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Rendez-vous à cinq heures : va faire chaud !

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Va faire chaud !

Je publie ici cet article de la revue d’histoire, Hérodote, qui m’a été transmis par Jim. Un grand merci à lui.
Sans contester en aucune manière la rigueur scientifique de cette revue ni l’exactitude historique des faits rapportés, je ne voudrais pas que cet article vienne conforter les positions  climato-sceptiques et servir de caution aux fake-news qui circulent en abondance sur les réseaux sociaux, autrement dit : « il a fait chaud avant, il fait chaud aujourd’hui, rien de nouveau ni d’alarmant sous le soleil » 

L’ennuyeux serait que cet article ne déclenche sur le JdC une escalade de commentaires et contre-commentaires, ce qui ne manquerait sans doute pas de faire monter la température, et  qui serait regrettable en cette période de début de canicule.  

 

Climat

Mortelles canicules

Pour voir les illustrations qui accompagnent l’article d’Hérodote, cliquer sur le lien ci-dessous : 

https://www.herodote.net/Mortelles_canicules-synthese-2294.php

Sous nos latitudes tempérées, la mortalité est habituellement plus élevée en hiver que dans les autres saisons, les personnes âgées ou malades supportant mal les baisses de température et le raccourcissement des jours. Pour cette raison, nous sommes davantage effrayés par les hivers rudes que par les étés caniculaires. Pourtant, les chroniques montrent que les pics de chaleur, avec la sécheresse, les épidémies et les incendies qui les accompagnent, ont toujours causé davantage de dommages et de victimes que les grands froids.

Avec le réchauffement climatique en cours, ces calamités ont toute probabilité de se reproduire d’année en année avec une intensité croissante si aucun remède n’est porté à notre surconsommation d’énergie fossile : autos, avions, agro-industrie… Au moins sommes-nous avertis ! Rien à voir avec la canicule de 2003, en France, quand les journalistes n’ont rien vu du drame en cours

Julien Colliat

L’eau, quel malheur !

Contrairement à une idée reçue, les épisodes de sécheresse furent au cours des siècles passés bien moins préjudiciables sur les rendements agricoles que les étés pluvieux.

Un exemple significatif est le terrible orage qui frappa la France le 13 juillet 1788 et détruisit les récoltes de blé, provoquant une disette qui ne sera pas sans lien avec les événements révolutionnaires qui allaient suivre un an plus tard.

Si les étés caniculaires ont été à l’origine de catastrophes sanitaires récurrentes, c’est d’abord en raison des pénuries d’eau, le niveau des nappes phréatiques baissant drastiquement lors des épisodes de sécheresse.

Moins abondante, l’eau devient plus vaseuse et sa consommation génère des infections bactériennes, telles que la dysenterie, une maladie des intestins qui fut un véritable fléau. Au Moyen Âge, la dysenterie emporta ainsi de nombreux souverains : Louis VI le GrosLouis VIIISaint Louis, Philippe V, Jean sans Terre ou encore Édouard Ier et Henri V d’Angleterre.

Au cours des siècles suivants, elle coûta la vie au conquistador Hernan Cortès, à l’écrivain Étienne de la Boétie, au corsaire Francis Drake ainsi qu’à l’explorateur David Livingstone.

Apparu à la fin du XVe siècle, le mot « canicule » vient du latin canicula qui signifie « petite chienne ». C’est sous ce nom qu’avait été baptisée Sirius, principale étoile de la constellation du Grand Chien, et étoile la plus brillante du ciel après le Soleil. Sirius se lève et se couche en même temps que le Soleil du 22 juillet au 23 août. Comme c’est durant cette période que les fortes chaleurs sont les plus fréquentes, l’expression « jours de canicule » qui renvoyait à l’origine à la période de l’année où l’étoile était visible, a progressivement fini par désigner les journées extrêmement chaudes.

