Le problème avec Céline

2 minutes et 30 secondes 

J’en ai marre !  Ça doit bien faire deux mois que j’en suis là, au même point, en panne. Ras le bol, cette histoire avec Céline ! Elle m’en fait voir de toutes les couleurs. Avec elle, ça n’avance pas, ça n’avance plus.

Pourtant, ça n’avait pas mal commencé dans ce bistrot où je l’avais rencontrée, rue Saint-Jacques. Ça marchait bien, et ma petite affaire progressait normalement, facilement, comme d’habitude…

Bien sûr, comme toujours au début, je ne savais ni précisément quoi dire ni jusqu’où je voudrais vraiment pousser, mais de ça, j’ai l’habitude. Ça commence souvent comme ça : au début, c’est flou, et puis après quelques savants détours, deux banalités et trois clichés, tout d’un coup ça se précise, je sens que ça vient, que c’est pour bientôt : dans quinze jours, trois semaines, elle devrait être définitivement emballée, la petite nouvelle. Et un jour, effectivement, hop !, presque par surprise, ça se concrétise ; il n’y a plus qu’à laisser rouler et finir par conclure.  Bon, d’accord, ça me fait toujours un peu de peine de mettre fin à une belle histoire, mais c’est jamais bon de s’éterniser avec la même. Et puis ça permet de passer à la prochaine. 

Mais le problème avec Céline, c’est que ça ne se passe pas du tout comme ça. Depuis deux mois, j’en suis au même point. La panne en rase campagne, je vous dis. Pourtant, j’avais bien préparé le terrain,  j’avais laissé murir, tranquillement, sans précipitation. Mais il ne se passait rien, ou presque. Alors, agacé, je la plantais là, pendant quelques jours, ou même pendant une semaine ou deux,  et puis je la ressortais pour la travailler plus sérieusement, ou d’une autre façon, selon une autre approche. Et là, je me disais que c’était mieux, que je tenais le bon bout. Mais non, pareil ! Mes efforts ne donnaient rien, ou presque rien, au mieux un minuscule progrès, à peine une toute petite ouverture. Pour tout dire, elle commençait à m’emmerder sérieusement, Céline. Alors, je l’abandonnais à nouveau… pour la reprendre un peu plus tard. C’était plus fort que moi, je n’arrivais pas à tirer un trait dessus.

Mais j’ai fini par en avoir marre et l’autre jour, j’ai décidé de la laisser tomber, définitivement ! Oui monsieur ! Je me suis dit qu’avec elle, je n’arriverai jamais à mes fins, que je n’avais quand même pas que ça à faire, et qu’il y en avait des tas d’autres qui m’attendaient, là, tout près, dehors, dans la rue, dans un jardin, à une terrasse de café… Allora, basta cosi !  Je passe à autre chose !

Mais je sais que, bientôt, dans un mois, dans un an, je ne pourrai pas m’empêcher d’aller la rechercher, celle-là, et que j’essaierai de la récupérer, parce que s’être donné tant de mal pour rien, ce serait dommage. Je sais aussi que je ne pourrai pas la reprendre telle qu’elle est, qu’il faudra que je la corrige, mais que ça ne suffira probablement pas pour qu’elle devienne présentable. Il faudra sans doute que je la prenne d’une façon plus énergique, plus moderne, plus concise, autrement dit qu’avec elle, je change de style. Et si j’arrive à faire ça, j’aurai gagné. J’arriverai enfin à le terminer, le foutu chapitre de Céline, et je pourrai passer au suivant. 

Note de l’auteur 
Si le sens profond de ce texte vous a échappé, deux solutions alternatives s’ouvrent à vous :

1- le relire attentivement
2- cliquer sur « Continuer la lecture »

Bon, vous avez cliqué ; vous savez maintenant pourquoi le roman que vous suivez par épisodes depuis plus d’un mois, « Un couple inachevé » — couple formé par Olivier et Céline   — se trouve provisoirement bloqué à la fin du chapitre « Attention, danger » faute de pouvoir achever le suivant dont le titre sera bien sur « Céline« .

 

Une réflexion sur « Le problème avec Céline »

  1. En découvrant ce texte mon réflexe a été « il va nous parler de Céline, probablement suite à la parution de Guerre, cet événement littéraire qui a fait beaucoup jazzer… ». Comme beaucoup de gogos qui ne veulent pas être en reste dans les conversations de jardin à l’heure de l’apéro, même en Bretagne où l’on retrouve beaucoup de bobos parisiens retraités mais dans le coup des événements littéraires, disent-ils, je me suis dit « coco il faut que tu te fendes de 19€ pour l’achat de ton exemplaire Gallimard, comme ça tu seras dans le coup ». L’occasion se présente enfin ce matin, mais patatras! c’est pas de Guerre qu’il s’agit mais de l’accouplée qui s’ennuie. 19€ pour des prunes, je suis un zozo!

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