HISTOIRE DE DASHIELL STILLER – extrait du chapitre 2

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Extrait du chapitre 2 : Antoinette Gazagnes

C’est au tour d’Antoinette, la patronne du café Le Cujas, de se raconter devant Stiller. Orpheline, élevée dans un couvent du côté d’Aurillac, un brave type du coin est venue la chercher pour l’épouser et l’emmener à Paris pour ouvrir un bistrot auvergnat. Ça marchait bien pour eux, ils avaient même pris un café plus chic, Boulevard Saint Michel. Tout allait bien jusqu’à ce que le mari d’Antoinette se fasse tuer au front en 1916. Alors, elle a continué à tenir le Cujas, toute seule, et ça marchait bien aussi.

(…)

« La vie s’est écoulée comme ça, tranquille, jusqu’à ce qu’ils nous flanquent encore une guerre, en 39, en septembre. Faut dire qu’au début, on n’aurait pas vraiment dit une guerre…

Ah ? Je vais trop vite ? C’est vrai que vous vouliez que je vous parle de la photo. Bon, d’accord. La photo, je crois que c’était en 1935, en mai. 1935, j’en suis sûre, parce que c’est l’année où on a lancé le Normandie. Pour le mois, j’en suis moins sure. Disons fin avril, début mai. Il devait faire beau, parce que j’avais ouvert la vitrine sur la terrasse. Là, en robe rouge, derrière le comptoir, c’est moi bien sûr. A côté, c’est le petit Robert, le pauvre. Robert Picard… A l’époque, c’était mon apprenti. Il est resté presque deux ans chez moi. Je l’aimais bien, mais il s’est entiché d’une fille et il est parti avec en Indochine. On m’a dit qu’il s’était fait tuer là-bas en 40. Si vous voulez, je vous donnerai l’adresse de ses parents, si elle n’a pas changé depuis. Ça fait quand même treize ans.

Celui-là, c’est Marteau, un artisan du quartier. Pendant des années, il est venu tous les matins prendre son petit blanc sur le zinc. Il était surtout copain avec mon mari, mais après la Grande Guerre, il a continué à venir et c’est devenu un bon ami. Et puis un jour, pendant l’Occupation, il s’est fâché, brusquement, comme ça, je ne sais même plus pourquoi. Vous savez, les artisans, ils ont un fichu caractère, surtout quand il n’y a pas de femme pour les policer un peu — il était célibataire, Marteau. Donc, depuis ce jour, on ne s’est plus parlé. Mais je sais qu’il est toujours dans le quartier. Il a son atelier rue Monsieur le Prince, juste à côté, vous le trouverez facilement.

A la terrasse, là, à part les deux petits métèques, il y a les deux beaux messieurs. Quand je vous disais que j’avais des gens du monde… Non, je ne connais pas leurs noms, mais je sais que c’était des acteurs de cinéma. C’est Marteau qui me l’avait dit. Il les avait vus dans un film d’amour, vous savez, ces films avec des messieurs et puis des dames et puis des belles voitures… À propos de dames, la fille qui est avec eux, là, avec son petit chapeau cloche, c’en était surement pas une, de dame. Plutôt une grue, oui. Les filles comme ça, nous les cafetiers, on les repère tout de suite. Il faut bien, parce qu’on peut pas se permettre de les laisser racoler dans nos établissements. On veut pas d’ennuis avec la police, nous. Alors, en général, on les vire en douceur. Mais là, je ne pouvais pas, vu qu’elle était accompagnée. Non, je ne connais pas son nom non plus. Mais je me suis laissée dire qu’elle travaillait à Montparnasse maintenant. Essayez donc les deux ou trois bars de la rue Delambre. C’est là qu’elles fréquentent en général, ces dames.

Non, les deux gouapes, je ne sais pas qui c’est non plus. Mais j’ai comme qui dirait dans l’idée que ces deux-là, ils se connaissaient avec la fille. Mais je dis ça, je dis rien, n’est-ce-pas ? Bon ! Voilà tout ce que je pouvais vous dire. Vous restez longtemps à Paris ? Revenez me voir, hein ! Ça me fera plaisir. Allez, bonsoir, faut que je ferme, maintenant. »

(…)

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