Déréalisation

C’était au reste un de ces hommes qui aiment assister à leur propre vie, considérant comme déplacée toute ambition de la vivre.

Alessandro Barrico – Soie – 1995

 

7 réflexions sur « Déréalisation »

  1. Bravo!

    Philippe remet le débat au niveau qu’il avait envisagé au départ!

    J’avoue que, par paresse et méfiance, j’avais délaissé la notion, pourtant soulignée par le titre, de ‘Déréalisation.’

    Si je plaide coupable pour ma paraisse, je garde ma méfiance car je redoute que ‘déréalisation’ doive s’entendre au carré. Je persiste à croire que nous sommes dépourvus de moyens d’appréhender le ‘réel’ originel. Les langues nationales ou les langages tribaux construisent des ‘narratives,’ histoires, légendes, théories, conjectures, hypothèses à propos du réel. Au mieux, en philosophant (self réflexivité), nous ne pouvons que nous en distancer, les critiquer, les mettre en question (en nous incluant, bien sûr) et élaborer d’autres ‘narratives, ou ‘visions’ (toutes aussi contestables que celles que nous critiquons) de nous-mêmes et du cosmos.

    Je refuse donc ce terme de « déréalisation » ou de « re-construction » de soi et du monde. Tout, au départ (de notre vie d’observateur) est déjà artificiellement construit par le langage et la grammaire de nos ancêtres sur lequel nous projetons des significations que les ‘leaders’ de nos réseaux de coerséduction (responsables de notre éducation et standardisation fonctionnelle) s’efforcent en vain de contrôler!

    Mais il est vrai que cette méditation (et non médisance) m’amène à un niveau supérieur à celui de mon premier commentaire!

    Mise au point « well taken »!

    Le troisième homme, sans titre ou sous titré!

  2. Bien entendu, tout dépend de la manière dont chacun se confronte au réel. Il est certain qu’en fonction de sa carte écran radar à palpeurs pentatoniques modèle 36 modifié 64 par biorésonance métaldéhyde et de ses réseaux de coersécution, on peut s’extraire de son corps et se surplomber, voire s’interpréter au moyen de force superlicoquences et dévoiler sa face devant l’Eternel féminin.

  3. J’ai qualifié l’homme décrit dans cette citation de victime de déréalisation, et chacun y est allé de son interprétation : vivre sa vie, vivre pour vivre, se regarder vivre, être un connard satisfait de sa vie ou un ambitieux mécontent. Mais moi, j’ai l’impression que l’homme que décrit Barrico se regarde vivre, mais pas de façon satisfaite ou vaniteuse, il se regarde vivre comme s’il regardait une pièce de théâtre ou comme un entomologiste regarderait les activités d’une fourmi. Il ne lui viendrait pas à l’idée d’être Ruy Blas ou de vivre une vie de fourmi. La déréalisation est un symptôme qui m’intéresse. Selon Wikipédia, c’est « une altération de la perception ou de l’expérience du monde extérieur qui apparaît étrange, irréel, et extérieur. Suivant les cas, les éléments normalement ancrés dans la personnalité comme la notion d’existence peuvent être par exemple remis en question. La déréalisation est en quelque sorte une expérimentation d’un doute métaphysique de manière concrète. « 

  4. À chacun son ‘cosmos,’ à chacun sa perception ou vision de lui-même et de son univers!

    Mon décryptage éloigné est donc quelque peu distinct de ceux de mes camarades ou ‘frérots’ du blog des Coutheillas qui, même socio-démo-géographiquement rapprochés, sont loin d’avoir identiquement opiné!

    Partant de mon modeste point de perspective très éloigné, il me semble que…

    – le premier homme évoqué se satisfait de son lieu et milieu de naissance, de son nom et prénom, de sa famille, de son appartenance à sa communauté de décryptage et d’identification génético-économico-sociale; bref, de son destin qui n’est point tragique (ce ne serait pas marrant…) Non seulement, il se suffit à lui-même mais il s’admire et se sent admiré du sexe faible surtout lorsqu’il rentre dans sa brasserie parisienne préférée, braguette grande ouverte par Inadvertance!

    – tandis que le second, l’ambitieux déplacé, peut être même déporté ou contraint à l’exil, s’efforçant de prendre connaissance de ce qu’il doit au hasard de sa naissance (qui n’est pas nécessairement le malheur d’être né) comme à l’aléa de ses pérégrinations au sein des réseaux de coerséduction dans lesquels il a eu à évoluer durant son enfance et adolescence, s’efforce de prendre conscience des déterminismes qui ont affecté sa trajectoire. Ce deuxième homme les assume et/ou s’en distancie selon les aiguillages qui se sont ouverts ou fermés et qu’il a parfois pu avoir l’impression de contrôler, confondant hasard et liberté!

    La grande question, comme l’avait fort bien vu Alain Finkielkraut dans ‘La défaite de la pensée,’ est de savoir si, comme le premier homme ici présenté, « l’on est ‘pensé par notre culture » (ou notre ‘habitus’ comme disait Bourdieu, adoré sur ce blog!) ou, comme le deuxième homme, ici dénigré par le premier, si l’on parvient à penser et contrôler certaines des variable susceptibles de nous affecter et faire quelques choix réfléchis parmi elles lorsque, par hasard, nos itinéraires débouchent sur quelques aiguillages décisifs.

    Le troisième homme (Film et bande sonore des années 50)
    qui a, peut-être, choisi une voie de garage gelée en toute ignorance de cause!
    Mais il faut assumer la conjoncture qui nous dépasse pour enfin entrer en Résilience et se re-construire!
    foi de Boris Cyrulnick ta M… (aussi, sur ce blog, adoré!)

  5. Et certains se voilent la face (même devant leur propre vie).

  6. Sans connaître ce MR Barrico ni de qui il parle, il s’agit apparemment pour cette personne de vivre tout simplement sa vie. Bien! je comprends ça sans problème. Peut-être était-ce pour elle métro-boulot-dodo. En revanche, les mots “vivre sa vie” dits comme ça sans plus de précision ce qui est souvent le cas, sans un adverbe (par exemple “intensément”, c’est ce qui est généralement sous-entendu; ou bien a contrario “pauvrement”, dans ce cas la précision est nécessaire), ou bien sans une locution (par exemple “sans ambition” ou bien “à cent à l’heure”), m’agacent tout bonnement.

  7. Certains se regardent vivre. Certains s’écoutent pérorer. Certains se regardent légiférer. Certains se regardent manifester. Certains se regardent le trou du cul. Que de maladies mentales non soignées !

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