Mourir pour les Sudètes ? Encore ?

Il y a deux ans exactement aujourd’hui, le 25 janvier 2022, voici ce que j’écrivais après avoir vu le film « L’Étau de Munich« . Depuis deux ans, il s’est passé bien des choses, dont le 24 février 2022, l’attaque russe sur l’Ukraine, un mois exactement après cet article.

Je viens de voir un film sur Netflix, L’Étau de Munich, dont le cadre se situe pendant la crise des Sudètes en 1938. La crise des Sudètes, c’est cette période où Hitler, après avoir annexé l’Autriche, et souhaitant continuer à augmenter l’espace vital allemand comme il l’avait promis au peuple, masse ses troupes à la frontière avec la Tchécoslovaquie dont il exige qu’elle lui cède la région des Sudètes. La Tchécoslovaquie refuse. La tension monte, car si la France et l’Angleterre veulent défendre la Tchécoslovaquie, ce sera la guerre avec l’Allemagne. Les Français pas plus que les Britanniques ne veulent mourir pour les Sudètes. Hitler les convainc facilement que s’ils lui laissent les mains libres pour annexer la région des Sudètes, c’en sera fini des revendications territoriales de l’Allemagne nazie, ce sera « la paix pour mille ans ». Les célèbres et désastreux accords de Munich sont signés en ce sens en septembre 1938. On connait la suite. Daladier à Paris, et Chamberlain à Londres sont accueillis en sauveurs de la paix. On se souviendra de l’exclamation de Daladier en voyant l’enthousiasme de la foule venue l’accueillir : « Ah les cons ! S’ils savaient… » Cela leur vaudra surtout une de ces fameuses apostrophes de Winston Churchill : « Vous aviez le choix entre le déshonneur et la guerre. Vous avez choisi le déshonneur. Vous aurez la guerre. »

Le film, d’un intérêt moyen, est d’une excellente qualité sur le plan de la reconstitution (décors, costumes) et des acteurs, notamment avec Jeremy Irons dans le rôle de Chamberlain. Dans une tentative de réécriture de l’Histoire, le film se termine sur un commentaire affirmant que la signature de l’accord avait réussi à reculer la guerre d’un an (et même davantage si l’on considère que les affrontements n’ont vraiment commencé qu’en juin 1940), donnant ainsi le temps aux Anglais de mieux se préparer à ce qui allait suivre. Au contraire, il me semblait à moi avoir lu et entendu des historiens affirmer qu’à l’époque de Munich, les armées anglaises et surtout françaises étaient nettement supérieures à l’armée allemande et qu’une guerre déclenchée à ce moment-là aurait eu une toute autre issue que celle que l’on connaitra deux ans plus tard, après qu’Hitler ait eu deux années de plus pour renforcer son armée.

Si l’Étau de Munich réécrit l’Histoire, l’Histoire, elle, se répète ; ou plutôt non, comme disait Marx, l’Histoire ne se répète pas, elle bégaie.

En ce moment (janvier 2022), après avoir annexé de facto la Crimée et quelques petits territoires, Poutine exige des USA et de ses alliés la promesse que l’Ukraine ne rejoindra jamais les rangs de l’OTAN. C’est tout ce qu’il demande, Poutine, c’est tout ce qu’il veut. Après, ce sera « la paix pour mille ans ».

En attendant, Poutine a massé des troupes à la frontière ukrainienne, il manipule des hommes politiques ukrainiens pro-russes, pirate les systèmes gouvernementaux ukrainiens pour bloquer le pays, prépare des incidents internes pour justifier une nouvelle pénétration en Ukraine.

Hier soir, le Département d’État a mis en état d’alerte maximale 8500 hommes de plus en soutien immédiat des forces de l’Otan. Certains membres de l’Alliance commencent à bouger des troupes. Le porte-avions Charles De Gaulle repart en Méditerranée. De terribles sanctions économiques sont promises à la Russie. Tout le monde semble d’accord. Tout le monde ? Pas tout à fait. L’Allemagne semble bien freiner des quatre fers et briser cette unanimité occidentale. : un Amiral dit que tout ce que veut Poutine, c’est d’être bien considéré. Le Chancelier allemand dit que les sanctions, hein, faudra faire gaffe.

Et pourquoi donc ? L’antimilitarisme traditionnel de l’Allemagne ? Pensez-donc !

Sous la pression des verts, l’Allemagne s’est lancée dans une folle politique de dénucléarisation de son énergie. Elle dépend donc aujourd’hui principalement de son charbon et du gaz russe. Passons provisoirement sur le fait qu’avec son charbon, elle contribue notablement à l’accélération du réchauffement climatique et à la pollution atmosphérique de l’Europe du Nord.

Mais ne passons pas sur le fait que son indulgence actuelle vis-à-vis de la Russie vient essentiellement de sa dépendance énergétique.

En cas de sévères sanctions économiques, la seule réponse non militaire que Poutine pourrait avoir et pourrait peut-être tenir (mais combien de temps) serait une réduction de ses exportations de gaz vers l’Europe de l’Ouest et principalement vers l’Allemagne, ce qui serait catastrophique pour sa belle industrie exportatrice.
Poutine a donc trouvé son maillon faible, l’Allemagne.

On notera au passage qu’encore une fois, l’imbécile intransigeance militante écologiste aura conduit à un résultat opposé aux intérêts de l’écologie : elle aura provoqué une plus grande pollution d’une région du monde, accéléré encore le réchauffement climatique et renforcé le pouvoir d’un dictateur climato-sceptique.

A propos de bottes, la Finlande, qui a une longue frontière commune avec la Russie, une très bonne connaissance des méthodes ancestrales de son voisin, et probablement aussi une grande confiance dans les déclarations de ses dirigeants, demande à intégrer l’OTAN avec insistance.

Paris, le 25 janvier 2022, J —28

 

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