L’existence aux USA d’une droite très conservatrice n’est pas une chose nouvelle. Provisoirement effacée de notre champ de vision hexagonal pendant quelques mandatures démocrates ou républicaines modérées, elle était revenue en force avec Ronald Reagan. Mais Ronald Reagan n’avait pas défait ce qui avait été fait avant lui en matière sociale et sociétale. En plus, il était personnellement plutôt sympathique. Et surtout il n’était pas tombé sous la coupe de l’URSS.
La droite extrême coexistait alors avec une droite modérée qui, elle, arrivait à conclure des compromis avec les démocrates.
Mais un accident s’est produit : l’arrivée au pouvoir d’un populiste sans scrupule ni conviction politique, qui ne pensait qu’à éviter la débâcle de ses affaires. Un accident de l’histoire totalement fabriqué avec l’aide intelligente, massive et notoire de l’ennemi héréditaire de l’Amérique. Sous l’empire de cet homme, sous sa menace directe et précise de représailles, la partie modérée des Républicains s’est laissée aspirer dans l’extrême-droite. En même temps, les électeurs de divers bords se laissaient séduire par les programmes et promesses populistes maniées à la louche. En Amérique aujourd’hui, c’est un peu comme si les Gilets jaunes avaient renversé le gouvernement.
Adoptant les méthodes mafioso-dictatoriale de son mentor, V.Poutine, Donald Soprano a rallié ses opposants internes par chantage, puni les irrécupérables en leur cassant les genoux ou en coupant leurs ailes, et nommé partout des brutes épaisses ou incapables mais totalement dévouées. Il a phagocyté la Cour suprême, la Département de la Justice, le FBI, la CIA. Les journalistes accrédités sont à présent choisis par la Maison Blanche. Depuis quelques jours, les juges fédéraux qui rendent des jugements contraires aux souhaits du Prince sont menacés d’impeachment, les attorneys qui ont travaillé sur des affaires Trump sont licenciés.
Ce qui demeure incompréhensible, c’est l’imperméabilité des Républicains à tout ce qui ne vient pas de Trump et l’adoption enthousiaste de ses actes et de ses projets. Une telle décérébration est stupéfiante dans un tel pays développé qui semble aujourd’hui tout prêt à accepter un pouvoir absolu. Qu’est devenu l’anti-communisme viscéral et primaire qui a nourri des générations d’Américains ?
N’y a-t-il pas une, plusieurs grandes voix pour s’élever et éclairer les Américains sur ce vers quoi ils marchent ? Que font les anciens Présidents, les artistes respectés, les Sénateurs démocrates, les gouverneurs modérés ? On n’entend rien, à peine Bernie Sanders et pas du tout les Woke.
Je l’ai écrit dès le 18 novembre 2024 : nous assistons à la naissance d’une dictature. L’enfant se porte bien mais le pronostic vital de la mère est engagé.
Merci, Kaïka, pour ces précisions. Je n’avais mis quelques noms d’artistes dans ma liste de grands silencieux que pour ne pas citer que des hommes politiques. Pendant la campagne de Kamala H. les acteurs se sont exprimés en abondance dans les talk-shows pour critiquer et ridiculiser Donald Trump. On sait que cela a eu l’effet contraire à celui recherché : renforcer les adeptes de Trump dans leurs convictions. Je voudrais que des sages reconnus s’exprime et Mark Hamill, vétéran de la Guerre des Etoiles et Mark Ruffalo, pourtant bon acteur, n’atteignent pas pour moi le statut de sage. R de Niro et M. Streep auront beau parler, ils n’ont pas l’envergure et n’auront pas l’impact d’un homme politique respecté.
Aujourd’hui, SNL et les talk shows du soir US sont remplis de choses parfois très drôles sur Trump. Ses opposants rient volontiers de l’imbécile orange, tandis que ses admirateurs grincent de rage et jurent de venger leur idole des infamies que profère ces intellectuels privilégiés. Mais je viens de dire une ânerie : les adorateurs ne regardent pas ces chaines là.
Certains artistes et politiques s’expriment mais en ‘privé’ sur les réseaux sociaux certains en dehors de Meta et X, comme Mastodon ou Bluesky. Mark Hammil, Mark Ruffalo, Robert de Niro, Whoopy Goldberg, Meryl Streep, ceux que j’ai vu passer.
