Rendez-vous à cinq heures : Ouf !

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Ouf ! 

Je n’ai pas beaucoup de gout pour les omniscients comme Yuval Harari qui entendent nous apprendre en quelques centaines de pages quelle a été la véritable histoire de l’humanité et ce qu’elle va devenir. Pas beaucoup de gout et aucune confiance. C’est pourquoi j’avais laissé tomber « Sapiens » au bout de quelques dizaines de pages.

Ceci dit,  la lettre quotidienne de TTSO (Time To Sign Off) fait aujourd’hui référence à un article de The Economist signé par Harari. Comme TTSO le résume, ça m’évite de le lire et d’y chercher la petite bête comme j’aurais tendance à le faire naturellement.

La thèse est paradoxale et intéressante. Elle mérite qu’on s’y arrête : selon Harari, c’est à notre époque que le paix est devenue l’état naturel du monde.

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Nous avons lu l’édito que publie Yuval Harari dans The Economist. Sa thèse : ce qui se joue en Ukraine est « la préservation de la plus grande réalisation politique de l’histoire de l’humanité » : la fin de la guerre. Points principaux.

  1. La guerre (= « organized warfare ») n’est pas consubstantielle à l’humanité, c’est un choix politique. L’Homo Sapiens a 300 000 ans, les premières traces de conflit armé remontent à 13 000 ans.
  2. Depuis 1945, notre attitude face à la guerre a radicalement changé pour trois raisons :
  3. L’assurance d’une destruction nucléaire mutuelle en cas de conflit mondial
  4. La fin des économies de ressources et l’avènement des économies de « savoirs »(contrairement aux champs de pétrole, les ingénieurs ne se conquièrent pas par invasion territoriale)
  5. Des élites politiques et intellectuelles anti-guerre (là où jusqu’aux années 30 le bellicisme était accepté/valorisé)
  6. Cela a conduit à une inversion totale du destin de l’humanité : la paix a cessé d’être ce répit entre deux conflits, pour devenir l’état stable – et « naturel » – de nos sociétés humaines.

C’est sur cette « non-plausibilité » de la guerre sur leur territoire que l’Occident et l’Europe en particulier se sont construits depuis 1945…

… et c’est cette « plus grande réalisation politique de l’histoire de l’humanité » que remet en cause l’invasion potentielle de l’Ukraine. Rien de moins. Espérons qu’on puisse dire ouf.

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5 réflexions sur « Rendez-vous à cinq heures : Ouf ! »

  1. J’ai omis dans la question de préciser, et je comprend que ça laisse perplex, alors on doit lire « Comment ceux qui prétende être, et il le sont, nos représentants de guerre, soient des être sociaux ».

  2. On ne doit pas oublieer que nous sommes des êtres sociaux. En société nous ne pouvons pas nous dissocier de ce lien et en faire une totale abstraction. Comment ceux qui prétendent, et ils le sont, être nos représatants de guerre?

    L’homme serain est un être sociale, et bien que nous ne pouvons pas vivre sans quelque méfiance, ne se sert pas de la méfiance pour poursuivre sa réflexion. S’adapter à un individualisme forcené conduit, je pense, à la dictature. La guerre en règle ne fait que ruminer cette adaptation, et par le fait ruine l’imagination de visualiser autrement le rôle de l’individue devenue soit disant autonome, mais assujetti.

    La clairevoyance de l’être serain donne un accès à la paix entre les hommes, parce que la rigidité est le résultat de ce manque, qui est bien représentatif, de faculté du développement humain.

    Il y a en effet deux sens à donner au mot religion qui vient du latin religere et religare. C’est pour le premier ce qui relie les hommes et le second ce qui rassemble les hommes. En séparant les deux nous sommes schisophrène de notre humanité. Ce qui est stupéfiant, c’est qu’on remarque l’absence d’étonement de cet être déchut. Il se montre en porte à faux dans l’environnement ou il évolue, car il n’est pas dénué d’habileté. On ne peut pas avoir de paix sans hommes serain, bien qu’on puisse avoir des individus dans une société non représentative de cette sérénité.

  3. La paix de l’homme et la paix entre les hommes me paraissent deux choses différentes.
    La première conduit à la sérénité, la seconde à l’absence de guerre.

  4. Il est pernicieux que la dynamique de synthèse du mode de la paix dans l’esprit humain se résolve par le fait que la puissance soit ce qui provoque que la paix soit. Je ne me souviens plus qui avait conclus « on a gagné la guerre mais pas la paix » et de celui qui avait prédit « si vous voulez la paix préparer la guerre ».

    En fait je pense que la seule puissance que nous puissions, il y a surement un mot qui m’échappe pour évoquer ceci sans cette redondance, est sur soi-même. Et cela ne représente pas une forme d’individualisme forcené ce qui serait inscencé. La paix résulte d’un état d’être, et s’atteint par un étrange mélange d’imagination, d’intuition, de réflexion toutes révélatrices des perceptions de nos sens dans leurs interprétations.
    L’imagination apporte à l’esprit la découverte, l’intuition la reconnaissance de cette découverte, et la réflexion la plausibilité que notre intuition évoque.

    Ce shéma est surement caricatural pour celui que la réification du monde rend homnipotent tout ce qui entrave la naïveté d’un cheminement qui mènerait là où il veut aller. Et cette cause devient indépendante de sa volonté qu’il croit volontaire. S’échappe ainsi de sa reconnaissance de l’imagination la réflexion d’une découverte et de l’être qu’il pourrait devenir, en paix.

  5. Je comprends ta réticence, Philippe : Harari est spécialiste des grandes idées aussi édifiantes que creuses. Il parcourt le monde, les éditeurs (y compris en bandes dessinées) et les estrades (il lit ses livres en conférences ou écrit ses conférences en livres) pour professer le savoir qu’il tire de compilations des idées des autres. Mais il laisse parfois songeur : comment peut-il affirmer que, depuis 1945, la paix est l’état stable de l’humanité ? Citoyen, historien, professeur et largement résident israélien, n’a-t-il pas observé que son pays – comme beaucoup d’autres encore aujourd’hui – est en guerre permanente depuis sa création en 1948 ? Non, la paix n’est pas l’état du monde d’aujourd’hui, elle ne l’a jamais été et ne le sera jamais, car la paix est un combat permanent de l’homme contre son humanité. (Si quelqu’un veut ajouter « amen », qu’il ne s’en prive pas !

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