Liberté, égalité, fraternité… Oui, mais dans quel ordre ?

Morceau choisi

Le devoir d’arracher les misérables à la misère et le devoir de répartir également les biens ne sont pas du même ordre : le premier est un devoir d’urgence ; le deuxième est un devoir de convenance ; non seulement les trois termes de la devise républicaine, liberté, égalité, fraternité, ne sont pas sur le même plan, mais les deux derniers eux-mêmes, qui sont plus rapprochés entre eux qu’ils ne sont tous deux proches du premier, présentent plusieurs différences notables ; par la fraternité, nous sommes tenus d’arracher à la misère nos frères les hommes ; c’est un devoir préalable ; au contraire, le devoir d’égalité est un devoir beaucoup moins pressant ; autant il est passionnant, inquiétant, de savoir s’il y a encore des hommes dans la misère, autant il m’est égal de savoir si, hors de la misère, les hommes ont des morceaux plus ou moins grands de fortune. Je ne puis parvenir à me passionner de la question célèbre de savoir à qui reviendra, dans la cité future, les bouteilles de champagne, les chevaux rares, les châteaux de la Loire.

Charles Péguy, De Jean Coste, 1902

6 réflexions sur « Liberté, égalité, fraternité… Oui, mais dans quel ordre ? »

  1. Je n’ai rien démontré! J’ai évoqué ce que je crois être la posture (certains diront l’imposture) de deux auteurs français d’intérêt (pour moi) que l’on dit ou qui se disent ‘philosophes…’

    Semer le doute est certes, un de mes constants soucis… Dans le doute, on s’abstient! Ce qui nous rapproche des sages mandarins dont l’invitation à l’action se traduisait par la célèbre formule: ‘Ne fais rien!’ Empreinte du Bouddhisme! ou emprunt à cette philosophie/religieuse?

    Pour ma part, je crois qu’une fois identifiés les déterminismes affectant la pratique de la liberté, identifiés et pris en compte par les filles de la philosophie que sont les sciences humaines … la liberté peut renaître de ses cendres! Mais nous ne saurons pas tout… prudence en matière de responsabilisation des autres!

  2. Superbe! Non, René-Jean, je ne parle pas de ta démonstration philosophique, je parle de ta superbe à toi qui vise à nous faire douter de tout, même de la liberté.

  3. Et moi qui pensait que la liberté était un concept philosophique, parfois mentionné par Platon, La Boétie ou même l’horrible Rousseau, que c’était, avec le sens de l’humour, ce qui nous différenciait de l’animal, voilà-t-y pas que c’est, une fois de plus, une pernicieuse arnaque des ventriloques de Dieu, pour leur permettre de satisfaire leurs instincts sadiques ! J’en suis tout retourné !

  4. Puisqu’avec l’aide Jean Yanne, « fraternité = choucroute » (approbation surprenante de la part d’un rédacteur en chef d’un blog ‘familial’!) et qu’égalité admet que ‘certains soient plus égaux que d’autres,’ (je crois que cette formule a été attribuée à Orwell) une fois les miséreux sortis de leurs malheurs; revenons donc à la liberté, ce concept inventé au cours d’un Concile ou d’un Conclave exceptionnel pour pouvoir brûler vif, en bonne conscience, les ‘responsables’ de péchés capitaux! Comment les punir si, ne jouissant pas de ce ‘libre arbitre’ inventé pour la cause, ils n’avaient eu que des ‘réflexes conditionnés’ par le hasard de la naissance ou de la volonté divine qui se manifestait au travers d’un destin saintement ‘écrit d’avance’!

    Redécouvrant avant Onfray ces magouilles ecclésiastiques, Michel Foucault, retirant à l’homme le libre arbitre dont l’Inquisition l’avait affublé, est accusé d’avoir mis fin à l’Humanisme, impensable sans la Liberté!

    La France qui en a offert la statue à l’Amérique se serait-elle TRUMPÉE?

  5. D’ailleurs, pour Jean Yanne, la bonne conjugaison était :
    Liberté, Egalité, Choucroute

  6. Quant à moi, qui ne suis pas Charles Péguy, j’ai toujours pensé qu’il était impossible de conjuguer la liberté avec l’égalité (sauf devant la loi bien entendu).

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