Cher connard – Critique aisée n°244

temps de lecture : 5 minutes 

Critique aisée n°244

Cher connard
Virginie Despentes – 2002
Grasset – 344 pages – 22€

Avertissement : Cette critique a été écrite sur la seule lecture du premier tiers de ce roman. En cela, elle est sujette elle-même à critique. Mais bon, qui me jettera la pierre ? Qui n’a jamais critiqué que ce qu’il a lu ? 

 Je vous ai déjà fait le coup, vous vous souvenez ? C’était avec « La plus secrète mémoire des hommes« , incontournable événement littéraire, pavé chéri du Masque et de la Plume, gros succès de librairie. Lecteur de Panurge, j’achète bien sûr, et je commence à lire avec la ferme intention d’en faire une de ces Critiques aisées complètes, sincères et objectives dont vous avez l’habitude, histoire de rentabiliser mon investissement de 22 euros.  Seulement voilà, dans La Mémoire des hommes, je n’avance pas, ou plutôt j’avance avec cette sensation que l’on éprouve au bord de la mer quand on marche parallèlement à la plage avec de l’eau jusqu’à la ceinture : il parait que c’est bon pour la santé, mais c’est quand même très pénible. Alors, qu’est-ce que je fais ? Juste un petit mot pour déclarer dans quoi je me suis embarqué et annoncer que je ne suis pas certain d’aller au bout.

Eh bien, c’est à peu de choses près ce qui m’arrive avec ce Cher connard, le dernier événement littéraire incontournable, le chéri du Masque et de la Plume, le gros succès de librairie. Les causes en sont différentes, mais les effets les mêmes.

Cher connard, vous le savez, est un roman épistolaire et, tout de suite, tout le monde d’évoquer Choderlos de Laclos. Ce n’est pas que j’en sois fier — j’en suis même un peu honteux — mais je n’ai pas lu Les Liaisons dangereuses (Bien sûr que j’ai vu le film ! Pas celui de Vadim, non, l’autre ; Close, Malkovitch, Pfeiffer, que du beau monde !) Ça m’évitera donc la tentation de me lancer dans une critique comparée du chef d’œuvre du XVIIIème siècle et de la coqueluche du XXIème. Donc le Connard est un roman épistolaire, constitué d’un échange de mails entre Rebecca et Oscar, entrecoupé d’articles du blog de Zoé Katana.

Pour commencer, deux réserves relative à la forme :

La première est mineure : je ne pense pas que, jamais, personne, dans aucune circonstance, ait écrit de mails aussi longs ni aussi structurés. D’une manière générale, la forme épistolaire est tout à fait respectable. Elle permet notamment d’exposer en détail deux points de vue opposés et d’analyser un sujet par le moyen d’une sorte de débat argumenté entre les correspondants. Mais, passé le XVIIIème siècle, et surtout quand on remplace les lettres par des emails, cette forme devient très artificielle.  Finalement, on n’y croit pas du tout, à cet échange. Mais bon, on peut l’accepter comme une convention. D’ailleurs, y aurait-on cru davantage si Rebecca et Oscar avaient choisi la Poste plutôt qu’Internet comme intermédiaire ?

La seconde réserve est plus sérieuse. Quelque chose m’a gêné et continuera à le faire si je poursuis ma lecture : les mails de Rebecca, ceux d’Oscar et les posts du blog de Zoé sont écrits dans des styles peu différents — et parfois pas différents du tout — si bien que, au fil de la lecture, si on a oublié le sous-titre du sous-chapitre qui identifie son narrateur, on a du mal à deviner qui parle. Comme les faits relatés par les trois narrateurs sont les mêmes, la confusion est parfois complète.

Bien sûr, je ne suis pas idiot — seulement naïf — et je crois avoir compris la raison de cette uniformité, mais je réserve cette révélation à la véritable critique aisée que je ferai peut-être un jour de ce Cher connard. (Et puis zut, je vous le dis tout de suite : je pense que les trois personnages sont Madame Despentes elle-même et qu’elle pense qu’ils lui permettent d’exprimer ses diverses sensibilités : son côté dominateur, son côté masculin et son côté victime. N’empêche qu’elle aurait pu  faire un effort pour varier les styles. Mais bon…)

