de Los Angeles, inspire profondément une fois de plus pour que, pour l’un et pour l’autre, rien ne distingue cette journée d’une autre. Oui mais, ce jour-là, Danny était très énervé par le refus de remboursement qu’il venait d’essuyer à propos de stupides barbecues dont il n’avait pas besoin, et Amy, de son côté, vivait dans l’attente anxieuse de l’offre d’achat de sa société qu’on devait lui faire et qui devait la rendre millionnaire. Alors, sur le parking du super marché, Danny a reculé sans regarder dans son rétroviseur et son minable pickup a bien failli emboutir le bel SUV d’Amy. Et Amy, au lieu de rester bien calme dans l’air conditionné de sa belle voiture, donne un long coup de klaxon protestataire et, après réflexion et respiration contrôlée, ouvre sa vitre et brandit un doigt d’honneur sans équivoque.

Et ce jour devient celui de la déclaration de guerre.

Ce qui est intéressant dans cette série, c’est que rien de ce à quoi nous sommes habitués ne se passe. Bien sûr, nous sommes à L.A., mais dans la communauté coréenne. Bien sûr le petit patron, accablé d’ennuis de toutes sortes, est sympathique, mais il est aussi mesquin, menteur et roublard. Bien sûr, la styliste en vogue est dure, volontaire et érotomane mais elle adore sa petite fille et son mari, un grand gentil benêt prétendument artiste. Bien sûr, dans leur désir de se venger de l’autre, Amy et Danny vont se livrer à des actes répréhensibles, mais jamais volontairement au point où de malheureuses circonstances les conduiront. La série est une escalade impitoyable, tempérée par un solide humour noir, par des moments de désespoir et de tendresse et un désir intermittent chez les belligérants d’en rester là, ce à quoi ils n’arrivent jamais.

Dans l’abondance des séries complaisamment violentes, celle-ci est remarquable à plusieurs titre :

  • L’absence de clichés : il n’arrive jamais ce à quoi le spectateur expérimenté peut s’attendre.
  • Le milieu dans lequel l’action se déroule : la communauté coréenne de L.A. où se rencontrent des voyous, des artisans, des gens riches.
  • Le style : mélange de tragique réaliste et d’humour noir
  • Les comédiens : très bons,  voyez donc par vous-mêmes.

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