AVENTURE EN AFRIQUE (1)

Géraud (voir ci-contreétait, non ! est géomètre-expert (car Expert un jour, Expert toujours). A présent qu’il a pris sa retraite, il s’est mis à écrire quelques souvenirs du temps où, jeune VSNA (Volontaire du Service National Actif), il accomplissait son temps au Niger entre novembre 1972 et janvier 1974.

Il va nous raconter ici quelques-unes des aventures qu’il a vécues au milieu des Djema, des Haoussa, des Peuls et des Touaregs.

 La première scène se passe le 15 novembre 1972. Maintenant, c’est Géraud qui parle :

15 novembre 1972

Arrivé à Niamey, au sortir de l’avion, la chaleur nous tombe dessus, toujours avec mon costume de velours marron par plus de 30 degrés. Je suis accueilli par mon prédécesseur Jean-Georges Martinet, ingénieur géomètre INSA de Strasbourg. Il me conduit à la case de passage dite « des infirmières » dans un quartier populaire de la capitale.

La case des infirmières

La case des infirmières était une grande case de passage. Antérieurement, des infirmières avaient dû l’occuper d’où son nom. C’était une villa de type colonial avec un petit enclos bordé de hauts murs avec un garage indépendant. La rue était en terre battue avec deux grands fossés de part et d’autre pour récolter les eaux pluviales et usées. Les odeurs et les bruits m’ont marqué. Les odeurs tout d’abord : un mélange d’épices, de grillades et d’eaux usées. Les bruits ensuite, avec le chant du griot accompagné de son espèce de violon, les klaxons des voitures, les navettes des métiers à tisser qui s’entrechoquaient. Étaient hébergés dans la case de passage des coopérants en attente de logement ou d’un départ en brousse. Ensemble, nous avions décidé d’embaucher un boy pour la cuisine et le ménage de toute de la case.

Issoufou Ousman avait donc été employé. Mes colocataires m’avaient prodigué quelques conseils. Ils recommandaient notamment de garder les boîtes de conserves utilisées et de les remplir d’eau pour baigner les pieds de mon lit afin d’éviter la désagréable surprise de retrouver un margouillat ou autres bestioles à l’intérieur. Pour les mêmes raisons, il fallait placer tous les soirs ses vêtements et ses chaussures sur le lit. Une quinzaine de jours après mon arrivée, je suis allé à aéroport récupérer ma cantine qui arrivait par un avion-cargo. Dans un grand hangar, elle se trouvait à environ 5 m de hauteur. L’élévateur était en panne. Le magasinier la laissa tomber au sol. Dans sa chute elle a entraîné un carton placé à côté d’elle. Un liquide noir s’en est écoulé, s’est mis à mousser et à attaquer la dalle en béton. Sur le carton il était écrit “Coca-Cola”. C’était du concentré pour préparer les fameuses canettes. Nous buvons cela ! Dans la malle contenant assiettes, cocotte-minute, filtre Pasteur, magnétophone, draps de lit… il n’y avait pas trop de dégâts.

Le Génie Rural

Pour me rendre au Génie Rural j’empruntai un taxi avec d’autres passagers qui descendaient ou montaient tout le long du parcours. Le Génie Rural était situé dans un quartier résidentiel, le long d’un large boulevard en retrait de la voie. L’ensemble était constitué d’un bâtiment principal avec un bâtiment secondaire dans la cour arrière, étaient mon bureau, le magasin et l’atelier du service. Mon bureau recouvert de plaques d’Everite ne possédait pas de climatiseur à mon arrivée, il y faisait une chaleur intense.

Dans la cour il y avait : des véhicules à réparer et des épaves. Derrière mon bureau étaient entreposés des crânes d’éléphants et hippopotames, pour quelles raisons, personne n’a pu me le dire. Au milieu de tout cela circulaient les deux chèvres du gardien. Au cours de mon séjour j’ai planté deux acacias devant mon bureau avec la consigne de les arroser.

Le Génie Rural dépendait directement du ministère de l’Economie Rurale et de l’Elevage. Son directeur était Mamadou Cissé. Le directeur technique était un coopérant civil Michel Colin de Verdière ingénieur IGREF. Lorsque je suis arrivé, mon prédécesseur Jean-Georges Martinet m’a présenté à Mamadou Maury le chauffeur de la Land Rover qui m’avait été affectée ainsi qu’à tout le personnel de la Section Topographique. Ils étaient tous noirs, des grands, des petits, j’étais incapable de les reconnaître au milieu de l’ensemble du personnel du Génie Rural. Lors de mes premiers déplacements sur le chantier de Sadia, tout le plateau arrière de la Land Rover, sous la bâche, était rempli de monde. Il y avait des personnes de la section topographique et d’autres du Génie Rural. J’ai fini par comprendre que ces derniers allaient se promener ! Un matin j’ai fait descendre tout le monde pour ne faire remonter que mon personnel. Je n’ai plus promené personne.

La section Topo

Dans le bâtiment principal du Génie Rurale étaient installés la direction, le bureau d’études et le bureau de suivi de chantier. Le passage obligé était le secrétariat gardé par deux belles « fatys ». Lorsque nous voulions voir le directeur Mamadou Cissé, une des « fatys » regardait à l’intérieur du bureau par un petit trou dans la porte, pour voir « où en était le directeur »: y avait-il déjà quelqu’un ?, lisait-t-il le journal ?, dormait-t-il sur son bureau ?…

Le vent a soufflé à mon oreille que Cissé qui avait fait ses études en France et en avait ramené une femme. Il lui avait fait deux garçons jumeaux, signe de sa grande virilité. Madame Cissé avait envisagé un jour un vol sur la France avec ses deux enfants, mais elle s’est fait stopper : on lui a expliqué qu’elle pouvait partir seule mais pas seule avec ses enfants sans l’autorisation de son mari. J’ai rencontré à plusieurs reprises cette femme au visage fermé et triste. C’est aussi cela l’Afrique.

A SUIVRE

 

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