Qu’est-ce que t’as fait à la guerre, Papa ? (Chapitre 16 – Les dragées )

Lundi 29 juillet

Il fait beau. Je m’installe dans la cour, le derrière sur deux briques au pied d’un arbre rachitique qui me sert de dossier. Je croque des dragées. Ça fait des kilos que nous boulottons. Si je fais un baptême un jour, je demanderai des crottes en chocolat.
A bien regarder, ça a vraiment une sale gueule une caserne, même sous le soleil.
Prunet vient me chercher pour un tour de piste et…grabat-dodo !
 
30 juillet mardi

Longue nuit ; C’est le moment où tout se tait, mais quel bruit au réveil.
Les avions anglais sont venus nous survoler hier et nous ont jeté des tracts, aussitôt saisis par les allemands. Un Oberlieutenant en a même perforé un qui se baladait en l’air d’une balle de pistolet. Bel exploit. Ça nous donne à réfléchir.
On s’en fout des tracts ! Les anglais viennent trop tard. Etait-ce plus difficile de venir nous aider il y a deux mois ?
Les officiers français quittent le camp aujourd’hui, probablement dirigés vers Nancy. Est-ce bon ? Est-ce mauvais ? Comme d’habitude, on n’en sait rien. Ils sont là qui passent au milieu de nous, sans un adieu. Aucun homme ne leur porte leur cantine ou leurs colis. Triste départ.
J’ai fait l’essai de sortir tantôt, avec une corvée. Inutilement ! Chaque fois que je tente de sortir, c’est raté !
Journée sombre sans soleil.

31 juillet mercredi

Rien ne nous dit ce que nous allons devenir. Serons-nous délivrés bientôt ? Sur les montants de mon grabat, j’ai gravé le calendrier d’aout. Candide, je n’avais jusqu’alors gravé que juillet !
Ça fera deux mois de silence des miens dans quelques jours et cependant des amis reçoivent des nouvelles. Prunet, Mas et moi, nous sommes logés à la même enseigne ; c’est mortel !
Il y a même de très nombreuses visites au camp et des prisonniers ont la permission de la nuit pour la passer avec leur femme venue jusqu’ici.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *