Rendez-vous à cinq heures : la drôle de guerre des mondes

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Un Incipit à faire peur

Vous savez bien sûr que la première phrase en gras du texte ci-dessous est de H.G. Wells. C’est celle de son roman La guerre des mondes

La drôle de guerre des mondes
par Philippe

« Personne n’aurait cru, dans les dernières années du XIXe siècle, que les choses humaines fussent observées, de la façon la plus pénétrante et la plus attentive, par des intelligences supérieures aux intelligences humaines et cependant mortelles comme elles ; que, tandis que les hommes s’absorbaient dans leurs occupations, ils étaient examinés et étudiés d’aussi près peut-être qu’un savant peut étudier avec un microscope les créatures transitoires qui pullulent et se multiplient dans une goutte d’eau. »

Vrout Ptlamn regardait les mots s’inscrire sur le proumgh qui lui faisait face au fur et à mesure qu’il les pensait. Il réfléchissait :

— C’est pas mal comme début. Un peu classique peut-être, mais ça fait sérieux, professionnel et attrayant tout à la fois. C’est tout ce qu’il faut pour un article historique dans une revue non spécialisée.

Satisfait, il s’interrompît un instant pour envoyer une brève arrière-pensée à Knat. Il ne fallait surtout pas qu’il oublie de rapporter des fragrances fraiches sinon, ils n’auraient bientôt plus rien d’autre que des aérosols à se mettre sous la trompe.
Avant de reprendre sa pensée principale, il voulait se remémorer les faits pour pouvoir les classer et les exposer de façon claire. Distraitement, il envoya une pensée-pratique au prbomariv qui fit aussitôt descendre du plafond une petite odeur de braiout pas désagréable du tout. Une pensée-parallèle l’effleura.

— Il faut que je réduise un peu ma consommation de braiout, se promit-il, sinon je vais finir par ressembler à une pravoqte ! Et puis, repensant à son sujet principal : Allons-y !

Tout aussitôt le proumgh afficha « Allons-y ! » que Vrout dut effacer d’une pensée-éclair avant de poursuivre :

« Tout d’abord, il y a un peu plus d’une centaine de kramlps, des objets métalliques compliqués étaient arrivés sur Bavlo. On n’avait aucune idée de ce que ça pouvait être. D’abord, ça ne ressemblait à rien. Ensuite, ça s’écrasait au sol dans des nuages de poussières et de vibrations désagréables. En plus, tous ces trucs qui tombaient du ciel, c’était dangereux.
Au bout de quelques temps, l’arrivée des objets venus d’ailleurs devint plus fréquente mais plus harmonieuse. Ils se balançaient doucement au bout de ce qui ressemblait à des paranunki, mais en plus petit et d’une seule couleur. Une fois au sol, les objets parcouraient quelques pas, se couchaient sur le côté et se figeaient définitivement. C’est à partir de ce moment qu’on se mit à appeler ces trucs des  « machins« . Ce mot nouveau ne voulait rien dire de particulier mais il était suffisamment compliqué à penser pour évoquer l’étrangeté de ces objets exogènes. Par la suite, les machins de l’espace continuèrent à arriver en douceur et toujours en plus grand nombre. Ceux-là se mettaient à courir la campagne sur de grandes distances. Ils grattaient le sol, mangeait des cailloux et contemplaient le paysage. Comme ils n’embêtaient personne, on avait fini par ne plus y prêter attention.
Et puis un jour, de gros machins étaient arrivés du ciel par onzaines. Bien sûr, comme les petits machins d’autrefois, plusieurs d’entre eux s’étaient écrabouillés au sol comme des vlomrt, mais la plupart d’entre eux s’étaient posés sans dommage.
Toute la ville était rassemblée sur la chaouesterce pour voir les  machins rutilants qui demeuraient immobiles et fumants. On s’envoyait des pensées dans tous les sens, des pensées inquiètes, des pensées rigolotes, des pensées négatives, des pensées idiotes, des pensées profondes, enfin toutes sortes de pensées. Et puis, après une vibration prolongée difficilement supportable, les azertyuiop des machins s’étaient toutes ouvertes en même temps. Tout le monde s’était arrêté de penser pour observer. Dans l’ouverture des azertyuoiop étaient apparues des silhouettes hésitantes. Il y avait donc des choses vivantes à l’intérieur des machins !

— Des humains espérons-le, se mirent à penser les plus craintifs d’entre nous.

