Piqûre de rappel – 2

C’est l’été et vous allez partir pour quelque pays insalubre où, si vous êtes surs de trouver en abondance moustiques, frelons, et méduses, il est à peu près certain que vous ne trouverez pas une seule bonne librairie. C’est donc l’heure d’une petite piqure de rappel. Rassurez-vous, ce n’est pas la peine de prendre rendez-vous, et ça ne fait pas mal : il suffit d’aller sur Amazon, de taper Philippe Coutheillas dans la case de recherche et d’acheter Blind dinner ou La Mitro, ou les deux. Vous pouvez aussi penser à vos amis et en prendre plusieurs exemplaires. En attendant voici un extrait de l’une de ces deux œuvres indispensables à un été en sécurité.  

LA MITRO (Extrait)

 (…) Quand Félix et le contrôleur-adjoint sont arrivés devant l’escalier du bureau-atelier des Poids et Mesures, il n’y avait là que Mireille Pétugue, la femme du cousin d’Elzéar. Elle fait la secrétaire de mairie deux fois par semaine. Au bruit de la porte claquée, elle était sortie affolée de son bureau. A présent, elle était plantée deux marches au-dessus de l’entrée et elle parlait à la porte en fer.

«  Eh, Gérard, qu’est-ce que tu fais enfermé là-dedans ? Tu sais que t’as pas le droit d’être là ? »

Comme la porte ne répondait pas, elle a continué :

« Dis-donc, tu m’as fait une frousse de tous les diables tout à l’heure à claquer la porte comme ça. Ça a fait un bruit d’enfer. On aurait dit un avion de Salon qui passait le mur du son. Eh, Gérard, tu m’entends ?

— Fous le camp, Mireille. Tu fais partie de la bande ! Je vais tout faire sauter. J’ai de la nitro !

— De la quoi ?

— De la nitro ! De la dynamite, quoi ! Je vais tout faire sauter !

— Aïe ! Aïe ! Aïe ! Aïe ! Saint Mère de Dieu, mais tu es complètement calu ! »

Elle remonta l’escalier en bousculant les deux arrivants, puis enfila en courant la rue du Béal. Elle criait :  » Il est fou, il va tout faire sauter, il a de la dynamite ! » Félix la regarda s’éloigner. Il trouvait rigolo de la voir se tenir la tête à deux mains en criant et en agitant ses grosses jambes dont les chairs tremblotaient au rythme de la course. Elle finit par disparaître au coin de la rue Espariat.

Pendant que Cabanis tapait du plat de la main sur la porte métallique en criant « Gérard, Gérard, ouvre-moi ! », Félix ajoutait au chambard en hurlant « Au secours, au secours ! Ça va péter, ça va péter ! »

D’ordinaire, il suffit d’un accrochage de rien du tout pour que la place Honoré Panisse se remplisse de la moitié des habitants de la ville. Alors, vous pensez si le capharnaüm en cours allait en faire sortir, du monde !

L’attroupement qui s’était formé en haut des marches grossissait de minute en minute. A présent, il obstruait complètement la rue du Béal et commençait à déborder sur la place. Ceux qui étaient le plus loin du cœur du drame ignoraient tout ou presque de ce qui se passait. Alors, ils voulaient savoir et, bien naturellement, ils poussaient pour se rapprocher de l’épicentre. Ceux qui en étaient tout proches en savaient déjà assez pour comprendre qu’il se pourrait qu’il y ait du danger à rester dans les environs plus longtemps. Alors, bien naturellement, ils poussaient pour s’éloigner. Par moments, ceux qui voulaient s’enfuir semblaient l’emporter, ce qui créait une sorte de reflux, comme une vague qui se retire d’une anfractuosité. Mais bientôt, la réaction puissante de ceux qui voulaient savoir, forcément plus nombreux et donc plus forts,  créait le mouvement inverse de la vague qui se rue vers le rocher. À la fenêtre de son appartement du troisième étage d’où il dominait la scène, le vieux Courteissade, qui était sourd comme une cougourde, ne comprenait rien au spectacle, mais il s’amusait bien.

