On ne peut pas lire que du Barbara Cartland

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Avez-vous lu les « Chroniques du grand micmac » d’Alexandre Vialatte ? Non ? Faudrait vous décider !
Dans l’une d’entre elle qui s’intitule histoires noires et histoires blanches, Alexandre veut nous inciter à lire le dernier recueil de nouvelles de Jacques Sternberg. Jacques Sternberg fut un auteur belge qui eut son heure de gloire dans la deuxième moitié de ce siècle bizarre que fut le XXème, période où les nouvelles se vendaient encore. Les siennes se situaient dans le domaine de l’humour noir, de la science-fiction, pour tout dire, du bizarre. Aujourd’hui, Sternberg est totalement oublié., Mais si vous tombez un jour sur un de ses recueils, plongez-vous y (plonjévouzi ?) pour y passer un moment agréable, rigolo ou effrayant.
En attendant cet événement improbable, veuillez lire le début de cette chronique d’Alexandre Vialatte qui nous apprend que parfois, il faut abandonner Barbara Cartland.

« On ne peut pas toujours lire l’histoire de Monsieur Dupont qui épousera Mademoiselle Durand à la page 240 après mille péripéties qui ont bien failli nous faire croire le contraire. (Dieu ! Que j’ai frémi pour leur bonheur !) On sait bien qu’elle est fille d’officier supérieur, qu’elle fut chargée de diplômes comme un âne de reliques dans les couvents les plus distingués, qu’elle connaît les sous-préfectures, la superficie de la Pologne et même le pluriel des noms à trait d’union, qu’elle est vertueuse quoique pauvre, et que sa rivale est une chipie qui n’a pour elle que ses gros sous et qui vit toute barbouillée d’huile parce qu’elle mange salement les asperges ; et aussi que le jeune homme, qui n’est pas un idiot, comprendra bien, autour de la page 124, tout l’intérêt qu’il y a à épouser une femme qui peut vous dire n’importe quand sans hésiter le pluriel du mot garde-chasse, plutôt qu’une souillon qui vit dans la tache d’huile jusqu’à la lessive de printemps depuis le début de la saison des primeurs, et n’est en somme qu’un billet de banque graisseux. (Comment pourrait-il hésiter entre un Larousse et un torchon sale ! La vie commande ! Et qu’est-ce qu’une vie sans dictionnaire ? On se le demande. Une aventure manquée.) On sait tout cela ; mais enfin, jusqu’au bout, quand on manque d’habitude, on a peur que les jeunes premiers ne comprennent pas bien ; On imagine des choses horribles, des obstacles insurmontable : par exemple qu’il sache lui-même la superficie de la Pologne, ou qu’il n’ait jamais besoin de sa vie du pluriel du mot « garde-chasse ». Et on frémit voluptueusement et c’est ce qu’on cherche. »

7 réflexions sur « On ne peut pas lire que du Barbara Cartland »

  1. La gravité, si tout s’échappe c’est à cause de la gravité. Sans un pont pour créer des liens il y a de bonnes chances, plutôt de grands risques que tout s’effondre et la conséquence nous échappe. Seul l’inconnue subsiste et comme on en a peur il dilate l’esprit.

    L’expenssion de l’univers est sans doute la solution afin de laisser la place à tout ce qui tombe avant qu’il ne s’effondre. Autrement je ne verrait pas le rapport entre Barbara Cartland, Alexandre Vialatte et le pluriel des mots composés.

  2. « Cher connard », moi j’en pense rien de ce titre, mais son rapport avec Barbara Cartland, Alexandre Vialatte et le pluriel des mots composés m’échappe.

  3. Les gardes-chasse de Balmoral sont en deuil mais ils n’ont rien à craindre pour leur garde-manger.

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