Donc, le Connard est un roman épistolaire, échange de mails entre une star-actrice en fin de carrière, un romancier à sec et son ancienne attachée de presse qui l’accuse par réseaux sociaux interposés de l’avoir harcelée sexuellement des années plus tôt. Comme thème, on ne fait pas plus dans le vent, et l’adhésion de Télérama est assurée. À moi qui n’ai pas lu grand-chose sur le sujet, la façon de l’aborder m’a parue assez  intéressante, originale même. L’originalité n’est pas dans l’attitude d’Oscar, l’homme, très classique, l’accusé qui se croit innocent et victime d’une hystérie féministe, puis qui minimise ses actes et puis…  (on verra plus tard : je n’ai lu qu’un peu plus du tiers du bouquin). Elle n’est pas dans celle de Zoé, l’incontournable victime, vengeresse, agressive, sans pitié ni pardon… (même remarque que ci-dessus). L’originalité réside dans l’attitude de Rebecca, méprisante la plupart du temps, mais compréhensive et presque bienveillante tant envers les hommes inconscients de leur crime qu’envers les femmes, leurs victimes. C’est une attitude rare et intéressante, surtout quand elle est adoptée par une femme puissante d’aujourd’hui, aussi importante sur le plan  médiatique et que sur le plan littéraire, m’a-t-on dit.
Malgré cela, je n’avance pas dans ce Connard, pas plus que je n’avançais il y a quelques mois dans La plus secrète mémoire des hommes, mais cette fois pour des raisons différentes. Alors, vous demandez-vous, quelles peuvent bien être ces raisons ?

La première, c’est que je n’aime pas les personnages, aucun des trois. Au point du roman où j’en suis, page 121, aucun d’entre eux n’a réussi à se rendre sympathique, au contraire. À vrai dire, ils n’ont même pas essayé. Je n’arrive à m’identifier ni même à comprendre aucun d’entre eux. Zoé, c’est exclu, bien sûr. Despentes n’a d’ailleurs certainement pas cherché à la rendre sympathique. Oscar est un écrivain en mal d’écriture, ce qui pourrait me le rendre proche, mais il me parait mou, empêtré dans ses regrets de jeunesse, dans son apologie de l’alcool, de la drogue et du sexe, dans ses séances avec les Narcotiques Anonymes. C’est un chouineur. Quant à Rebecca, son attitude de simili tolérance universelle aurait pu me la rendre sympathique. Mais elle est tellement pleine d’elle-même, certaine de sa supériorité sur tous les autres que non, je ne peux pas l’aimer, ni même la supporter.
Dès le début de ma lecture, comme il s’agit d’une actrice, j’ai voulu me représenter Rebecca et j’ai pensé un moment à Catherine Deneuve. Deneuve, je ne l’ai jamais considérée comme une très bonne comédienne, mais elle avait la beauté, une certaine distinction et  sans doute la forte personnalité que Despentes attribue à Rebecca. Mais non, Deneuve ne pouvait pas être aussi vulgaire. Alors, j’ai voulu changer d’actrice, et aussitôt un visage, une voix, un comportement sont apparus : Béatrice Dalle. Dès lors,  c’était foutu entre Rebecca et moi.

Un mot du style maintenant.
J’ai déjà parlé de son unicité quel que soit le narrateur. Ce n’est qu’un défaut mineur qui contribue au caractère artificiel de l’échange de correspondances.  Inutile d’y revenir.
En dehors de ça, je dois dire que j’ai du mal à m’habituer à ce style qui ne choisit jamais entre le style soutenu et le style parlé. J’ai du mal à supporter l’irruption épisodique de mots et de locutions vulgaires, et même ordinaires. J’ai du mal à interpréter cette ponctuation à la fois rare et anarchique qui oblige parfois à relire certaines phrases pour pouvoir en saisir le sens. Céline faisait cela mais, ce qu’il voulait dire, on n’avait aucun mal à le comprendre. Et puis, j’en ai eu vite assez de ces clichés, et puis aussi de cette apologie constante de la défonce et puis surtout de cet inépuisable mépris affiché par Rebecca et Oscar à l’égard de tout ce qui n’est pas eux. Insupportable…
Finalement, je ne suis pas sûr du tout d’aller au bout.
À refuser l’obstacle comme cela, serais-je en train de devenir un connard ?
Non ?
C’est déjà fait ?

 

11 réflexions sur « Cher connard – Critique aisée n°244 »

  1. Moi aussi, j’ai eu des faiblesses dans ces années-là : Glauber Rocha, Le Dieu Noir et le Diable Blond, Antonio das Mortes, Goto, île d’amour, des films absolument épouvantables. J’étais allé les voir parce que c’était à la mode dans les années 68. Mais j’avais trouvé ça très chiant et ils le sont encore plus aujourd’hui. Alors que toi, César-Philippe et Rosalie-Sophie, ça te plait toujours, cinquante ans après. J’en ai parlé à un ami psychanalyste; je te raconterai …

  2. Ma critique s’adressait aux critiqueurs professionnels, non pas à toi. Comme Lariégeoise, je serai toujours un supporter inconditionnel de tout ce qui pourra te passer par la tête en regrettant de ne pas avoir ton talent.