Ce qui m’a le plus frappé après la diffusion virale du discours de Malhuret aux EU est que beaucoup de personnes disaient justement « on aurait aimé que ce soit l’un de nos politiciens qui ait dit ces choses ». Trop précautionneusement peut-être, l’opposition à Trump et ses sbires commence à prendre forme. Elle, plus l’inflation qui ne faiblira pas, la bourse qui dégringole, la mise à pied anarchique de dizaines de milliers de fonctionnaires, la réaction spectaculaire des voisins canadiens, tout ça permet d’augurer une piteuse retraite de Trump en pleine bataille. Les élections mi-mandat sont dans moins de deux années.
Winston Churchill, bien sur. Pour ce qui est de Ronald Reagan, je me souviens seulement qu’il aimait raconter des histoires drôles, surtout aux dépens des russes. Pour ce qui est de son éloquence, je fais confiance à M.Malhuret.
Interrogé ce matin sur France Inter par (l’agaçante) Sonia Devillers sur ses modèles en éloquence, Claude Malhuret en a cité deux : Winston Churchill et…Ronald Reagan. Intéressant, non ?
Ah ! Si seulement Obama, Clinton, ou meme Bush avait prononcé un tel discours, ou le leader de l’opposition Démocrate au Sénat, ou même à la Chambre des Représentants, ou même seulement Brad Pitt, ou Julia Roberts, ou Adrian Brody, ou même n’importe quel journaliste d’un peu de poids…
Mais non, les hommes politiques Républicains sont décervelés ou craintifs, leurs équivalents Démocrates sont tétanisés et dispersés, les anciens présidents n’osent pas en vertu d’une coutume que Trump, ancien président lui-même n’a pas respecté, les fonctionnaires, les journalistes, les hommes d’affaires craignent pour leur travail et même commence-t-on à dire, pour leur famille.
Alors, que Macron, Malhuret, Trudeau, le gouverneur de l’Ontario et tous les autres que je n’ai pas entendus mais qui ont parlé ne perdent pas courage, mais ne se fassent pas d’illusion non plus.
Ah! Monsieur Malhuret ! Quel talent pour l’analyse et la synthèse, mais surtout quel talent d’orateur ! Le style, le fond, le ton, la diction, tout ! Moi qui chaque jour, au risque assumé de lasser, m’efforce d’écrire de percutantes diatribes propres à faire réfléchir quelques obstinés de l’amitié Franco-Russe, quelques adeptes du bon-cotéisme de Trump, j’aurais rêvé d’écrire un tel chef d’œuvre de catilinaire. Donc, chapeau, Monsieur le Sénateur ! J’ai publié sur le JdC un lien vers son discours. Je lui ai même envoyé un mot. (Ce qu’il a dû être content !)
C’est vrai que son discours a été diffusé en extraits par les télévisions US, disons au moins CNN, MSNBC et quelques autres chaînes nationales (mais probablement pas Fox News ni les chaînes locales des états rouges.) Il a été surtout diffusé in extenso et avec enthousiasme sur les réseaux sociaux par les blogueurs anti-Trump, qui sont légion. Une séquence précédente impliquant un Français avait connu le même engouement au USA, c’est celle où E.Macron corrigeait les paroles que venaient de prononcer l’agent russe à Washington. Gros succès d’estime pour le Sénateur et pour le Président.
Mais quel est leur impact hors de nos frontières et plus spécialement aux USA ? Fox News y est la chaîne le plus regardée. Les blogueurs pro-Trump sont dix fois plus nombreux que les anti-Trump. Les millions de Musk vont dans les publicités vantant les mérites de Trump.
C’est pourquoi je crains, non, je suis certain, que ce discours n’aura d’impact qu’à l’intérieur, et encore, tant les opinions sont ancrées dans les esprits de façon quasi immuables.
Malgré toutes ces réserves, bien sûr, je suis heureux et fier qu’un élu français ait exprimé aussi fort et aussi bien tout ce que je pense.
Si! Il y a une voix qui a éclairé les américains sur ce vers quoi ils marchent, c’est celle d’un certain Claude Malhuret, et cette voix, venue d’ailleurs, a profondément réveillé les consciences. C’est un bon debut.