En bas, les nouvelles se propageaient de façon centrifuge et, ce faisant, elles se déformaient de façon exponentielle.

« C’est le Parisien qui a tourné fada ; il veut faire sauter l’Hôtel de Ville !

— Il paraît qu’il y a un vigile qui a pris des otages! Il veut une augmentation…

— Non, c’est Pétugue. Il a mis trop de glycérine dans l’essence de l’angliche. Alors, il est furieux…

— Il y a un vin d’honneur dans les sous-sols de la mairie… »

Pendant ce temps, dans le brouhaha général, Elzéar Cabanis essayait d’établir la communication à travers la porte avec son beau-frère.

« Gérard, sors dehors ! Toute la ville est là ; et le maire aussi ; et les gendarmes vont arriver.

— Tant mieux ! Qu’ils viennent. Et les pompiers aussi ! Et le curé aussi ! Comme ça, on sautera tous ensemble !

— Mais qu’est-ce qui te prend ? Qu’est-ce qu’il y a?

— Fais pas comme si tu savais pas, Elzéar. Tu fais partie du complot, t’es de la bande. Je vais tout faire sauter !

— La bande ? Mais quelle bande ?

— La bande des salauds qui se foutent de ma gueule depuis dix ans, avec en tête la reine des salopes qui me fait cocu depuis dix ans et demi. » (…)

Ah ben, oui ! Fallait pas ! 

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Cliquez vers  ———> LA MITRO 

5 réflexions sur « Piqûre de rappel – 2 »

  1. Comme convenu, voici, chers lecteurs du JdC, le programme des publications de 16 h 47 pour la semaine à venir :
    – Jeudi 6 juillet : Les Fleurs du Mali, par Géraud
    – Vendredi 7 juillet : La Petite Culotte de Françoise, par Lariégeoise (pour public averti)
    – Samedi 8 juillet : Les Corneilles, ch 28 (quel suspense !), par Lorenzo du Bon Marché
    – Dimanche 9 juillet : Honni soit qui Mali pense, par Géraud
    – Lundi 10 juillet : La Petite Culotte de Myriam, par Lariégeoise (pour public très averti)
    – Mardi 11 juillet : Les Corneilles, ch 29 (quelle écriture !), par Lorenzo du Bon Marché
    – Mercredi 12 juillet : Y a pas de mal au Mali, par Géraud
    – Jeudi 13 juillet : La Petite Culotte d’Annick, par Lariégeoise (pour public très averti et, si possible, de gauche)
    – Vendredi 14 juillet : Les Corneilles, ch 30 (quel feu d’artifice !), par Lorenzo du Bon Marché

  2. ce n’est pas à nous de juger, mais c’est rigolo

  3. Bien que je ne souhaite pas que l’espace des commentaires devienne un lieu de “tchatte“, pour une fois, je serai bref :
    -Ce type de calembour est-il vraiment nécessaire ?

  4. Pour ce qui est de la publication à 16h47 des récits érotiques de l’Arrière Soyeuse, la décision a été reportée à la prochaine AG. Plusieurs d’entre nous considéraient que les lecteurs du JdC abonnés à Télérama seraient peut-être choqués par ces textes avant-gardistes.

  5. Après une Assemblée Générale où notre cohésion a encore fait ses preuves, nous, les Co-Co du Jdc, avons pris acte des exigences budgétaires qui t’empêches désormais d’annoncer les articles à paraître.
    Pas de problème ! Nous avons trouvé la parade. Nous annoncerons nous-mêmes ces futurs articles mais, pour des raisons elles aussi budgétaires, uniquement ceux de 16 h 47. Donc, réjouissez vous, chers lecteurs du JdC, car les prochaines publications vont vous tenir en haleine pendant un bon moment. Les récits passionnants de Géraud en Afrique, d’abord, dont Lariégeoise est friande, et la suite remarquable des Corneilles qui, si j’ose dire, vont enfin s’envoler !

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