Les terribles étés 1636, 1705 et 1719

Le nombre des victimes des grandes chaleurs de l’Antiquité et du Moyen Âge sont très difficiles à évaluer, les surmortalités estivales se confondant avec les épisodes de famines ou d’épidémies de peste. Il faut véritablement attendre le XVIIe siècle pour commencer à disposer des premières données chiffrées.

En 1636, année où Corneille écrit le Cid, un été caniculaire frappe la France, et plus précisément la capitale où les témoins décrivent « un effroyable harassement de chaleur » qui se maintient pendant plusieurs semaines. Cette terrible vague de chaleur et les maladies infectieuses qu’elle engendre vont provoquer la mort de 500 000 personnes.
Un chroniqueur du nord de la France témoigne : « Cette année 1636 a été mémorable pour la grande mortalité et contagion qui a été très forte par tous les pays, villes et villages, ayant emporté une bonne partie des créatures partout où elle s’est attachée (…) une infinité de monde qui est mort par fièvres chaudes, dysenteries. »

En 1705, quatre ans seulement avant l’un des pires hivers de l’Histoire, la France dut de nouveau faire face à un été caniculaire. À Paris, les 39 degrés sont atteints durant plusieurs jours tandis que dans le sud du royaume la chaleur est telle que les thermomètres sont brisés par la dilatation du liquide. Cette canicule sera suivie par deux autres étés extrêmement chauds. Leur bilan humain total est évalué entre 200 000 et 500 000 victimes, une nouvelle fois causées par les infections de l’eau.

Mais le pire était encore à venir. En 1718 et 1719, deux étés caniculaires se succèdent. Durant le second, les fortes chaleurs s’étalent sans discontinuer de juin à la mi-septembre. Une forme de climat saharien s’abat sur la région parisienne et les témoins rapportent même l’invasion de nuées de sauterelles en provenance d’Afrique du Nord. Elles ravagent les cultures jusqu’en Normandie !

La sécheresse est si importante qu’à Paris, la Seine atteint son plus bas niveau historique. C’est à ce niveau record (26,25 mètres au-dessus du niveau de la mer) que correspond la cote zéro de l’échelle hydrométrique du pont de la Tournelle, autrefois utilisée pour mesurer la crue de la Seine.

Ces deux étés caniculaires saignent à blanc le royaume : 700 000 morts (dont 450 000 pour la seule année 1719) pour un pays qui compte une vingtaine de millions d’habitants. Les victimes sont essentiellement des bébés et des enfants, atteints de dysenterie véhiculée par l’infection des eaux devenues trop basses.

Au cours du XVIIIe siècle, d’autres étés caniculaires entraînent des pics de mortalité considérables. Les étés 1747 et 1779 font ainsi chacun près de 200 000 victimes. À chaque fois, dans l’indifférence quasi-générale, ce sont des générations entières de nourrissons qui sont décimées par les maladies infectieuses en conséquence de la chaleur et de la sécheresse.

Trente sept, sept… à l’ombre ! Et on nous promet davantage !

Les titres de la presse parisienne de 1911, comme ici Le Journal du 10 août 1911, sont éloquents : les citadins sont désemparés face aux épisodes caniculaires. Comme aujourd’hui, on se plaît à aligner des records de température… (source : BNF, Retronews).

L’été meurtrier de 1911

Au XIXe siècle, les deux canicules les plus meurtrières eurent lieu en 1846 et 1859 (année marquée par l’un des mois de juillet les plus chauds de l’histoire). Les bilans humains furent néanmoins légèrement plus faibles qu’au siècle précédent, avec à chaque fois une centaine de milliers de victimes. Les améliorations sanitaires de la seconde moitié du XIXe siècle réduisent considérablement les pics de mortalité des vagues de chaleur.

Alors que les scientifiques de la « Belle Époque » affirment que les catastrophes humaines du passé sont à jamais révolues, un nouvel été caniculaire va totalement remettre en cause les présupposés hygiénistes de l’époque…

Hérodote – publié ou mis à jour le : 2022-06-15 

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