  3. @ Lorenzo
    — Tout d’abord sur le Connard.
    C’est vrai, j’ai commencé par critiquer la forme du Connard, l’échange de mails de ce type me paraissant très artificiel.
    Qui veut noyer son chien l’accuse de la rage, pas vrai ?
    Mais j’ai aussitôt ramené ce reproche à de justes proportions en déclarant qu’il s’agissait d’une convention après tout acceptable. (N’avais-je pas moi-même adopté pour le Cujas une forme peu réaliste de longs interviews ?)
    Ce n’est donc pas la forme épistolaire qui m’a découragé d’aller au delà du premier tiers du Cher connard.
    Dans ma Critique aisée, je pense avoir été clair sur a) les limitations de ma critique et b) sur ce que je n’ai pas aimé dans le roman. Et si on trouve que je ne l’ai pas été assez, mon précédent commentaire fait en réponse à Lariegeoise a sûrement apporté au lecteur hésitant quelques éléments complémentaires.

    — Ensuite sur le caractère invraisemblable de César et Rosalie et de la Mort aux trousses
    Je compare parfois ma mémoire au pare-brise d’une voiture roulant (de plus en plus lentement) sous la pluie : les gouttes viennent s’y coller, aussitôt effacées par le ballet des essuie-glaces, et remplacées par de nouvelles gouttes de pluie.
    Donc, je n’ai plus précisément en tête ce que tu reproches a la forme de César et Rosalie ou à celle de La Mort aux trousses.

    — Sur « Cesar », et sur l’ensemble de l’œuvre de Sautet, je crois que c’était quelque chose comme l’irréalité de la société dans laquelle vivent ses personnages. « Personne ne vit plus comme ça », milieu aisé, amitié, maison de campagne, affaires, échanges (pas échangisme, attention !), cigarettes, restaurants, cafés, l’addition. En défense de Sautet, il faut rappeler que son œuvre se déroule dans les années 70, et qu’à mon avis, une partie de la société vivait exactement comme ça.
    Mais même en acceptant, juste un instant, ton reproche, les films de Sautet souhaitaient surtout peindre des rapports amoureux et amicaux. Il les a placés dans le décor qu’il connaissait le mieux, cette bourgeoisie moyenne de sa génération. Et, à mon avis, il a su le faire avec une sensibilité et une précision étonnante.
    — Je ne me souviens plus de tes réserves sur La Mort aux trousses, mais j’imagine qu’elles étaient du même ordre : intrigue invraisemblable, personnage principal (Grant) irréel, méchant archétypique (Mason), espionne trop belle pour être vraie (Saint).
    Moi, je considère que La Mort aux trousses est une comédie policière – road movie – poursuite sophistiquée et que, dans ces conditions, les personnages doivent être des archétypes d’élégance décontractée (Grant), de beauté froide (Saint) et de subtilité démoniaque (Mason), l’action doit être spectaculaire et l’humour, incarné par le héros, omniprésent. Hitchcock n’est pas un réalisateur de Série Noire, avec pluie nocturne sur les pavés luisants et fondu au noir sur des feux de voiture disparaissant dans le brouillard. Dans la Mort aux trousses, il ne cherche pas le réalisme. D’ailleurs, l’a-t-il jamais recherché ? Il cherche a faire peur (Psychose, Les Oiseaux) ou à distraire (Mais ou est donc passé Harry ? La mort aux trousses, Fenêtre sur cour). En comparaison de « l’invraisemblable » et sophistiquée Mort aux trousses, spectacle cinématographique parfaitement réussi, sont parfaitement ratés par exemple les films de Belmondo réalisés par Henri Verneuil (comme Peur sur la ville) avec de vraies cascades bien réalistes puisque tournées par le comédien lui-même, mais sans aucun intérêt cinématographique.

    Parfaitement en désaccord avec l’affirmation qu’une oeuvre ne nous touche « jamais pour des raisons de mode ». J’en veux pour preuve mes propres expériences de revisionnage de films que j’avais aimés autrefois, un des exemples les plus frappants étant « L’année dernière à Marienbad » au centre de la mode du début des années 60 et totalement démodé aujourd’hui.

