Le mécanisme d’Anticythère – Chapitre 12-2 – La Presse

Le corps de notre concitoyen a été retrouvé il y a quelques jours sur l’ile de Cythère. Après les
constatations d’usage par la police, les restes de Mr. Grantham ont été transférés au port du Pirée pour être incinéré. L’urne a été chargée sur le steamer de la Shaw, Savil and Albion Line qui fait la ligne régulière Alexandrie- Athènes, Southampton.

Chapitre 12-2 – La Presse
Décembre 1902 / Aout 1903

The Times
Edition du 28 janvier 1903
Timothy Grantham In Memoriam
Geoffrey Pritchard-Gotham
Dans l’édition du 22 janvier dernier du Sunday Times, nous avions rapporté la mort tragique de Timothy Grantham survenue en mer au large de la côte du Péloponnèse. Mr Grantham ne laissant aucun héritier, selon le règlement intérieur du Drone’s Club de Londres dont il faisait partie, sa fortune, une fois les frais déduits, reviendra entièrement au Club. Une délégation de quatre membres du Drone’s se rendra à Southampton le 31 de ce mois pour accueillir les cendres de leur camarade et lui rendre un dernier hommage.
Le secrétaire perpétuel du Drone’s nous prie également de signaler qu’un diner de gala aura lieu le 24 avril prochain à 18 heures à la mémoire du disparu dans le grand salon.

Daily Mirror
Edition du 30 janvier 1903
Noyade mystérieuse d’un ressortissant britannique en Grèce
par Bud Abott et Lou Costello
Il semble que les bandits grecs aient encore frappé et que la victime soit une fois de plus un sujet de Sa Majesté. Non contents d’avoir causé la perte de Lord Byron, un de nos poètes les plus illustres, voilà que la Grèce s’en prend à notre jeunesse en nous enlevant en sa trente-deuxième année l’un des membres les plus remarquables de notre société scientifique. Il fait peu de doute en effet que la noyade que nous rapportons aujourd’hui ne soit pas accidentelle. De nos jours, pour les Britanniques, la Grèce parait encore moins sure que la France, et les pentes de l’Acropole plus dangereuses encore que celles de Montmartre.
Le corps déchiqueté d’un jeune et riche citoyen anglais vient d’être découvert sur une ile grecque, et c’était celui de Timothy Grantham. Autrefois havre d’amour et lieu de plaisir pour la Belle Hélène et son amant Pâris, Cythère a été cette fois-ci le théâtre de l’horrible fin de ce brillant archéologue, directeur de recherches au Musée National Archéologique d’Athènes, le plus grand musée du monde dans son domaine, après le British Museum.
Venant d’apprendre l’horrible nouvelle par notre correspondant permanent auprès de notre ambassade à Athènes, nous nous préparons à nous rendre incessamment sur place pour nous livrer à notre propre enquête. On ne peut en effet s’en remettre à l’enquête officielle tant on sait que les services de police de Sa Majesté Georges 1er, roi des Hellènes, sont étonnamment incapables et incroyablement corrompus.
Nous rendrons compte ici même à nos lecteurs de nos investigations très prochainement.

Daily Mirror
Edition du 23 février 1903
Qui a tué l’espion anglais du Musée d’Athènes ?
par Bud Abott et Lou Costello
Les circonstances de la mort de Timothy Grantham nous ayant paru troubles et ne pouvant raisonnablement nous en remettre à la police grecque, nous avions informés nos lecteurs de notre intention de mener sur cette affaire nos propres investigations.
Après seulement quelques jours d’enquête, nous sommes désormais en mesure de révéler certains faits troublants de la vie privée et de l’activité professionnelle de ce jeune anglais dont le corps décomposé avait été retrouvé dans l’île de Cythère en début d’année.
Notre enquête a commencé au Musée National d’Archéologie d’Athènes où nous avons rencontré les collègues de Mr Grantham. Ceux-ci, et en particulier le Directeur du Musée, Mr. Volestinos, n’ont pas tari d’éloges sur le jeune savant anglais, observant toutefois un mutisme unanime sur l’objet de ses recherches. Dans les couloirs de l’Administration grecque, le bruit court que celles-ci auraient été classées confidentiel – défense par le premier ministre grec lui-même. Selon une autre source qui tient à conserver l’anonymat, l’activité scientifique de Mr Grantham n’aurait été qu’une couverture, la véritable raison de sa présence à Athènes étant la surveillance des intérêts britanniques dans la région. Bien entendu, le Foreign Office a démenti employer ou même connaitre Mr Grantham. Il est donc tout à fait vraisemblable sinon encore certain que notre savant anglais était en réalité un espion au service de Sa Majesté. On comprend ainsi l’empressement de notre confrère The Times à conclure à une mort accidentelle par naufrage.
Nous avions poursuivi notre enquête avec l’interview des deux domestiques du disparu, Mr et Ms Agrofolos. Ceux-ci nous ont confirmé que depuis plusieurs mois, leur maître s’enfermait de longues heures durant dans son atelier dont il leur interdisait farouchement l’accès, même pour faire le ménage. À plusieurs reprises cependant, ils avaient pu apercevoir par une porte entrebâillée une étrange machine sur laquelle s’occupait fébrilement Mr Grantham, sans qu’il leur soit possible de dire si cet appareil était une sorte de télégraphe, une arme d’un type inconnu, ou quoi que ce soit d’autre. L’épais mystère dont Timothy Grantham semblait entourer ses activités professionnelles, incomprises de ses domestiques et ignorées de ses collègues, semblerait confirmer l’hypothèse que nous émettions plus haut quant à une possible activité d’espionnage.
Grâce aux témoignages des Agrofilos et des commerçants du quartier, il nous est apparu que, pas plus que son activité professionnelle, la vie privée de Timothy Grantham n’était celle que l’on peut attendre d’un scientifique britannique en mission à l’étranger. En effet, depuis plus d’un an, il vivait en concubinage avec une jeune femme originaire du bas quartier de Plaka. Celle-ci, une dénommée Sabrina, est bien connue dans son quartier pour sa vie dissolue et ses nombreux amants. Mystère s’ajoutant au mystère, la jeune Sabrina n’a pas été vue depuis la disparition de son amant.
Ayant acquis la conviction que nous ne tarderons pas à découvrir les véritables raisons de ce drame, nous poursuivrons notre enquête, quoi qu’il nous en coûte.

A SUIVRE

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