Sans filtre – Critique aisée n°250

temps de lecture : 2 minutes

critique aisée n°250

Sans filtre
(Triangle of sadness)
Ruben Ostlund- 2022 – 149 minutes
Palme d’or du Festival de Cannes 

Ce n’est pas parce que j’en suis à ma 250ème critique aisée que je suis devenu critique professionnel ; la preuve, c’est que je me refuse encore à juger un film sur ses intentions et que je persiste à le critiquer subjectivement – comment faire autrement ? – d’après le résultat perçu.

Ouais, Sans filtre est une critique acide de la société ultra-riche, de ses ultra-serviteurs et de ses parasites.
Ouais, Sans filtre est une étude sarcastique des quelques caractères, qu’autrefois vous et moi aurions considérés comme exagérément caricaturaux, mais qui, à en croire les magazines spécialisés, les réseaux sociaux et les émissions de télévision de M6, existent véritablement et mènent effectivement le monde : les oligarques russes et milliardaires, jouisseurs sans vergogne, les très vieux, très distingués et probablement un peu anoblis qui jouissent d’une douce et méritée retraite après avoir fait fortune dans les bombes, mines et grenades, les mannequins et mannequines, mesquins et stupides qui vivent la vie des ultra-riches en se photographiant pour le plus grand abrutissement d’une génération décérébrée, les domestiques prêts à toutes les couleuvres pour obtenir le pourboire ultra-généreux qui soignera leur ego, les esclaves immigrés qui nettoient, frottent, grattent, récurent les ultra-déjections du monde du dessus pour nourrir leur famille restée au pays…
Ouais, Sans filtre, c’est cela avec en plus, Ile des Esclaves moderne, la mise cul par-dessus tête de tout ça, le renversement de cette hiérarchie quand l’imprévu, la catastrophe survient et que ne comptent plus que l’habileté à faire du feu ou à pêcher, et finalement, peut-être le meurtre qui empêchera le retour à la situation antérieure.
Ouais, Sans filtre est un film plein de louables intentions : nous faire toucher du doigt la stupidité d’un monde fondé sur l’argent, l’image et la cupidité, nous faire réaliser sa fin inéluctable, ou du moins l’impossibilité de sa perpétuation.

Ouais, ouais, mais pour être tout cela, Sans filtre n’a pas choisi le ton de la comédie légère, ni même celui de la comédie grinçante. Sans filtre donne très vite dans la farce, la farce bien lourde, bien pleine de soulographies et d’empiffrements, d’excréments et de vomissures.

Pour le spectateur que je suis, si les intentions du réalisateur ne m’ont pas échappé — comment l’auraient-elles pu — ce qui a prévalu rapidement, et même bien avant l’apparition des scènes vraiment scabreuses, c’est la saturation, l’écœurement et, finalement, l’ennui.

D’autres spectateurs pourront juger Sans filtre admirable, caustique, jouissif  — quel mot horrible pour qualifier de l’art ! — révolutionnaire, et ils auront raison, du moins leurs raisons. Moi, j’ai trouvé ça ennuyeux. Très.

J’essaierai pourtant de ne pas oublier que le même réalisateur nous avait donné « The Square », esthétiquement parfait et satyriquement sophistiqué, et « Snow therapy », familialement inquiétant. (Oui, je sais, ces deux derniers adverbes n’existent pas. Pas encore…)

 

Une réflexion sur « Sans filtre – Critique aisée n°250 »

  1. Ouais, j’l’ai pas vu et j’le verrai pas. Ce monde des ultra-riches, vulgaire, ne m’intéresse pas mais surtout il me dégoûte absolument quand il est une constante des régîmes ultra-autoritaires au premier rang desquels la Chine et la Russie, régîmes entretenant le feu de la corruption (le guangxi en Chine) par nécessité pour survivre beaucoup plus que par tolérance. Bon! Ouais, je sais, le génie de la corruption existe partout depuis toujours. Je préfère celui de la créativité ou de l’inventivité qui procure une richesse méritée, presque respectable.

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