    Dans ma réponse à Lariegeoise, un peu plus bas, j’explique ma conception, non pas de LA critique, mais de mes Critiques aisées. C’est de cette même manière que j’utilise les critiques faites par les professionnels, c’est à dire en tenant compte de leur auteur. Prises de cette manière, les critiques positives comme négatives sont utiles aux lecteurs. Comme il est impossible de tout voir et de tout lire, c’est sur la foi d’un critique qu’ils iront ou n’iront pas voir un film, une pièce de théâtre, selon le conseil que le critique donne, conseil suivi ou pris à l’envers selon ce qu’il connaisse de lui.

    @ Lariegeoise
    Personnellement, j’aurai préféré être David que César, quitte à perdre Rosalie une deuxième fois. (Car il suffit de voir le sourire de David vers César pour comprendre qu’il sait, lui, qui Rosalie est venue retrouver). César, pourtant sympathique, est si éloigné de moi (tel que je me vois bien sûr.)
    Il se trouve que j’ai rencontré Claude Sautet dans la période où il préparait César et Rosalie, mais il ne m’a proposé ni le rôle de David ni celui de César, ni aucun autre rôle. Il ne m’a pas indiqué non plus quelle fin il comptait réellement donner à son film.

    « un critique est un écrivain raté »
    En voilà une antienne bien définitive ! On peut tout aussi bien l’imaginer prononcée avec amertume par un écrivain critiqué.
    Dans le même genre, on peut citer « Those who can’t do teach »

    A propos de Pivot et sans vouloir être méchant envers ce sympathique personnage, il était quand un peu critique, ne serait-ce qu’en organisant des émissions littéraires. Ce qui est certain, c’est qu’il n’est pas un bon écrivain.

    D’une manière générale, l’acte d’écrire est (aussi, mais pas que) un acte narcissique : « regardez comme je suis intelligent, brave, cultivé, fin, débauché, généreux, révolté, malheureux, méritant, sincère, habile et tout et tout… ». C’est aussi un acte courageux : « Je m’expose à vos critiques ».
    Dans cette même ligne, on pourrait dire que la critique est un acte non seulement narcissique et courageux mais aussi totalitaire : « je suis très intelligent, je ne crains pas de m’exposer et je vous dis que penser de cette oeuvre… »

    Ecrire est devenu un besoin pour moi, et écrire des critiques est, surtout actuellement en phase de page blanche, un dérivatif. Une chronique, c’est quand même plus facile à écrire qu’un récit ou une nouvelle. J’écoute assez souvent les critiques cinema et littérature. Mais, quand il est question d’une oeuvre que je ne connais pas encore, je reçois la critique différemment selon son auteur. Par exemple, si c’est Fabienne Pascaud, j’ai tendance à adopter un préjugé contraire au sien. Elle aime, je me méfie; elle n’aime pas, ça doit être bon. Avec Le Herpeur, ça marche dans le même sens. Avec Beigbeder, c’est l’inverse. Il n’aime pas, je n’irai probablement pas voir; il aime, il y a des chances que j’aime aussi.
    Vous-même, voua avez des amis qui ont les même gouts que vous, et d’autres dont les avis, quand vous les suivez, vous amènent systématiquement au casse-pipe.
    Eh bien, c’est comme ça que je conçois mes Critiques aisées. Je donne mon avis. Ceux qui me lisent me connaissent directement ou, après 250 critiques, ont appris à me connaître. Ils savent donc s’ils ont des gouts proches des miens ou opposés.
    En fait, je suis un vrai service public.

  4. La clairvoyance de Lariégeoise est étonnante : elle a bien vu la différence entre Philippe-César, tonitruant et bavard, et Lorenzo-David, humble et discret.

  5. J’étais pourtant au Comptoir du Panthéon jusque vers 10h30.

  6. Tu as fait tes courses où ? Parce que ce matin j’ai fait tous les cafés du quartier et je ne t’y ai pas trouvé, comme d’habitude.

  7. Je n’ai pas voulu m’immiscer dans le petit ballet critique entre Cesar -Philippe et Lorenzo – David(?)
    Mais aujourd’hui je prends partie : «  un critique est un écrivain raté «  quelqu’un a énoncé cela et cala vaut pour toutes les formes d’art…
    En cela je rejoins Lorenzo : une critique ne peut être qu’une incitation à se faire une idée soi même: si on dé zingue l’oeuvre au départ , elle perd une parie de sa cible potentielle.
    En cela les émissions de Bernard Pivot , tant décriées par les intellectuels ( y compris mon cher Philippe Murray ), ne jugeaient pas : vous aviez l’auteur , sa gueule sa voix ; il suffisait de choisir et de risquer d’être déçu…

