Princesse palatine : 8- Madame se meurt, Madame est morte

Si vous ne savez plus très bien qui était la princesse palatine (1) , reportez-vous à la note de bas de page. Sinon, lisez directement cet extrait de sa correspondance.

29 novembre 1722
Paris

Vous ne recevrez aujourd’hui qu’une bien courte lettre ; je suis plus mal que je n’aie jamais été et je n’ai pu fermer l’œil de toute la nuit. Hier matin, nous avons perdu notre pauvre maréchale (2) ; elle n’a éprouvé aucune attaque, mais la vie l’a comme abandonnée. Cela me fait une peine sincère, car c’était une dame d’une grande capacité et de beaucoup de mérite ; elle était fort instruite, mais elle ne le faisait pas paraitre. On dit qu’elle a choisi pour héritier le fils de son frère ainé. Il n’est pas surprenant de voir s’en aller une personne âgée de quatre-vingt-huit ans. Il est toutefois pénible de perdre une amie avec laquelle on a passé cinquante et un ans ; mais il faut que je m’arrête, ma chère Louise ; je suis trop souffrante pour pouvoir en dire davantage aujourd’hui. Si vous voyiez en quel triste état je suis, vous comprendriez bien que je dois désirer que cela finisse.

Notes

1-Lorsqu’elle arrive d’Allemagne à la Cour de Louis XIV en 1672 en tant qu’épouse du frère du Roi, Elisabeth-Charlotte du Palatinat a 20 ans. Par son mariage, cette princesse palatine devient Madame, duchesse d’Orléans. Voici le portrait qu’en faisait Saint-Simon :

« Madame tenait beaucoup plus de l’homme que de la femme ; elle était forte, courageuse, Allemande au dernier point, franche, droite, bonne, bienfaisante, noble et grande en toutes ses manières ; petite au dernier point sur tout ce qui regardait ce qui lui était dû : elle était sauvage, toujours enfermée à écrire, dure, rude, se prenant aisément d’aversion ; nulle complaisance, nul tour dans l’esprit, quoiqu’elle ne manquât pas d’esprit ; la figure et le rustre d’un Suisse; capable avec cela, d’une amitié tendre et inviolable. »

2-La maréchale de Clérambault

3-La princesse palatine est morte une semaine plus tard, le 8 décembre 1722, au château de Saint-Cloud

 

ET DEMAIN, AURELIEN ET BÉRÉNICE, 4ÈME VERSION

 

2 réflexions sur « Princesse palatine : 8- Madame se meurt, Madame est morte »

  1. Quel lien peut-on faire entre La Princesse Palatine et Aurélien, en dehors de la proximité des parutions sur le JDC? Mais Bérénice bien sûr! Les lecteurs du JDC, tous très cultivés, c’est la marque de ce quotidien depuis presqu’une demi-décennie, savent que Bérénice est la personnification même de l’amour impossible, de l’amour sacrifié pour obéir à la raison d’État, cette raison qui fait renoncer Bérénice et Titus à leur amour, il y a de ça quelques deux mille ans. Aragon n’a pas choisi les prénoms de son roman au hasard. Et c’est pas par hasard que l’un de ses plus beaux poèmes, magnifiquement repris par Georges Brassens, s’intitule “Il n’y a pas d’amour heureux”. Avant lui, Corneille a écrit une tragédie reprenant l’Histoire: ”Tite et Bérénice”, sans grand succès car elle fut évincée magistralement par celle de Racine tout simplement intitulée “Bérénice”. Une recherche historique approfondie, sur Wikipedia depuis mon jardin, m’a appris que cette tragédie était le reflet de la monarchie absolue et de l’exemplarité de Louis XIV renonçant à l’amour d’une certaine Marie Mancini (ce nom deviendra plus connu quelque trois siècles plus tard, associé aux comédies hollywoodiennes) pour épouser Anne d’Autriche pour raison d’État et de Géopolitique. Mazarin veillait. La Princesse Palatine, belle sœur de Louis XIV et épouse de Philippe d’Orléans, dit Monsieur (contraint dès sa jeunesse à ne pas nuire au pouvoir de son frère ainé, élevé “en fille”, et même initié au “vice italien”), se fera l’echo, comme le fera Voltaire plus tard, de cette analogie entre le “Bérénice” de Racine et la destinée amoureuse de Louis XIV.
    Voilà le lien que je voulais faire entre ces deux séries d’articles du JDC. Du coup, je dirais que la Princesse Palatine, âgée de 70 ans, souffrante, appelait de ses vœux en 1722, le coup de grâce.

  2. …et notre Bossuet national ne manqua pas l’occasion de donner une leçon d’humilité à la cour… Qui s’en extasia, mais n’en continua pas moins à l’ignorer (l’humilité).

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