HISTOIRE DE DASHIELL STILLER – extrait du chapitre 7

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Extrait du chapitre 7 : Samuel Goldenberg

Samuel Goldenberg, dit Sammy de Pantin, est un membre important et efficace de la bande du Suédois. Ses spécialités sont le racket et le proxénétisme. Lorsque de la défaite de la France en juin 1940, il ne tarde pas à saisir les opportunités qu’offre l’occupation de Paris par une armée victorieuse qui rêve de Paris depuis toujours. Avec Casquette et Simone, Sammy monte donc une maison de passe qui devient vite l’endroit de Paris où l’on rencontre tous les soirs les officiers de la Wermacht et de la Gestapo et les hauts fonctionnaires du gouvernement de Vichy quand ils passent à Paris. Mais un matin, Sammy est arrêté chez lui comme juif polonais et, malgré ses faux papiers et ses relations allemandes, il est emmené dans un train à bestiau vers l’est. C’était le matin du 17 juillet 1942, premier jour de la rafle du Vel d’Hiv. Sammy tient son journal dont voici un extrait :

(…)

Samedi 1er décembre

Je reprends mon journal après 3 semaines sans rien écrire. Parce qu’il s’est passé des choses : ils l’ont commencée leur tuerie. On s’en doutait mais on voulait pas le croire. Maintenant des tas de gens sont morts, des centaines, peut-être des milliers. Avec Claude on se disait c’est pas possible, c’est des salauds, des ordures, mais quand même, ils vont pas faire ça. Eh ben, ils l’ont fait. Et ils continuent. Claude m’a dit « Faudra témoigner, tu promets ? ». Je lui ai promis à Claude, et quand on fait une promesse à un homme, on la tient. C’est comme ça.

Je crois que c’est le 12 novembre que toute cette horreur a vraiment commencé. Nous les sonderkommandos, on avait bien senti que depuis deux jours y avait quelque chose qui se tramait, un truc dans l’air qui faisait peur. Mais on savait pas quoi. La veille, le 11, tôt le matin ils nous ont mis à une trentaine dans deux camions bâchés. On est sorti du camp et on a roulé peut-être un quart d’heure. On voyait rien. Quand ils ont débâché les camions on était dans une clairière. Y avait des soldats avec des fusils et des mitrailleuses et puis des wachmann avec leurs cannes, et puis aussi un tas de pelles. Ils nous ont dit de creuser. On a trimé toute la journée sans arrêt pour faire un énorme trou tout en longueur. On crevait de trouille. On pensait qu’elle était pour nous la fosse, qu’ils allaient nous tirer dessus à la mitrailleuse et nous flanquer dedans. On pouvait à peine soulever les pelles tellement qu’on était pris par la grande frousse. Y en avait qui faisaient dans leur froc. Moi, plusieurs fois, j’ai vomi. Et puis, le soir, ils nous ont ramené directement à la baraque et ils nous ont enfermés. Interdiction de sortir jusqu’au lendemain midi. Là, ils sont revenus nous chercher en camion et nous ont remmenés au même endroit. Y avait toujours les soldats et des mitrailleuses. Ils gardaient une vingtaine de camions fermés qui attendaient. Les wachmann nous ont dit de les ouvrir et de jeter dans la fosse tout ce qu’il y avait dedans. Et dedans c’était des corps, entassés, emmêlés, tordus, griffés, avec des yeux exorbités, des bouches qui criaient. C’était l’horreur, l’enfer, la folie. Une cinquantaine de corps par camion, mille cadavres. Quand on a ouvert notre premier camion Claude et moi et qu’on a vu ça, moi je suis retombé en arrière et Claude s’est éloigné en titubant et en se tenant la tête à deux mains. Autour des autres camions, c’était pareil, les copains tombaient à genoux, pleuraient, hurlaient, vomissaient. Alors, les soldats ont armé leurs fusils et les wachmann ont commencé à distribuer les coups de trique. Ils en ont assommé quatre ou cinq. Alors on a commencé le travail. Au bout d’une heure, tout près de moi, il y a un copain, un Polonais, je le connaissais à peine, il s’est arrêté de charrier les cadavres et il s’est immobilisé, tout tremblant, tout raide, droit comme un i. En secouant la tête, il répétait « Nié, nié, nié… ». Un sous-off s’est approché de lui. Il lui a crié une fois dessus je sais pas quoi. Comme l’autre ne bougeait pas, il a sorti son pistolet de son étui et dans le même mouvement il lui a tiré une balle dans la tête. Bon sang, à dix centimètres !

Tout le reste de la journée, on a jeté comme ça dans la fosse des corps comme si c’était des vieux vêtements. Y avait de quoi devenir fou. D’ailleurs c’est là que Claude est devenu fou. Ça s’est pas vu tout de suite, mais c’est sûrement là que ça a commencé.

(…)

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