  8. @Lariegeoise
    Je ne vais pas tenter de défendre ma critique de Cher connard, d’une part, parce que je n’ai rien lu d’autre de V.D. et d’autre part, parce que je ne l’ai même pas fini, son Connard.
    Ce qui m’a rebuté, je l’ai dit, c’est plus le style incertain que la forme épistolaire, mais plus ou moins inconsciemment, ce doit aussi, et pas mal, être la personnalité de l’auteur, pas uniquement ce qu’on dit d’un elle, mais ce qui transparaît à travers ses personnages.
    Le rapprochement, pas la comparaison, le rapprochement avec Céline est trop facile, évident. La nouveauté du style (totale pour LFC, incomplète pour VD), la personnalité privée (essentiellement antisémitisme d’un côté, positions politiques et sociales de l’autre), les scandales littéraires provoqués par les deux écrivains, tout cela autorise un certain rapprochement, plutôt valorisant pour VD.
    Mais, si j’en juge uniquement (et donc iniquement) par les 121 premières pages du Connard, sur le plan de la puissance de l’œuvre ou même de son seul intérêt, le rapprochement ne s’étend pas pour moi au domaine littéraire.
    On a dû le comprendre, ce qui m’ a dérangé le plus dans le premier tiers du Connard : le mépris affiché, l’image indélébile que je me suis faite de VD en Beatrice Dalle, le style incertain. Peut-être la lecture des deux autres tiers m’aurait-elle fait changer d’avis. Je ne le saurai probablement jamais.
    C’est pourquoi je ne me dis pas critique, que j’intitule (faussement ?) modestement mes chroniques Critique aisée, et que je ne fais qu’y donner mon avis : j’aime, j’aime pas, et pourquoi. Ensuite, les lecteurs jugent en combinant le sens de ma critique avec ce qu’ils connaissent de moi et de mes goûts.

    @Lorenzo
    Ce matin, le temps m’étant compté pour de triviales raisons de courses à faire, je n’aurai pas le temps de répondre à ton commentaire. Mais ce sera fait, ce soir, demain, un jour….

  9. Ah je l’attendais avec impatience cette critique et curiosité: je le dis tout de suite je tiens Virginie Despentes pour la romancière qui a dynamité le genre depuis 15 ans;
    Je l’ai découverte tard , avec sa série Vernon Subutex: fantastique dynamitage de tous les codes du roman , chronique de la déglingue, de la lâcheté masculine; le pendant féminin de Houellebecque…
    J’attendais donc avec impatience la parution de cher Connard, annoncé dès l’été ; je l’ai gardé sur la pile: j’aime voir «  ma pile »: des essais , des biographies, des correspondances et les romans récents : plus rares car souvent sans attrait.
    Elle , Virginie je l’attendais :l’accusation de harcèlement de l’ecrivain. les affres d’une actrice vieillissante , l’arrivisme d’une petite attachée littéraire laminée par les réseaux sociaux, la nocivité de ces réseaux:c’est juste, drôle et tragique à la fois…
    Et puis si juste la difficile relation avec une ado ,la description impitoyable des signatures de livres en province; surtout surtout ces pages sur le confinement , les clichés qu’on a tous eu sur ce silence abyssal abattu sur la ville; Oscar n’est pas chouineur , il doute , il cherche…
    Alors moi je dis lisez cher Connard , Virginie Despentes c’est dérangeant, poil à gratter , mais ça a de la gueule, du corps ; rien du gnan gnan habituel…

  10. La qualité de ta critique n’est pas en cause ; elle est claire et convaincante, ne m’étonne pas mais me surprend un peu car tu reproches d’emblée à la forme de ce livre son caractère invraisemblable, ce que je critique moi aussi dans César et Rosalie ou dans La Mort aux Trousses. Mais, bon, soit, mais c’est lourd, mais soit … J-P Marielle, in Le Diable par la Queue, Philippe de Broca.
    Je m’interroge souvent sur le rôle de la critique, littéraire ou cinématographique en particulier, et en cela la lecture de télérama est édifiante. A quoi sert une critique négative ??? La critique ne concerne que son auteur et ne préjuge en rien de l’appréciation des autres, qu’ils soient connards ou non. Une œuvre nous touche pour des raisons personnelles, psychologiques ou esthétiques, mais jamais pour des raisons de mode. J’en suis arrivé à penser que seules les critiques positives, même avec les réserves sus-citées, sont utiles. Pourquoi ? Parce qu’elles vont nous donner envie de lire ou de voir l’œuvre. Elles nous donnent une chance de découvrir peut-être la petite phrase musicale qui va changer irrémédiablement notre perception des choses.

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