Un couple inachevé (8)

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Chacun dans sa voiture, ils s’étaient suivis jusqu’à la ville. Après avoir tourné un peu dans le centre, quasiment désert à cette heure, ils avaient fini par diner au Novotel-Limoges-Le-Lac parce que c’était pratique pour se garer, et aussi parce que c’était là qu’Olivier était descendu.

8 – L’usine

Au moment où Olivier lit les derniers commentaires de l’Équipe sur l’Open d’Australie dans le café de la rue Saint-Jacques, Aurélie arrive à l’usine Etienne Combes & Fils, route de Ladignac, commune de Saint Yrieix-la-Perche. Elle gare sa Golf 1.0 TSI blanche dans un endroit qu’on ne peut pas voir de la route. Elle choisit d’entrer par les ateliers qu’elle traverse les uns après les autres. Personne… Elle passe entre les machines vertes silencieuses puis elle contourne le vieux four à fuel qui est à l’arrêt depuis un an. Quand elle longe le nouveau four à gaz, dernier investissement décidé par son ancien patron, une sourde explosion se fait entendre. Elle sursaute, mais elle réalise aussitôt que c’est l’automate qui vient d’allumer le brûleur pour maintenir le four en température pendant le week-end. Rien d’inquiétant. Elle pénètre enfin dans les bureaux. Elle longe le couloir qui mène à celui du patron ; pas un bruit, pas une âme ; on est samedi. Elle entre dans le bureau qui est devenu celui d’Olivier et allume la machine à café Delonghi Nespresso Initia dont le témoin lumineux se met à clignoter. Elle glisse dans le logement en forme de petite cloche une capsule compatible Relief Robusta Uganda, et place un gobelet en carton au rebord ourlé sous le bec verseur de la machine. Elle va baisser les stores, elle dépose son sac et son manteau sur l’une des deux chaises visiteurs et revient à la machine à café. Son témoin est maintenant au rouge fixe, signifiant que la machine est prête à remplir son devoir. Elle peut enfin appuyer sur le bouton lumineux dont le sommet s’orne d’un petit dessin symbolisant une tasse fumante. Debout, elle reste figée devant la machine, les yeux fixés sur l’orifice d’où sortira bientôt le café brûlant…. 

Quand hier Olivier lui a téléphoné pour lui demander de le rejoindre dimanche soir au Novotel, elle a dit :

— Bien sûr, Olivier, comme vous voulez, j’y serai à huit heures. Je suppose que vous avez réservé sous le nom habituel ?

Ils ont beau être amants depuis presque huit mois, ils n’ont jamais franchi le stade du tutoiement. Au matin de leur première nuit, devant le plateau du petit déjeuner continental Novotel, ils avaient convenu de continuer à se vouvoyer même en privé, afin qu’un « tu » malencontreux et révélateur ne leur échappe pas devant témoin. Le pli étant pris, ça ne leur posait plus aucun problème. Olivier trouvait même que ça apportait un certain piquant à leurs conversations intimes.

— Comme d’habitude : monsieur et madame Laforêt. Huit heures, c’est très bien. Je ferai mon possible mais je ne pense pas arriver à Limoges avant 9 heures. Prenez donc un verre en attendant. Nous pourrons diner ensuite tranquillement au restaurant de l’hôtel, ou même dans la chambre si vous voulez. Qu’est-ce que vous en pensez ?

Sans attendre la réponse, il lui avait rappelé le programme de travail du lundi en ajoutant :

— Ah oui ! Et puis, j’aimerais aussi que l’on regarde ensemble la question des achats. Il faut absolument qu’on trouve le moyen de faire des économies. Le coût des matières premières me paraît quand même pas mal lourd.  On pourrait commencer à voir ça tous les deux entre huit et dix, juste avant la réunion avec les délégués. Vous pourrez préparer ce qu’il faut, Aurélie ?

— Bien sûr, Olivier, pas de problème.

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