Un couple inachevé (7)

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(…) J’ai bien envie de la louer à l’année, cette baraque. Isolée au bord d’un étang, tout le confort moderne, à peine dix kilomètres de l’usine. Si je veux développer cette boite, il va falloir que je vienne plus souvent et que je reste plus longtemps. Ça me ferait un pied à terre. Parce que le « Novotel-Limoges-le-Lac », ça va cinq minutes. Et puis ces allers-retours entre Paris et Limoges en voiture, c’est crevant.
<<…Après sa très convaincante victoire en trois sets (6-1, 6-2, 6-4) sur De Minaur, Nadal s’estime en progrès de jour en jour depuis le début du tournoi…>>
 — Et puis pour passer du temps avec Aurélie, ça serait quand même plus discret que le Novotel.

7 – Aurélie

Aurélie Millon est la maitresse d’Olivier depuis sept mois.
Entrée chez Etienne Combes & Fils à dix-huit ans, elle avait tout de suite beaucoup plu à Bernard Combes, fils d’Etienne, qui dirigeait l’entreprise à cette époque. Il en avait très vite fait sa maitresse, car la petite était mignonne et ambitieuse. Après qu’il lui ait payé deux années de cours par correspondance, elle était passée aide-comptable, car la petite était vive et courageuse. Trois ans plus tard, elle devenait chef-comptable, car elle était véritablement douée. Quand Bernard Combes se tua dans un accident de voiture du côté de Brive-la-Gaillarde, son fils Jean-François passa du poste de Directeur Commercial à celui de PDG. Sa conception des rapports patron-employés différait de celle de son père et, ne serait-ce que pour faire plaisir à sa mère, il envisagea un moment de licencier Aurélie. Mais il s’aperçut bien vite que la jeune femme était bien plus capable de gérer l’entreprise que lui qui sortait d’une petite école de gestion pour godelureaux de province. Il l’avait donc maintenue à son poste. C’est pourquoi Olivier avait trouvé Mademoiselle Millon dans la corbeille de l’entreprise qu’il envisageait d’acheter, au même titre que les machines, le stock et le carnet de commandes. Il eut bientôt l’occasion de mieux la connaître lors de son audit d’acquisition. En effet, Jean-François Combes ne se sentait pas de taille à discuter avec Olivier, cet ancien de Sup de Co, qui ne connaissait peut-être pas grand-chose à la fabrication des accessoires funéraires mais qui, dès leur première rencontre, l’avait fortement impressionné par sa rapidité d’esprit. C’est pourquoi Jean-François avait accepté avec soulagement la proposition d’Aurélie d’assurer la tâche essentielle, et d’ailleurs obligatoire, de guider leur acheteur à travers les arcanes de la société pour qu’il en acquiert une parfaite connaissance avant la décision d’achat. Il se justifiait à ses yeux, tout autant qu’aux yeux des autres, famille et employés, en assurant qu’il était préférable de laisser un échelon hiérarchique entre l’acheteur potentiel et la direction.

Olivier et Aurélie travaillaient souvent seuls dans le bureau directorial jusque tard dans l’après-midi. Un soir, alors qu’il était particulièrement tard, Olivier rabattit l’écran de son ordinateur en poussant un soupir.

— Aurélie… vous permettez que je vous appelle Aurélie ? demanda-t-il. Je crois que nous avons assez travaillé pour aujourd’hui. Je vous propose de reprendre demain matin à la première heure. En attendant, il est presque neuf heures et vous devez mourir de faim. Puis-je vous inviter à diner ?

Tout en finesse, car la petite était subtile, Aurélie fit d’abord semblant d’hésiter puis, ambitieuse et courageuse, elle ajouta :

— De toute façon, vous savez, à Saint-Yrieix, à cette heure-ci… il faudrait aller jusqu’à Limoges…

Chacun dans sa voiture, ils s’étaient suivis jusqu’à la ville. Après avoir tourné un peu dans le centre, quasiment désert à cette heure, ils avaient fini par diner au Novotel-Limoges-Le-Lac parce que c’était pratique pour se garer, et aussi parce que c’était là qu’Olivier était descendu.

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