Qu’est que t’as fait à la guerre, Papa ? (9-Qu’est-ce qu’on attend ?)

Qu’est-ce qu’on attend ?

Dimanche 14 juillet 1940

Qu’attend-on pour nous délivrer ? Nous avons l’impression d’etre abandonnés par notre gouvernement. Qu’est-ce qu’ils foutent là-bas ? Qu’est-ce qu’ils attendent pour demander notre retour ? Que nous soyons crevés ?
L’épidémie s’étend avec rapidité. Les hommes tombent comme des mouches. J’en vois à chaque instant portés sur des brancards qu’on emmène vers l’infirmerie déjà pleine à craquer.
Par mesure d’hygiène, nous devons passer les heures de la journée dehors et non plus dans les chambres.
Je suis fatigué et pas gaillard du tout. Je veux pourtant tenir. Prunet est cafardeux.

14 juillet 1939 ! Le défilé de nos forces ! C’était tout ce qu’on avait !
Les Allemands ont installé un haut-parleur dans la cour et la musique nous est déversée à pleins godets. Peut-être vont-ils nous donner des informations ?

Ça va mieux

15 juillet 1940

J’ai eu hier soir un mot de Bichette, remis à un camarade qui revenait de l’hôpital de Verdun. Il est ici, dans cette ville. Je vais tacher de le joindre. Cela me ferait plaisir de l’engueuler un peu pour m’avoir plaqué et s’être fait blesser…

Ça va mieux. J’ai mangé un peu mieux hier et je me sens ragaillardi. L’espoir renaît d’être libérés. Je ne sais pas pourquoi, mais il me semble que tout cela ne peut plus durer.

Nous avons eu aujourd’hui pour la première fois des informations à la TSF du camp. Nos geôliers nous gâtent !
J’avoue que leur sollicitude à notre égard me semble extraordinaire. Serions-nous vraiment des prisonniers d’honneur ?
Bien entendu, c’est Radio-Stuttgart que nous entendons mais ça vaut mieux que rien du tout. Et puis, si cette radio ment, la notre nous a bien menti aussi, et à fortes doses encore!..

Le soir.
Il m’a été impossible d’aller voir Bichette. Je tâcherai de lui faire parvenir un mot demain.
La série des malades continue. Nous évitons de boire de l’eau. Illico, je crève de soif.

Il paraît qu’une clause de l’armistice considère comme prisonniers tout court les troupes encerclées le 22 juin (nous en faisions partie) et que nous pourrions rester enfermés jusqu’à la signature de la paix. Mon Dieu, que ce serait long! Il y a à peine un mois que ça dure et nous sommes déjà épuisés!
Par une note dactylographiée venant des officiers internés dans le même camp, nous apprenons la nouvelle constitution française, la fin de la république, etc…Ça me fait grand plaisir, enfin une autorité, cela nous fera du bien après tant d’années de Blumeries.

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