Mais bientôt, ils durent dé-penser : les êtres qui sortaient des machins n’étaient pas des humains, tant s’en fallait. Déraisonnablement grands, ils avaient deux yeux mobiles au lieu d’un seul fixe, une trompe ridiculement petite sous les yeux, un trou à ouverture variable sous la trompe et deux gbardisu en forme de pxoig, une de chaque côté de la tête. Au lieu d’un long et beau pelage naturel ultra-violet et soyeux, leur corps était couvert d’une matière souple indéfinissablement moche. Disgracieusement symétriques avec leurs deux jambes, encombrés de deux tentacules placés incommodément sous le niveau de la tête, on était en droit de se demander comment ils faisaient pour marcher avec ça ! De plus, et selon des témoins dignes de foi, il émanait d’eux un parfum très ordinaire, sans doute à base de qtuhkoma. Ils ouvraient et refermaient sans arrêt le trou qu’ils avaient sous la trompe en se regardant. C’était sans doute pour communiquer entre eux, car ils semblaient ne pas percevoir les pensées que la foule leur envoyait. Par contre, les gens de la ville pouvaient percevoir les leurs parfaitement.

— C’est certain, pensait la foule à l’unisson,  ces gens-là ne sont pas d’ici. Ils doivent venir d’une autre pm@x ou peut-être même d’un autre ùàéèv.

Un vieillard que Ptlamn était allé interviewer à l’autre bout de Bavlo se souvenait parfaitement des pensées que les voyageurs de l’espace échangeaient et qu’il avait pu percevoir au passage :

— Putain ! Qu’est-ce que c’est que ce bled ?

— Tellement qu’c’est moche et tellement qu’y a personne, qu’ça m’rappelle le Grand Lac Salé, près d’chez moi, aux States !

C’est à ce moment que le vieillard avait compris que les envahisseurs ne voyaient pas, ne pouvaient pas voir les humains. Pourtant, toute la ville était là, devant eux, à penser dans tous les sens et sur tous les tons. Et eux, ils ne voyaient rien, ils ne percevaient rien. Ah ! Les nuls ! Mais ils continuaient à penser :

— Eh, Chef ! Z’avez rien de mieux comme endroit pour piqueniquer ?

— Fermez-là, soldat Trump ! Faut que je consulte la carte.

— Eh, Chef ! C’est drôle, mais ça commence à m’gratter d’partout !

— À moi aussi, Chef, à moi aussi !

—À moi pareil. Eh, Chef ! C’est pas supportable, et en plus, on peut même pas s’gratter avec cette foutue combinaison !

— Chef, j’ai déjà eu ça chez nous. A chaque fois qu’il y a un foutu chat dans les environs, ça m’gratte exactement comme ça. C’est les poils, qu’on m’a dit ! Et dix minutes après, ça traine pas, c’est l’hôpital ! Y a des poils dans le coin, Chef, c’est sûr, y a des poils ! Et pas qu’un peu ! Faut s’tirer fissa, Chef !

— Chef, y a pas d’hôpital dans c’désert ! Qu’est-ce qu’on fait, Chef. Ça vous gratte pas à vous, chef ?

— Si, ça me gratte. Trump, grattez-moi le dos !  Oh ! Et puis, on n’a plus le temps ! On s’barre ! Et au trot !  On se grattera à bord… On remballe ! Repli général !  De toute façon, y a rien sur cette planète ! 

Et les machins étaient repartis dans le ciel. Il y en avait bien deux ou trois qui s’étaient vautrés dans la poussière au décollage, mais pour les autres, ça s’était plutôt bien passé.

Depuis ce gmahf, on les a jamais revus, ni les machins ni les affreux. Et avec le temps, on n’y a plus jamais repensé. »

Son article étant terminé,  Vrout Ptlamn ferma son oeil et pensa à autre chose.

Bientôt publié

18 Mar, 07:47 Le Cujas (45)
19 Mar, 07:47 Qu’est-ce qu’on dit ?
20 Mar, 07:47 TABLEAU 340

Une réflexion sur « Rendez-vous à cinq heures : la drôle de guerre des mondes »

  1. Alors ? Où sont-ils, ceux qui réclamaient des jeux, du pain et des cerceaux ? Et ceux qui demandaient qu’on améliore les textes de Wells avant de commencer à écrire, que sont-ils devenus ? Ils ont été trop clairsemés, je crois le vent les a ôtés…

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