Fragile des bronches – Critique aisée 226

Critique aisée 226

Fragile des bronches
Bertrand Blier – 2022
Éditions Seghers – 185 pages–17 €

Décidément, je n’ai pas de chance avec les recommandations de fin d’émission du Masque et la Plume. Après Un Barrage contre l’Atlantique de Beigbeder dont je vous ai dit il y a peu ce que je pensais, voilà que je me suis laissé tenter par le Fragile des bronches de Bertrand Blier.

D’abord, Bertrand Blier pour moi, c’est l’homme qui a contribué (pour de bon) à changer notablement l’écriture avec son premier roman Les Valseuses paru en 1972, puis apporté quelque chose de vraiment neuf au cinéma avec son deuxième long métrage, du même titre, sorti en 1974. Il nous a ensuite régalés, touchés, glacés, choqués, amusés, interpellés avec ses films suivants : Calmos, Préparez vos mouchoirs, Buffet froid, Tenue de soirée, Trop belle pour toi, Les acteurs, Le Bruit des glaçons, pour ne citer que ceux que j’ai vraiment aimés.  Un beau palmarès, quand même, fait de films à chaque fois différents, originaux, jamais vus.

Alors, entendre je ne sais plus qui recommander son Fragile des Bronches à la fin d’un Masque et la Plume, ça me motivait.

Et puis, le titre, rien que le titre, Fragile des bronches était très attirant pour un type comme moi, né, comme Blier, pendant la guerre. Cette expression, aujourd’hui désuète, fragile des bronches, nous autres l’avons tellement entendue pendant notre enfance que ça nous fout comme un coup de nostalgie. Alors, j’ai acheté Fragiles des bronches.

Si la sympathie que j’ai pour Beigbeder ne m’a pas empêcher d’éreinter son Barrage, le respect que j’ai pour Bertrand Blier en tant que réalisateur prolixe et écrivain laconique, me gêne pour dire ce que je pense vraiment de son dernier bouquin. Je vais quand même le faire, bien sûr, mais le plus gentiment possible et en prenant d’avance la modeste précaution de dire que peut-être, probablement, surement même, je n’ai pas compris ce que Blier voulait faire.

La page de garde ne qualifie pas Fragile… de roman. C’est une bonne chose, car visiblement c’est plutôt une autofiction. Mais ce n’est pas précisé non plus, l’éditeur reste dans le vague, comme l’auteur sur ses intentions.

Le narrateur parle au présent de l’indicatif. Ce doit être Bertrand, car les ressemblances sont là : son père est comédien, souvent absent, d’un abord difficile. Et puis, vers la fin, il rencontre Clouzot. Mais, il n’est pas nommé, et le narrateur ne s’appelle pas Bertrand. Il est possible que son nom soit Jean-Michel.

Il nous raconte son adolescence, ses quinze ans surtout. Il tousse, on l’envoie à la montagne dans ce qu’on appelait à cette époque un Home d’enfants près de Megève. Sa mère est à l’hôtel, pas loin. Il va la voir. Elle rencontre un amant. Il rencontre l’amant. Son père vient aussi, il rencontre l’amant aussi. Ils parlent de se battre, mais rien.

Jean-Michel (est-ce bien son nom ?) a quinze ans. Il retourne au home et rencontre Nicole avec qui il couche dans le dortoir des filles. Il rentre à Paris et parle de Nicole avec son copain Blumberg en écoutant Count Basie. Et il recouche avec Nicole, et puis Nicole est séduite par un petit loubard pas antipathique, Jimmy, et puis rien.

Un petit extrait pour que vous compreniez mieux. Voici le texte intégral du chapitre 8 de la première partie :

Je suis convoqué dans le bureau du directeur. C’est le soir. On domine la station et ses mille lumières. Le directeur me regarde au fond des yeux : c’est là où le mal va se nicher.
–Votre maman va rester un petit peu dans la station pour faire du ski ?
–Sans doute, je réponds.
–Vous allez vouloir passer le week-end avec elle ?
–Sans doute.
–Vous allez répondre « sans doute » à toutes les questions que je vais vous poser ?
–Sans doute. Le directeur me mettre une grande tarte dans la gueule, immédiatement suivie d’une autre. Je tombe de ma chaise. Sanglots.
–Vous foutez de ma gueule ou je rêve ?
–Sans doute.

Pour ce qui est de la forme, Blier a découpé son bouquin en 10 parties, découpées chacune en un petit nombre de chapitres. Beaucoup de chapitres occupent moins d’une page entière. Voici une photo du chapitre 7 de la 4ème partie.

Mais je vais arrêter là, parce que je suis incapable d’aller plus loin. Je ne comprends rien à ce récit, ni à ce qu’il peut y avoir dessous, dessus ou à coté, rien ! Ça me désole et ça m’ennuie, pas au sens de ça me contrarie mais au sens d’ennui, d’ennui profond, de désir d’en finir sur le champ avec cette lecture.

Ne pouvant me résoudre à une telle extrémité, j’ai sauté une cinquantaine de pages pour atterrir directement à la fin du dernier chapitre de la dernière partie, la dixième, dont le titre est : Je suis venu pour vous dire quelque chose de très important .

En voici les dernières lignes :

-(…) Je me débecte et j’ai envie de me tirer une balle dans la tête
–Vous avez une arme ?
–Oui j’ai un revolver.
–Et qu’est-ce que vous allez faire ?
–Je vais me tirer une balle dans la tête.
–Quand ?
–Je ne sais pas, un jour.
–Y’a pas d’urgence ?
–Bah non, mais un jour, faut y faire face.
– Au moment de prendre la décision, contactez-moi, j’aurai peut-être des arguments pour vous convaincre de rester sur le parcours. Parfois, nous les jeunes, on a besoin d’un adulte.
–Pourquoi faire ?
–Pour inventer une nouvelle forme de connerie, pas toujours faire la même.

Pas vraiment compris. Mais si quelqu’un veut m’éclairer sur le sens de ce livre, je reste preneur.
Dans Un Barrage…, j’avais décelé chez Beigbeder surtout de la paresse, fille de la facilité.
Dans Fragile…, chez Blier, c’est le désarroi que j’ai décelé, et c’était communicatif.

 

2 réflexions sur « Fragile des bronches – Critique aisée 226 »

  1. Je n’ai pas vraiment foncé tête baissée, mais comme pour Beigbeder, j’aime bien le bonhomme et en plus , en ce qui concerne Blier, il a fait ses preuves avec son livre Les Valseuses et la plupart de ses films. Par ailleurs, les Bronches n’étaient pas encensé mais simplement recommandé en fin d’émission par l’un des critiques. L’avait-il lu ? Agissait-il par amitié ? Il semble que Bertrand Blier ait du mal à se remettre de son dernier échec au cinema. Lors de la promotion, il m’avait l’air complètement déprimé.

  2. Ça m’étonne de toi que tu fonces tête baissée sur un livre sans le «  palper » , le «  sentir » comme on choisit un bon fruit….
    Fût ce t il encensé par le masque et la plume…

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